Toute la première partie du roman est vraiment passionnante : Jake Wade, ancien flic au passé trouble, aujourd’hui enquêteur pour une compagnie d’assurance à Los Angeles, cherche à comprendre l’origine de l’incendie qui a tué la femme d’un riche promoteur immobilier. On comprend alors tous les mécanismes du feu, tout ce qu’il raconte une fois qu’il est éteint. Et l’on s’aperçoit qu’il est très bavard. La seconde partie du roman, est malheureusement moins bien réussie. L’auteur embarque son lecteur dans une série de rebondissements ahurissants et peu crédibles. Dommage, car après avoir été embarquée littéralement par le début de ce récit, j’ai finalement été très déçue par cette fin rocambolesque.

Laurence

Extrait :

Le feu a un langage à lui.

Pas étonnant, songe Jack, qu'on parle des « langues de feu », car le feu parle, en effet. Vivant, le feu est une vraie pipelette : la couleur des flammes, celle de la fumée, la vitesse de propagation, les bruits qu'il émet selon les substances auxquelles il s'attaque révèlent tout sur lui, et il ne s'éteint que lorsqu'il a achevé le récit de ce qu'il fut.
Le feu est son propre historien.

Il est si fier de lui, pense Jack, qu'il ne peut pas s'empêcher de décrire et de commenter ses prouesses.

Aussi, dès le lendemain matin à la première heure, Jack est à pied d'oeuvre dans la villa Vale.

Debout au milieu de la chambre calcinée, il écoute ce que le feu lui chuchote à l'oreille. Le feu le provoque, railleur. Vas-y, décrypte-moi, toi qui es si malin. Regarde un peu tout ce que je t'ai laissé. […]

Si le feu a un langage, l'aspect du charbon en est la grammaire : il donne la structure de la phrase, l'ordre sujet-verbe-complément. Or la syntaxe que Jack découvre ici ressemble à la prose d'un Kerouac halluciné : exclusivement des séquences verbe-verbe-verbe, sans sujet ni objet, qui révèlent que ce feu-là bougeait, et sacrément, sans virgules ni points.
Ce feu déménageait, constate Jack soufflé. Il a en effet sous les yeux la forme carbonisée dite « alligator », car elle rappelle furieusement la peau de cet animal. Un feu qui brûle très fort brûle forcément très vite. Il brûle à toute berzingue, en se déplaçant, donc il laisse derrière lui des lignes de démarcations nettes entre ce qu'il consume et ce qui lui résiste. À la fin, les restes ressemblent vraiment à une peau d'alligator.

Plus ça chauffe, plus ça va vite, et plus la dépouille de l'alligator est impressionnante.

L'alligator auquel Jack a affaire est un sacré morceau.


Éditions Pocket Thriller - 583 pages