Pour le coté polar on a un braquage audacieux et un tueur en série qui sèment le trouble dans les quartiers peu recommandables de Libreville. Le glauque est bien servi grâce à une bonne image de la misère et de la prostitution au Gabon et un portrait, qu'on croirait presque sorti d'un film de série Z, de la vie policière Gabonaise.

L'exotisme, lui, est dans l'écriture, avec un jargon local riche et imagé qui parsème avec un naturel confondant les pages du livre. C'est là qu'est la plus belle surprise, la plume de Janis Otsiemi est redoutable d'efficacité. Là où l'emploi d'expression locale aurait pu sonner faux, faire « couleur locale », ça coule tout seul au point que l'on en saisi sans peine la signification dans le contexte.

Le découpage du texte s'est fait à la serpe, chaque chapitre écrit sous la forme d'un crochet du droit de 5 à 6 pages maximum, on y expose de manière très graphique une part de la situation.
C'est habile ! Ce découpage permet de suivre plusieurs actions simultanées sans en perdre vraiment le fil, ce qui arrive parfois quand l’écriture est trop prolixe.
C'est efficace, car cela rythme l'action en lui donnant une vivacité et une force de percussion inestimable.
C'est agréable, car on peut prendre ce livre dans sa poche et le lire par épisode sans se retrouver perdu quand on le rouvre.

Le tout combiné à la plume vive, alerte et précise de l'auteur permet d'avaler les 208 pages de l'ouvrage avec une aisance déconcertante. C'est à la fois frais, glauque, surprenant et amusant. C'est un bon polar quoi !

La cerise sur le gâteau, en tout cas, moi je trouve, ce sont les proverbes africains qui ouvrent chaque chapitre. Tant que vous n'aurez pas médité sur « si une femme court après une poule, c'est qu'il n'y a pas d'homme au village », vous ne pourrez pas comprendre.

Hugues

Extrait :

Koumba lui soumit la photo de la deuxième victime. Martha la lui avait déjà montrée. elle la regarda de biais.
- Martha m'a dit que tu connaissais cette fille.
Elle fit oui de la tête.
- Comment elle s'appelait ?
- Arielle.
- Arielle comment ?
- Arielle Tsanga. Elle se faisait appeler Flore sur le trottoir.
- Comment tu la connaissais ?
- Je l'ai connu il y a quelques mois à Louis parce qu’on se partageait la même rue, avec d’autres filles.
- Elle a été tué dans la nuit de mardi à mercredi. Tu l'as vue cette nuit là ?
- Non, elle ne venait à Louis que les samedi.
- Pourquoi ?
- Elle ne faisait la vie qu'au blanc.
- ...

Le chasseur de lucioles
Le chasseur de lucioles de Janis Otsiemi - Éditions Jigal - 208 pages