Dans la solitude et la brume de la mer Baltique, le capitaine Tobiasson-Svartman découvrira une femme vivant seule sur l’îlot de Hallskär. Il développera une obsession pour celle-ci et en fera sa maîtresse. Il n’en fallait pas plus pour que cède la mince glace qui protégeait le capitaine de ses propres profondeurs. Pris quelque part entre l’obsession et la mythomanie, il accumule les mensonges à tous et chacun pour essayer de faire vivre en parallèle cette nouvelle vie sauvage et fascinante et sa vie ordinaire avec sa femme à Stockholm. Au détour de ses mensonges il ne trouvera que la violence, celle-là même qui l’avait tant dégoûté de son propre père. Le quatrième de couverture vend la finale… mais je m’abstiendrai si ce n’est pour dire qu’il existe des plongeons dont on n’émerge jamais.

Ouf ! Voilà un excellent livre… qui m’a gâché ma semaine ! Quelle épreuve. À chaque page, et ce dès la première, on ressent exactement ce qui se passera : la déchéance. Il fait froid, il fait humide et brumeux. On y est, on en souffre déjà. Bien entendu, cet anti-héros n’a rien de sympathique, mais il n’a pas été écrit pour être sympathique. Juste souffrant. Et dans cette façon qu’il a de fuir son abîme intérieur, on reconnaît, il me semble, la part sombre de chacun d’entre nous. C’est un livre sur la perte de contrôle, sujet qui me rejoint intimement. Un roman sur la pire des pertes de contrôle.

Bon, j’ai quand même trouvé deux erreurs marquantes. En page 126 on est le 2 décembre et en page 146 le 17 novembre (!) et que dire du père de Lars qui s’appelle Hugo dans l’extrait qui suit et Hans en page 221. Je dis : mais que font les éditeurs !

Mais tout de même, quel livre excellemment horrible ! À tenir loin des mains de ceux qui se sentent fragiles.

Du même auteur : Le guerrier solitaire

Par Catherine

Extrait :

Höckert le conduisit à sa cabine, située sous l’échelle qui, à bâbord, menait au pont de commandement et au poste central de tir.
Il avait un grain de beauté au cou, juste au-dessus du col.
Lars le regarda fixement, à en loucher. Chaque fois qu’il découvrait une tache sur un corps, il essayait d’y deviner un dessin secret. Son propre père, Hugo Svartman, en avait plusieurs sur l’avant-bras gauche. Dans son imagination, elles étaient devenues un archipel de petites îles sans noms, d’écueils et de rochers. La peau blanche figurait les routes maritimes qui se croisaient. Où menaient les chenaux tracés sur le bras gauche de son père ? Quel était le chemin le plus sûr pour y engager un navire ?
Sa passion secrète pour la sonde, les mesures et les distances, si profondément ancrée dans sa vie, prenait source dans ce souvenir et ces images des grains de beauté paternels.
Tobiasson-Svartman pensa à part soi : Je cherche en moi des terres inconnues, des fonds que personne encore n’a sondés, des cavité inattendues. C’est aussi en moi-même que je dois cartographier et baliser des routes parfaitement sûres.
Le grain de beauté d’Anders Höckert figurait un taureau prêt à charger, cornes baissées.

couverture
Éditions Seuil - 348 pages