Dans La mer, John Banville, écrivain irlandais de renom nous présente Max. Ce cinquagénaire vient de perdre sa femme Anna d'un cancer. Pour faire face à cette période difficile, il décide de revenir sur les lieux de son enfance. Là, dans la résidence Les cèdres où il loge et ancienne habitation estivale de la famille Grace, les souvenirs remontent à la surface. La mer toute proche livre des évènements, des sentiments et découvertes comme après un gros coup de tabac.

En ouvrant cet ouvrage, je ne savais pas à quoi m'attendre. Il est des lectures qui vous tirent vers le haut, qui vous dynamise - même si le sujet et le ton de l'histoire sont tristes, pas forcement enjoués. Bref, de ces lectures qui vous aident à ré-enclencher la machine à lire. Qu'est-ce qu'y a fait que je n'ai pu que m'empêtrer un peu plus avec cette histoire pourtant encensée par le plus grand nombre ?

Le roman balance entre deux périodes de la vie de Max. Celle juste après le décès de sa femme où il doit être en état de choc. En fait, je n'en suis pas certaine tant il me semble dans un état de résignation permanent. Tout semble glisser sur lui sans qu'il réagisse plus que d'ordinaire. Et puis une autre où Max remonte dans son enfance, sa découverte de la famille Grace, vacanciers aisés dans le petit village côtier où il réside. John Banville a certainement voulu mettre en lumière cette période essentielle de notre évolution, l'enfance. Cette période où tout évènement, toute nouveauté est perçue comme entourée d'une aura de merveilleux. Tout y est intense, important : sa rencontre avec une famille peu conventionnelle selon ses critères - il va même jusqu'à parler des Grace comme de Dieux, la découverte du désir, ses premiers émois amoureux...etc. Telle devait être son intention. Mais voilà, elle a échappé à ma lecture. Rien n'a fait que je compatisse aux tourments passés ou présents de Max, même pas la poèsie ressentie parfois. Je suis restée loin, très loin de la rive, perdue dans les flots de mots.

J'ai fini par abandonner ce roman à environ à cinquante ou cent pages de la fin, je n'en pouvais plus. Comme une naufragée qui abandonne parce que ses forces sont épuisées. Peut être trouverai-je plus tard le courage de relire cette histoire pour mieux l'apprécier.
La mer est dangereuse. Elle nous joue parfois bien des tours.

Dédale

Extrait :

Ils partirent, les dieux, le jour de la drôle de marée. Toute la matinée, sous un ciel laiteux, les eaux avaient monté, monté, jusqu'à atteindre un niveau sans précédent, et les petites vagues s'étaient aventurées sur n sable assoiffé que rien n'avait mouillé depuis des années, sinon la pluie, pour venir lécher le pied même des dunes. La coque rouillée du cargo échoué à l'autre bout de la baie depuis bien avant nos premiers souvenirs à tous avait dû croire à un renflouement. Moi, je n'allais plus nager après ce jour-là. Apparemment déconcertées par le spectacle de cette gigantesque cuvette d'eau gonflée comme une ampoule, bleu de plomb et d'un éclat malin, les mouettes criaillaient et faisaient des piqués. Ils étaient d'un blanc pas naturel, ces oiseaux, ce jour-là. Les vagues déposaient une frange d'écume jaune sale sur la laisse de haute mer. Pas une voile n'altérait la bande étroite de l'horizon. Je n'allais plus jamais nager, non, plus jamais.
Quelqu'un vient de me faire tourner les sangs.
Quelqu'un.


Éditions Robert Laffont - 247 pages