Plusieurs îlots narratifs dans ce roman: Simone et son accident, le tueur en série qui change d'identité, Laurent un type paumé qui se cache à Trois-Pistoles et, bien entendu, l'équipe du détective Lessard qui se gratte la tête et cherche des pistes.

Il y a les meurtres (deux pour l'instant), il y a le délit de fuite, il y a les vols de voiture et il y a Simone Fortin qui disparaît de l'hôpital. C'est qu'elle est convaincue d'avoir rencontré un homme étrange et touchant, Miles, quand tout le monde lui dit qu'elle n'a pas bougé. Alors Simone s'enfuit de l'hôpital pour retrouver cet homme, coûte que coûte.

Comme tout bon polar, les presque 400 pages de ce roman nous font naviguer dans ces différentes intrigues et tissent des liens. L'intrigue est en effet réussie et l'aspect inexpliqué de la présence de Miles met du piquant dans l'histoire.

Je peux dire que j'ai trouvé que le livre est un succès en ce qu'il remplit sa tâche: divertir. Incapable de fermer le livre le soir, on laisse les heures passées pour en savoir un peu plus. C'est bien écrit (vous ne vous jetterez pas en bas de votre chaise, mais rien à redire). Il est intéressant que les fragments concernant Simone soient les seuls à la première personne. Le pari narratif est bien relevé.

S'il faut reprocher quelque chose au premier roman de Martin Michaud, ce sont les invraisemblances (reproche que l'on pourrait faire à plusieurs polars, après tout). Ainsi, quand le tueur rentre à l'hôpital et demande une blouse à la blanchisserie parce qu'il est un médecin envoyé d'un autre hôpital... difficile d'y croire ! 

J'ajouterais, que par moment, les prises de position des protagonistes m'ont semblé très didactiques, très appuyées. Le tueur, entre autres, a des opinions sur à peu près tous les débats sociaux et les expose sans que ça apporte beaucoup au récit. Chaque sujet abordé dans le roman devient donc une occasion d'exprimer certaines thèses (l'euthanasie, les jeunes dans notre société, l'état des hôpitaux, etc.).

Malgré ces détails j'ai apprécié la lecture et j'ai aimé les personnages. Lessard fera un bon pilier pour une série !

Catherine

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Extrait :

Parce qu'elle s'était mis en tête de me rapporter des glaçons coûte que coûte, même si je lui avais juré sur l'honneur qu'ils ne me serviraient à rien, Ariane rameutait tout l'étage en beuglant comme une névropathe en crise.

Malgré ce tapage, je me sentais mieux.

En fait, si le vert blafard des murs ne m'avait pas rappelé ma présence à l'hôpital, j'aurais presque pu m'enfouir la tête dans le sable comme une autruche et me convaincre que rien n'était arrivé, que j'avais simplement rêvé toute cette histoire.

Mais je savais que ce n'était pas le cas.

Il s'était passé quelque chose, un phénomène que je ne pouvais pas m'expliquer.

Ça peut paraître idiot, mais lorsqu'on fait face à un événement inconcevable, on essaie de se rattacher à des choses concrètes. Je me suis demandé avec angoisse si mes parents m'avaient caché des cas de maladie mentale dans ma famille immédiate. Peut-être en étais-je simplement au premier stade d'une psychose dégénérative.

Cyrano de Bergerac avait dit à Christian: "Tu n'es point sot, puisque tu t'en rends compte." La même logique s'appliquait-elle en l'occurence? Peut-on être atteint de folie si on est en mesure de se poser à soi-même la question?


Il ne faut pas parler dans l'ascenseur de Martin Michaud - Les Éditions Goélette - 393 pages