Joseph Blount et Emmanuel Polder se retrouvent un soir dans un bar de la place Clichy.
Blount pense à Scetka, la Roumaine réapparue au bout de vingt ans, en train de mourir sur un lit d'hôpital.
Polder pense à Tristessa, la jeune argentine, belle et silencieuse.
Mais qui pense à Verdaine, la troisième femme? La seule, peut-être, à ne pas être un fantôme?
À travers une construction patchwork, Alain Claret peint les obsessions et les espoirs de ces deux hommes.

J'avais découvert Alain Claret cet hiver, et son écriture m'avait totalement laissée sous le choc. Je voulais donc, depuis un moment, lire une autre de ses oeuvres. Il se trouve que celle-ci était disponible à la bibliothèque et que d'est son premier roman.
La structure est de prime abord très déroutante. On a un peu l'impression de visualiser des rusches collés dans le désordre. Le texte passe sans arrêt des pensées de Blount à celles de Polder, du présent au passé proche ou lointain. Mais peu à peu on s'habitue à cette étrange mélopée, et ces monologues mêlés nous racontent finalement la même histoire : celle d'un homme amoureus et incapable d'amour.
On devine déjà ce qui m'a séduit dans l'écriture de Si le Diable m'étreint. C'est bien la même plume, et si sur ce premier roman elle n'a pas encore trouvé toute la vigueur qui m'avait tant bouleversée, elle annonce déjà un auteur singulier.

Pour mieux découvrir cet auteur, ne ratez pas l'interview exclusive qu'il a accordée au Biblioblog.

Du même auteur : Si le Diable m'étreint, L'ange au visage sale, Tout terriblement, Que savez-vous des morts? et Paysage sombre avec foudre

Extrait :

Il faisait nuit devant le 33, boulevard Voltaire, mais ce n'était pas la même nuit que devant l'hôtel de Malte. La pluie s'était arrêtée. Le boulevard lavé luisait jusqu'à la place de la République. Une belle nuit noire et luisante, pleine de bruits, avec un beau courant d'air qui soufflait de la place jusqu'à la Nation, emportant les lumières et les passants.
À cette heure, le boulevard ressemblait à un fleuve, avec ses hangard et ses quai, et les passants à une procession de rameurs solitaures qui luttaient, courbés, contre le courant. Ce n'était pas le Gange, personne ne venait pour s'y laver de ses impuretés ou de la vie. Ce n'était pas le plus bel endroit du monde, ni même une rue intéressante. Tristessa y vivait, au sixième étage, face au métro.

couverture
Éditions Flammarion Rue Racine - 197 pages