L'auteur y parle de tout, de rien du quotidien mais surtout de l'amour, de la beauté d'un arbre, de sa présence bienfaitrice, de la peinture, de l'importance de rencontres qui marquent comme des rayons de soleil, du temps qui passe avec une justesse et une sensibilité et poésie (toujours) qui ne peut que toucher. On retrouve la plume si légère et douce découverte avec Geai. Tout cela ne veut pour autant pas dire qu'il ne se passe rien, que l'on va s'endormir d'ennui. Que nenni ! C. Bobin aborde à sa façon des sujets tirés divers comme Le mal et l'impact de la télévision ou le besoin de s'évader avec le thé sans thé..

J'ai également relevé quelques propositions lors de ma lecture. J'ai notamment beaucoup aimé ses propos sur la peinture. Jugez-en par vous même : « Parler de peinture ce n'est pas comme parler de littérature. C'est beaucoup plus intéressant. Parler de peinture c'est très vite en finir avec la parole, très vite revenir au silence. Un peintre c'est quelqu'un qui essuie la vitre entre le monde et nous avec la lumière, avec un chiffon de lumière imbibé de silence.... ». Bon sujet de réflexion s'il en est.

Bref, d'une grande simplicité, inracontable car les mots de l'auteur en appellent à nos ressentis. C'est un livre qui fait du bien, comme quand vous dégustez quelques petits chocolats bien choisis.

A savourer.

Du même auteur : Geai, La présence pure, La dame blanche, Isabelle Bruges, Les ruines du ciel, Carnet du soleil, L'homme-joie

Dédale


Je partage entièrement l'enthousiasme de Dédale ! Comme à son habitude, Christian Bobin nous offre ici un petit bijou de poésie. Chaque mot, chaque phrase, est soigneusement pensé(e), réfléchi(e) et assemblé(e). On prend son temps, on fait des pauses pour ne pas en perdre une miette. On se surprend même à interrompre sa lecture pour relire certains passages, les savourer comme un dessert de choix, les garder en bouche un moment pour bien s'en imprégner avant de poursuivre sa découverte. Mais au-delà de la beauté des mots, il y a ce contenu, riche et complexe, qui nourrit tout autant que le style incomparable de l'auteur.
Car L'inespérée est avant tout un recueil de pensées. L'auteur nous livre ses réflexions sur la télévision, l'écriture, le deuil, la maladie... et les femmes. Elles sont au centre de chacun des textes ; belles, généreuses, aimées et admirées. Le dernier texte, qui a donné son nom au recueil, est sans doute l'une des plus belles déclarations qui m'ait été donnée de lire. Décidément, Christian Bobin a l'art de m'émouvoir. Quand lassée de ne lire que des scénarios de romans, je veux pour un temps me plonger en terre de Littérature, je sais qu'il me suffit d'ouvrir un livre de cet auteur pour me rappeler combien les mots peuvent être puissants.

Laurence
le 24 décembre 2008

Extrait :

J'espère que mon cœur tiendra, sans craquelures

L'arbre est devant la maison, un géant dans le lumière d'automne. Vous êtes dans la maison, près de la fenêtre, vous lui tournez le dos. Vous ne vous retournez pas pour vérifier s'il est bien toujours là – on ne sait jamais avec ceux qu'on aime : vous négligez de les regarder un instant, et l'instant suivant ils ont disparu ou se sont assombris. Même les arbres ont leurs fugues, leurs humeurs infidèles. Mais celui-là, vous êtes sûr de lui, sûr de sa présence éclairante. Cet arbre est depuis peu de vos amis. Vous reconnaissez vos amis à ce qu'ils ne vous empêchent pas d'être seul, à ce qu'ils éclairent votre solitude sans l'interrompre.Oui, c'est à ça que vous reconnaissez l'amitié d'un homme, d'une femme ou d'un arbre comme celui-ci, gigantesque et discret. Aussi discret que gigantesque. Cet arbre est un des habitants du village où parfois vous passez quelques jours à ne rien faire,pas même écrire, surtout pas écrire, le village de Saint-Ondras, en Isère.

La traversée des images

Ce n'est pas l'encre qui fait l'écriture, c'est la voix, la vérité solitaire de la voix, l'hémorragie de vérité au ventre de la voix. Est écrivain toute personne qui ne suit que la vérité de ce qu'elle est, sans jamais s'appuyer sur autre chose que la misère et la solitude de la vérité. Dans ce sens, les enfants et les amoureuses sont des écrivains-nés.

L'inespérée
Folio - 116 pages