Colombano a donc réellement existé. Ce modeste tailleur voulait creuser la montagne pour que l’eau puisse irriguer les terres arides de la plaine. Mais, un matin, on retrouve les cadavres de toute une famille non loin du chantier de Colombano. La population a trouvé son coupable idéal.
Le procès aurait pu être court et expéditif, mais Ippolito Berthe, jeune ecclésiastique ayant la fonction de juge dans la ville de Chiomonte, décide de mener sa propre enquête.

La structure du roman est une belle trouvaille : chaque chapitre est précédé d’une strophe de « la Chanson de Colombano », puis la narration détaille ou invente ce que la chanson omet. Ces références directes à la mélopée traditionnelle nous ancre dans la réalité historique. Oui, cette histoire a bien eu lieu il y a 5 siècles. L’écriture est tout à fait en adéquation avec l’époque de l’histoire : les mots et les tournures sont choisis avec soin pour éviter toute sensation d’anachronisme. Quant à l’histoire, elle est à la fois passionnante et instructive. Une jolie découverte.

Extrait :

Non moins faméliques et féroces que ces chiens, cette fois les assaillants étaient des hommes et des femmes de Chiomonte et des villages voisins et, à la place du chat, acculé contre le mur de l'église, Colombano.
— Assassin ! Brigand ! À mort ! À la potence !
La foule débitait son répertoire habituel.
Colombano avait réussi à agripper l'anneau de salut scellé entre les pierres de l'église, et le serrait des deux mains, regardant autour de lui sans comprendre. La masse hurlante s'était arrêtée à quelques pas de lui, les plus excités au premier rang avec fourches et bâtons : lequel parmi eux aurait le courage de violer le droit d'asile sacré que conférait l'anneau à celui qui l'avait entre les doigts ? Personne, probablement, bien que l'espace vide devant Romean se réduisît peu à peu, la foule devenant toujours plus compacte. Ippolito commença à la fendre en traversant la place. Au début, il lui suffit d'avancer avec décision, mais à mesure qu'il progressait, l'entrelacs de corps devenait de plus en plus difficile à déchirer ; il devait se plier, jouer des coudes, se mettre de biais, subir des bourrades dans le dos et se protéger estomac et bas-ventre de coups plus ou moins involontaires. À la fin, à peu de pas maintenant de l'objet de la fureur collective, il fut obligé de déplacer de tout leur poids les personnes qui lui faisaient obstacle.


Éditions Folio Policier – 244 pages.