Une histoire qui se lit d’une traite sur les non dits, les silences, ces après la disparition, sur les comment faire avec ses douleurs. « Comment vivre avec un trou dans le ventre ? Comment çà va la vie ? La vie fait un mal de chien » Avec une écriture élégante, subtile, grave, toute en pudeur, Arnaud Catherine nous relate cette ambiance lourde, aliénante même, où le besoin de s’enfuir devint impérieux. L’auteur nous fait vivre avec cette fratrie. On suit ce qui se joue entre eux, en eux, la solitude, les fragilités qui se sont glissées dans les failles mal colmatées.

Pour avoir lu d’autres romans de l’auteur - Sur la route de Midland, Les vies de Luka (plus sombres) - je ne peux plus m’empêcher de rapprocher sa plume de celle d’Olivier Adam. Et comme chez ce dernier, certes la vie est triste, désespérée, lourde à porter parfois mais souvent elle nous offre aussi de magnifiques répits, des amours, des amis – j’ai aimé Nathan l’adopté, un autre éclopé qui va les soutenir tous - auxquels on peut se raccrocher le temps de souffler. C’est triste, c’est à lire pourtant parce que c’est beau.

Du même auteur :  Nos vies romancées, Les choses impossibles, La vie peut-être, La disparition de Richard Taylor, La route de Midland, Les vies de Luka


Dédale

Extrait :

Papa et Remo ont fait le vide autour d’eux. Les Desrosières n’ont jamais remis les pieds chez nous. Aujourd’hui, ils se contentent de nous saluer sur la plage avec un air de commisération. Ils se tiennent à distance, comme devant des gens devenus brusquement infréquentables. Il doit leur arriver de faire allusion à nous entre eux, nous plaignant trois minutes pour finalement se repaître de leurs bons sentiments et oublier par là même que nous ne les intéressons plus du tout, amputés et déprimants, la mine pas aussi réjouie que les années précédentes, contagieuse peut-être. Ils nous regardent avec la méfiance que l’on réserve à ceux qui ont refusé de venir s’expliquer en place publique et ont gardé leur vie, leur chagrin pour eux. La pudeur a mauvaise réputation. Il faut montrer patte blanche, où que l’on aille fût-elle noire de boue, la patte ; cela vous fait une meilleure carte de visite que de vouloir vivre sa vie sans brader les moindres détails à qui voudrait sa curiosité rassasiée (et se fait bien souvent passer pour un ami trahi par votre réserve).
Bon débarras.

couverture
Folio – 241 pages