Patrick Bauwen, romancier français, a déjà  publié L'œil de Caine, roman vendu à plus de 50 000 exemplaires et traduit dans 5 langues. N'ayant pas lu ce précédent opus, mais aimant le genre du thriller, j'avais très envie de découvrir ce nouveau talent français. C'est donc avec plaisir que j'ai reçu ce roman dans le cadre de l'Opération Masse Critique du site Babelio.

Dès les premières pages, j'ai été assez surprise que l'action se déroule aux États-Unis. Les auteurs français ont-il tant de mal à imaginer qu'un thriller puisse avoir lieu dans notre hexagone ? A-t-on réellement besoin, pour que le scénario soit crédible, de s'exporter au pays du FBI ? Mais admettons. Après tout, peu importe le lieu de l'action tant que l'intrigue est haletante...
Je passerai également très vite sur l'écriture que j'ai trouvée d'une platitude accablante, mais force est de constater qu'aujourd'hui la plupart des auteurs de thrillers nous livrent plus des scénarii efficaces que de réels romans qui allient forme et fond. Tout reposerait donc ici sur l'intrigue.

Et effectivement, le roman démarre sur les chapeaux de roues. En quelques heures seulement Paul Becker comprend que sa vie a basculé : il est traqué, menacé de toute part, soupçonné par les forces de police, et il devra mener l'enquête lui-même - au péril de sa vie - s'il veut prouver son innocence et sauver sa famille. Tout est donc a priori réuni pour que le lecteur soit tenu en haleine de la première à la dernière page. Oui mais voilà, trop c'est trop.

En lisant ce roman, j'ai eu l'impression que l'auteur avait pris soin de réunir dans un même roman tous les clichés qui garantissent le succès d'un thriller. Le résultat est que Monster est effectivement une caricature du genre à tel point que cela en devient risible.

Nous avons donc : le prototype du mec dépassé par les évènements (ça, c'est pour l'identification du lecteur) mais qui a un métier de bon samaritain (un médecin ne peut pas être foncièrement mauvais) ; le copain flic qui se met la hiérarchie à dos pour dédouaner son ami d'enfance (l'amitié, c'est primordial dans ce type de récit) ; la femme et le fils qui disparaissent pour que le héros soit encore un peu plus sous pression (ben oui, faut quand même que le héros ait autre chose à sauver que sa propre vie) ; une collègue à la James-Bond Girl (flirt et double jeu, ça ajoute du piquant....) ; un père qui réapparaît au bout de 40 ans et qui cache des secrets de famille (ne jamais oublier qu'un héros doit avoir une enfance difficile et obscure...) ; une histoire de pédophilie (thème très porteur en ce moment, et puis il faut jouer sur la corde sensible du lecteur) ; des légendes russes et des costumes à la Scream (un peu de folklore ça fait toujours plus singulier, on voit que l'auteur s'est documenté) ; des scènes de tortures et d'hémoglobine (la ménagère doit en avoir pour son argent) ; un peu de nouvelles technologies (parce que quand même c'est avec que sans) etc, etc...

Au bout d'un moment, je me mettais à parier sur les ingrédients jusque-là oubliés et qui ne tarderaient pas à faire leur apparition (et malheureusement, je me suis rarement plantée). Il y a un point encore plus gênant - si cela est possible -, c'est l'incohérence même du point de départ de l'intrigue puisque Paul est censé raconter ces 500 pages en à peine deux minutes.... Quant au dernier chapitre, il est tout droit sorti des mauvaises happy-end américaines, plan séquence "sortez vos mouchoirs" et violons en musique de fond.

Vous l'avez compris, il n'y a pour moi rien à sauver dans ce roman : une écriture maladroite, une intrigue rocambolesque et l'impression désagréable que l'auteur a cédé à la facilité en compilant des scènes déjà vues et revues dans d'autres romans.

Je vous invite à lire le billet de BiblioMan(u) qui est tout aussi atterré que moi. :-)

Laurence

Extrait :

C'est drôle, les gens veulent toujours savoir si je vois des choses horribles. Des morts. Si quelqu'un m'a déjà claqué entre les doigts. Comment je fais pour supporter la violence ou la vue du sang. Est-ce que c'est dur? Est-ce que je fais des cauchemars ? Ou bien des choses plus banales, telles que : si je prends une couche en rentrant, comme font ces héros des séries télé afin de se « laver » des souvenirs pénibles.
Globalement la réponse est oui. Je prends une douche.
Shampoing aux olives vertes ces jours-ci. C'est une sorte de rituel. Mon fils arrose la salle de bains, on fait un max de mousse et on vide le flacon ensemble en rigolant comme des bossus.
Il faut penser à autre chose. Apprendre à distraire son esprit. Compartimenter, maintenir le malheur à distance. Chacun invente ses petits trucs pour affronter les ténèbres, sinon c'est une part de vous-même qui meurt à chaque patient.


Éditions Albin Michel - 576 pages