À l’origine de tous ces troubles, Miss Sophia Jex Blake, une jeune femme de tempérament entourée de 6 autres femmes, aussi motivées qu’elles. Tous les obstacles surgissent les uns après les autres : d’abord convaincre chaque professeur de les accepter dans son cours, régler les honoraires d’enseignants qui sont alors multipliés par 2,3 ou plus. Puis ce sont les insultes et les injures qui pleuvent, car pour faire cela, ces femmes ne sont, pour les âmes bien pensantes de la ville où règne un protestantisme sévère et strict, que des dépravées, des femmes de mauvaise vie, voir des traînées !

Devant l’opiniâtreté de ces étudiantes, la ville gronde, les clans se forment, pour ou contre, il faut choisir. Bientôt les menaces se font plus pressantes, les courriers anonymes, les morceaux de doigt ou d’oreilles arrivent chez nos étudiantes. L’émeute éclate en faisant des blessés. La police s’en mêle et l’inspecteur McCabe prend les choses en main. Mais il ne pourra pas empêcher deux meurtres, même s'il réussit finalement à résoudre cette enquête, aidé pour cela par quelques médecins…

Allez je ne vous fais pas languir plus longtemps : est-ce que le nom du Pr. Belle vous dit quelque chose ? Cet homme médecin, a codifié une méthode de diagnostic fondée sur l’observation des faits et des symptômes permettant ainsi de remonter à la pathologie concernée. Avec le Pr L.ittlejohn, ils ont vite acquis une grande réputation de médecins légistes.
Devinez maintenant quel étudiant, alors en 3ème année, était l’élève préféré de Bell, doué lui aussi d’une faculté d’observation hors norme ? Allez un petit effort …..Arthur Conan Doyle bien sûr. Et le Pr Bell inspirera Conan Doyle quand il créera Sherlock Holmes….

Ely M.Liebow, auteur du précédent ouvrage L’homme qui était Sherlock Holmes, nous livre ici une étude passionnante sur la vie à Edimbourg en cette fin du XIXe siècle : la classe aisée, sa morale bourgeoise et la classe ouvrière qui vit dans des conditions insalubres. Il met ici en évidence le rôle de plus en plus grand de la presse écrite dans la dénonciation des scandales et leur prise de position sur la société et son évolution.

Ceux qui pensaient lire un roman policier type Holmes y trouveront leur bonheur. J'ai été quant à moi plus intéressée par l’histoire du combat de ces femmes révolutionnaires que par la trame policière. Une lecture plaisante et fort instructive ,une écriture « à la manière de Conan Doyle »

Sylvaine

Extrait :

Ogilvie consulta son petit carnet, remercia l’orateur et commença.
« Oh, quel authentique et vertueux paradis que cette Athènes du nord. Mais la vérité finit par sortir du puits, n’est-ce pas ? Nous y voilà. Apparemment, nombre d’entre vous sont prêts à laisser les femmes étudier la médecine et les sciences à condition que cela se limite à la perception d’honoraires de la part de leurs professeurs. Belle mentalité, comme dirait ma mère »
Il se mit à frapper du dos de la main dans sa paume et d’une voix stridente qui tremblait légèrement ajouta :
« Mais dès qu’il s’agit de les former et de leur octroyer un diplôme afin qu’elles deviennent des praticiennes, dès qu’il y a la moindre chance que ces estimables femmes encaissent elles-mêmes des honoraires qui, comme nous le savons que trop, partent aujourd’hui dans les poches de la fraternité médicale masculine, alors on s’oppose farouchement à ce qu’elles suivent leur cursus jusqu’à la licentiation , si ce mot existe. Nous avons en face de nous un professeur d’université déclarant publiquement – et beaucoup d’autres disent certainement la même chose en privé - qu’en ce qui concerne cette grande question de société - et je vous garantis, messieurs, qu’elle ne s’évanouira pas de sitôt- il s’opposera à ce que les femmes soient autorisées à étudier la médecine et à pratiquer , pour le plus grand bénéfice financier de ses collègues masculins et de lui-même. Votre fameux serment d’Hippocrate a-t-il quelque chose à dire là-dessus ? En vérité, mieux vaudrait dire le serment d’Hippocrite » (Cris, sifflets, parapluies levés).

Sept femmes contre Édimbourg
Sept femmes contre Édimbourg de Ely M. Liebow - Éditions Baker Street - 406 pages
Traduit de l'anglais par Françoise Jaouën