Le héros de ce court récit est un jeune homme de milieu modeste qui, par ses qualités professionnelles, se taille une place auprès d'un riche industriel qui finit par en faire son secrétaire privé à domicile. D'abord récalcitrant à l'idée, le jeune héros pliera pour finalement entrer dans l'intimité de cet homme et tomber follement amoureux de sa femme. C'est donc d'abord le récit d'un amour réciproque, passionné et tendre à la fois, mais impossible. Après quelques mois, le jeune homme doit quitter, ne pouvant refuser un contrat outre-atlantique vers le Mexique. La femme promet de s'offrir une fois au jeune homme lorsqu'il sera de retour. Mais pendant ses deux ans, la Grande guerre éclate et notre héros restera finalement éloigné près de 10 ans.

Quand ils se retrouvent, après toute cette absence, ils prennent un train pour se rendre dans une ville où leur amour pourra prendre chair. Et c'est là que le malaise des années, la violence de la guerre et le fossé qui, malgré eux, s'est creusé, se révèle. Ils se heureteront à de nouvelles traces d'une amère violence politique qui ne pourra que leur rappeler que le printemps de leur amour est bien passé.

Un récit inédit de Stefan Zweig! Incroyable, mais vrai! Et un récit court, mais poignant, où le grand écrivain qu'il est nous démontre une fois de plus sa capacité à décoder l'intime pour définir l'universel, où la métaphore d'une expérience individuelle est toujours le portrait d'un destin collectif. Sa capacité à cerner une psychologie toute en nuance, à décrire le désir, sa naissance, ses obstacles, sa survivance, est vraiment exceptionnelle.

L'édition parue récemment contient le texte original pour ceux qui sauraient se débrouiller en allemand.

Du même auteur ; Magellan, Le joueur d'échecs, Printemps au Prater.

Par Catherine

Extrait :

Et pourtant: alors qu'il s'imaginait encore n'en jamais pouvoir aimer qu'une, les rets de sa passion se défirent peu à peu en lui. Il n'est pas dans la nature humaine de vivre, solitaires, de souvenirs et, de même que les plantes et tous les produits de la terre, ont besoin de la force nutritive du sol et de la lumière du ciel, qu'ils filtrent sans relâche, afin que leurs couleurs ne pâlissent pas et que leur corolle ne perde pas ses pétales en fanant, ainsi, les rêves eux-mêmes, même ceux qui semblent éthérés, doivent se nourrir un peu de sensualité, être soutenus par de la tendresse et des images, sans quoi leur sang se fige et leur luminosité pâlit. C'est ce qui arriva aussi à cet être passionné, sans qu'il s'en aperçut - quand les semaines, les mois et finalement une année, puis une deuxième, s'écoulèrent sans que lui parvinssent un mot, un signe d'elle; alors son image commença peu à peu à s'estomper.


Éditions Grasset  -  172 pages (90 pages pour le texte français)