Commençons par le conte.
"Le nom sur le bout de la langue" est le récit non tronqué qui servit de cannevas à l'oeuvre musicale du même nom composée par Michèle Reverdy.
À la façon des contes de notre enfance, Pascal Quignard met en scène une jeune femme qui fait un pacte avec le Diable pour pouvoir épouser Jeune, le tailleur. L'objet du pacte ? Se souvenir du nom de ce trouble seigneur pendant 12 mois. Bien évidemment, la belle ne se souvient plus du nom avant la date fatidique. Pourtant, elle l'a là... sur le bout de la langue.

La seconde partie, "Petit traité sur Méduse", m'a paru beaucoup trop hermétique. Comme si l'auteur se satisfaisait lui-même, en posant les mots, en les agençant, les combinant. Et puis, cette obsession de ramener l'écriture à une sorte d'éjaculation m'a semblé pour le moins douteuse et typiquement masculine.
Un bilan plutôt mitigé donc...

Du même auteur : Tous les matins du monde

Laurence

Extrait :

Le nom sur le bout de la langue
"Colbrune se souvint du Seigneur qui était venu la visiter un soir où elle pleurait, alors qu’elle avait laissé sa lumière allumée dans la nuit, la veille du jour où elle s’était mariée avec Jeûne. Elle se souvint de la promesse qu’elle avait faite. Elle était sur le point de se souvenir du nom du Seigneur quand tout à coup ce nom fuit son esprit.
Le nom était sur le bout de sa langue mais elle ne parvenait pas à le retrouver. Le nom flottait autour de ses lèvres, il était tout près d’elle, elle le sentait, mais elle n’arrivait pas à ses saisir de lui, à le remettre dans sa bouche, à le prononcer."

Petit traité sur Méduse
"Ecrire, trouver le mot, c’est éjaculer soudain. Ce sont cette rétention, cette contention, cette arrivée soudaine.
C’est approcher non pas le feu – « Je brûle ! » - mais le foyer central où le feu prend sa flamme.
Le poème est ce jouir. Le faire-corps avec la langue est le poème/ Pour procurer une définition précises du poème, il faut peut-être convenir de dire simplement : le poème est exactement l’opposé du nom sur le bout de la langue."

le nom sur le bout de la langue
Éditions P.O.L. - 112 pages