Ce livre porte sur la rencontre entre deux improbables amis, un jeune musicien français en quête de succès et un dictateur latino-américain en perte de pouvoir. Leur rencontre se transportera de New York vers le train du dictateur, train dans lequel se tissera cette étrange relation qui confrontera le narrateur à ses peurs, ses erreurs, sa violence.

Le roman est bâti comme une fable ne cherchant pas à se coller à une réalité historique et sociopolitique quelconque. On en remercie l’auteur. Le flou qui entoure le contexte politique de son histoire (il n’est pas étonnant d’ailleurs d’apprendre que l’idée de ce roman lui est venu en rêve) sauve la mise en l’empêchant de s’empêtrer dans des considérations qui l’aurait éloigné de son propos.

Mais quel est ce propos ? Les parallèles entre la carrière ratée du jeune musicien et la situation d’extrême tension dans laquelle il est plongé m’ont laissée sur ma faim. Pour ma part, je n’ai pas réussi à trouver convainquant les fils tendus entre les très courts chapitres qui évoquent sa décevante expérience d’artiste et ceux qui évoquent son voyage sur les genoux du dictateur.

Je ressors de cette lecture avec un étrange sentiment : j’ai apprécié ma lecture et en même temps je sens qu’elle ne m’a pas marquée. En même temps, il y a là une imagination et une créativité qui me laisse croire que Stéphane Achille pourrait nous revenir avec autre chose qui s’éloigne encore plus de sa réalité, encore plus éclaté.

Une question encore : pourquoi le narrateur est-il français ? Je n’arrive pas à l’expliquer clairement, mais cela m’a dérangée tout au long de la lecture. Pourtant il utilise bien des expressions françaises (comme baskets), mais il me semble qu’il s’exprime en québécois. Les tournures de phrase, la syntaxe, tout ça est profondément québécois des années 2000. J’ai hâte de lire ce que les autres ont pensé de ce point, me demandant vraiment si c’est moi qui chipote inutilement.

Par Catherine

Extrait :

Manuel regardait par la fenêtre en parlant mais il a soudainement tourné la tête vers mois.

C’est bête que vous ayez choisi un domaine où vous êtes si médiocre. Dans un autre champ d’activité, vous auriez sans doute connu une brillante carrière. Je sens bien tout votre potentiel.

Qu’est-ce qu’il en savait de mon potentiel ? Il le sentait en me regardant dîner en silence ? Il n’en savait rien et donc il se payait ma tête, il ne pouvait en être autrement. Mais pourtant, impossible d’en être sûr, encore une fois. Son ton était de nouveau à mi-chemin entre le sarcasme et le sérieux, comme s’il avait inventé une zone grise entre le premier et le second degré. Un premier degré et demi.

couverture
Éditions VLB - 192 pages