La couverture m'a d'abord fait penser à un roman jeunesse. S'il est vrai que l'enfance est au cœur de ce recueil de souvenirs, et que la romancière l'a écrite en pensant à ses propres petits-enfants, ce récit s'adresse avant tout à un public adulte. Habituellement peu friande des témoignages autobiographiques, j'ai lu celui-ci avec plaisir, sans doute parce qu'il m'a rappelé des lieux et des épisodes qui m'étaient familiers.

Chaque chapitre réveille l'un ou l'autre des souvenirs encore intacts dans la mémoire de Line Fromental et l'ensemble forme une chronique de la vie languedocienne dans les années 50. Certes, il n'y a rien d'extra-ordinaire (au sens étymologique) et pourtant chaque épisode se transforme sous la plume de la romancière en un mini-événement pour la petite fille qu'elle était à l'époque.

Line Fromental qui n'a voulu ici garder que les bons souvenirs, ne tombe pas pour autant dans l'évocation sirupeuse. Avec une écriture sans fioriture mais agréable, elle égrène ces petits riens qui ont marqué son enfance à la campagne. Et l'on sent qu'au-delà des gestes quotidiens, ces réminiscences sont avant tout intimement liée aux deux habitants du Mas, Mamé et Oncle Pierre, deux êtres que Line Fromental a aimé au-delà de tout et à qui elle rend hommage dans ce texte.

Alors bien sûr, ce n'est pas un récit qui bouleversera le paysage littéraire français, et certains pourront dire que ce n'est qu'un récit autobiographique de plus dans une production qui en compte déjà beaucoup. Oui, évidemment, mais Line Fromental le fait avec élégance et ces brins d'une enfance heureuse m'ont permis de retrouver les paysages de ma région, cette langue d'oc que parlent encore nos vieux et les souvenirs de mes propres parents et grands-parents.

Laurence

Extrait :

Le hibou vient chaque soir se percher sur le plus grand des arbres, face à la maison, pour nous interpréter sa chanson d'été.
Tiout, tiout, tiout…
On l'appelle « Tchot » en patois.
Le tchot n'a pas bonne presse, sans doute parce que, dans des temps anciens, il portait malheur et se faisait clouer, ailes en croix, sur les portes des remises. Et aussi parce qu'il annonce la pluie. La mauvaise pluie.
Si quelqu'un te dit : « Ploura leu, lous tchots se quillou ! » sache que ce n'est pas de bon augure. « Il pleuvra bientôt, les tchots se perchent ! » signifie que tu te mets trop en avant. Que tu risques d'attirer sur toi une méchante pluie, la foudre, du plomb peut-être.
Tiout, tiout, tiout…
Le chant du tchot, exquise mélodie, est le plus beau des souvenirs sonores.

Brins d'enfance
Brins d'enfance de Line Fromental  -  Le papillon rouge éditeur – 224 pages