C'est la panique à la bergerie. Miss Maple, Zora, Mopple, Othello et les autres sont sans dessus dessous. Ce matin, en allant paître, ils ont découvert le corps sans vie de George Glenn, leur berger. Et chose étrange, il avait une bêche plantée en plein milieu du corps. Après un débat animé, ils en concluent tous que cette mort n'est pas naturelle, et sont bien décidés à trouver qui est l'auteur de cet horrible carnage.
Mais mener une enquête au pays des hommes quand on est un ovin n'est pas une tâche aisée. Pour commencer, ces pauvres humains ont un odorat tellement peu développé, que les moutons doutent même de l'existence de leurs âmes. Et depuis la mort de George, tous les villageois se sont donné rendez-vous dans leur prairie. Il y en a deux, tout particulièrement, que les moutons voient d'un très mauvais œil : le boucher bien sûr, mais aussi un étrange personnage tout habillé de noir qui se fait appeler Dieu.
Heureusement, grâce aux lectures que George leur faisait pendant les longues après-midis de beaux temps, le troupeau sait qu'ils doivent trouver des indices. Miss Maple prend alors les rennes de cette enquête. C'est bien normal puisque c'est la brebis la plus intelligente du troupeau, voire du village, et peut-être même du monde...

Léonie Swannie s'est amusée à imaginer le monde à travers les yeux des moutons et c'est assez bien réussi. L'intrigue en elle-même n'est pas forcément la plus haletante qui soit, mais qu'importe. Ce qui est intéressant ici c'est la transposition que le récit propose et qui donne naissance à des situations plutôt cocasses. Certaines scènes sont absolument hilarantes. J'ai particulièrement aimé les passages mettant en scène le curé du village ou le procédé que les moutons mettront en œuvre pour ne pas être récupérés par le berger Gabriel.
Il y a vraiment des moments très bien vus et les personnages laineux sont particulièrement attachants. Une lecture récréation amusante et inventive.

Voir aussi les avis de Cathulu et Chimère

Laurence

Extrait :

Cloud fixait toujours la touffe d'herbe d'une air songeur. Il fallut que Zora lui effleure le flanc du museau pour qu'elle se remette à parler, d'une voix basse et hésitante :
- Au bout d'un moment, George aussi s'est mis en colère. Il m'a déposée dans les bras de l'homme en noir et a dit : « Vas-y, bénis-la ! » L'autre sentait mauvais, cela me faisait peur. Il ne savait pas comment me tenir, mais m'a quand même emmenée. Il avait la plus grande maison du village - grande, pointue et froide comme lui. Il m'a enfermée dans son jardin. Tout seule. Il y avait un pommier, mais protégé par un grillage, et les fruits pourrissaient bêtement par terre.
À nouveau, quelques moutons bêlèrent, scandalisés. Claud fut prise d'un frisson.
- Tout à coup, une foule de gens est arrivée. Ils amenaient des chiens, des moutons que je ne connaissais pas et un cochon. Moi aussi, j'ai dû entrer. Cela faisait un boucan d'enfer, mais l'homme en noir s'est mis à parler d'une voix incroyablement forte. Chacun pouvait l'entendre : « Bienvenue dans la maison de Dieu ! » a-t-il dit. Puis il a raconter plein d'autres choses.
Elle fit une pause, toujours aussi songeuse.
- Donc, il s'appelle Dieu..., déduisit Ritchfield.
Othello fit une étrange grimace :
- Dieu ?
- Peut-être, répondit timidement Cloud. Peu à peu, j'ai compris qu'ils vénéraient un agneau. Je trouvais l'idée belle. Tous ces être humains adoraient un agneau, mais un agneau particulier. Ils l'appelaient « Seigneur ». Puis il y eut de la musique, comme à la radio... sauf qu'ils jouaient faux. J'ai regardé autour de mou et eu affreusement peur. Sur le mur, il y avait un homme nu, et bien qu'il soit couvert de plaies, il ne sentait pas le sang.
Elle préféra ne pas poursuivre son récit.
- Et il avait un bêche dans le ventre, pas vrai ? conclut triomphalement Ritchfield.

Qui a tué Glenn?
Éditions Le Livre de Poche - 377 pages