Claude,
je n'étais qu'une enfant quand pour la première fois j'ai entendu ta voix. Jacques Brel et toi étiez les poètes qui unissaient mes deux foyers, le cordon parental qui faisait fi des séparations. J'ai appris tes chansons en apprenant à parler. Tu te qualifiais de "motsicien" et je trouve que cela te va à merveille. Tu jonglais avec les mots et les émotions comme personne. Tu m'as accompagnée dans les tourments et les joies. Quand tu nous as quitté, il y a preque deux ans maintenant, je me souviens que j'étais devant mon petit écran. Pour la première fois, j'ai pleuré en apprenant la disparition d'un artiste. Car tu n'étais pas qu'un artiste, tu étais tellement plus que ça. Tu étais la voix qui réconforte, qui fait vibrer chaque partie infime de nos êtres.
Quand je t'écoute chanter, ce sont toujours mes tripes qui réagissent.
"Cécile"; "Le cinéma"; "A bout de souffle"; "Ma belle au bois dormant"; "La chanson"; "Maîtresse"; "Je crois en l'homme"; "Paris Mai"; "Mon assassin"; "Il y avait une ville"; "Armé d'amour"; "Je lance une bouteille à la mer"... Pas une de ces chansons où le verbe ne soit pas chirugicalement juste, le son percutant, l'émotion éclatante. Tu étais un grand magicien, un amoureux de la vie et de l'humanité, même si l'Homme te faisait douter.
Combien de fois ai-je écouté "La petite fille en pleurs" avant de comprendre que le prince charmant et le vilain mari ne faisait qu'un? Je n'étais pas prête à l'attendre. Et puis un jour, j'ai compris : que le prince charmant n'existait pas, mais aussi que les maris n'étaient pas forcément vilains.
"Le jazz et la Java" est la première chanson que j'ai apprise à mon fils. Nous la chantons très souvent ensemble aujourd'hui, et à chaque fois je me dis qu'à travers nos modestes voix tu continues d'exister.
Et puis, il y a LE texte, celui dont je suis tombée éperduement amoureuse, ce texte que tu ne chantais pas mais que tu avais mis en musique. "La plume d'ange", cet hymne à l'amour incomparable et inégalé. J'en connais chaque mots, chaque souffle, chaque respiration. Ce texte, né un an après moi, est, le plus beau poème écrit ces trente dernières années.
Bientôt deux ans que tu es parti, mais le manque est toujours là. Alors, régulièrement, je te fais revivre. Je t'écoute, je m'ennivre jusqu'à plus soif.
Cette année, mon père m'a offert tes manuscrits. J'étais comme un enfant devant un jouet. Mes yeux brillaient, mes mains tremblaient. Mais il y avait du monde, alors j'ai sagement reposé les livres et attendu d'être seule pour l'effeuiller. Les retrouvailles ont besoin d'intimité.
En tournant les pages, j'ai découvert tes carnets. Je ne savais pas que tu écrivais sur des "Moleskines" mais je suis heureuse de savoir que je partage au moins cela avec toi. Ton écriture est précise, peu de ratures. On découvre des versions inédites de certaines chansons; inédites car tu n'en étais pas satisfait. Alors, tout à coup, on a l'impression d'être un peu voyeur, de lire des choses qui ne nous appartiennent pas. Mais la puissance des mots nous emporte, et l'on oublie que ce ne sont que des brouillons. Comme j'aimerais un jour que mes petits scribouillages ressemblent à tes rebuts.
Tes dessins, disséminés tout au long de ces manuscrits, m'étaient familiers. Un jour, tu étais de passage à Nîmes. Mon père est venu te voir et t'a demandé pour moi un autographe. J'ai toujours ce menu d'un grand hôtel sur lequel tu as dessiné un profil et écrit mon prénom. Je l'ai sorti du tiroir où il était rangé depuis des années, et l'ai glissé dans les pages de tes manuscrits, à l'abri.
Tu trouvais que le verbre "transmettre" était un beau verbe. Sache que tu m'as transmis ta passion des mots et que je t'en serai éternellement reconnaissante.
Claude, on t'aime et tu nous manques.
Laurence
Éditions Textuel - 350 pages
Commentaires
vendredi 20 janvier 2006 à 20h48
C'est vendu ! Bel article Miss Laurence.
Nous avons un nouveau point commun : aimer Nougaro pour sa voix, les textes, ses musiques..
Tu devines aisément quelle ritournelle me trottait dans la tête lors de mon dernier passage à Toulouse.
Je viens juste de mettre un de ses disques sur la chaine et forcément je me trémousse sur "Le jazz et la java".
"Sur mes écrans noirs de mes nuits blanches.....": Souvenirs, souvenirs.
Quel sculpteur de mots !
dimanche 22 janvier 2006 à 10h39
"Dès la fin de ce que tu narres j'ai senti le choc..."
(Emprunté à Nougayork, modestement)
Me vient cette réflexion, que les mille-pattes de C.Nougaro font des claquettes, sur le coeur des livres bibliothèque sur la ryth-mique des discothèques...
Ton émotion est très inspirante... Merci Laurence.
Je comprends à présent ton commentaire adressé au Prince charmant sur le commentaire de Coïtus...
(Vi celui laissé sur la copie de Peintre...)
Bise rose citadine et nougagnante... not to loose
mardi 31 janvier 2006 à 21h25
Claude me manque lui aussi. J'adore ses chansons, toujours présentes, et sa voix si puissante.
vendredi 3 février 2006 à 17h33
Merci Laurence, de ce très bel hommage à ce magnifique poète qu'était Claude Nougaro. Je l'écoute avec la même passion et la même émotion depuis plus de 30 ans. J'ai souvent un texte de lui dans la tête. Quel souffle, quel modernité, quelle densité de sens ! Vraiment, il ne peut se comparter à personne. Il a laissé derrière lui des textes sublimes et étonnants. Il a, comme il le disait des musiciens de jazz, à chaque fois mis "toute la vie dans une phrase", lui qui disait "sucer le supplice d'une langue qui se dessèche", mais qui savait pourtant si bien dire les choses comme personne ne l'a jamais fait.
Philippe
vendredi 3 février 2006 à 18h47
Dda > "Sculpteur de mots", oui c'est bien trouvé.


Serge > La belle au bois dormant, n'a pas dormi longtemps, avant qu'il ne vienne...
Olivier > Contente de te lire chez moi.
Philippe > Bienvenu Philippe. Merci pour tes mots. Quand on laisse parler son coeur, on est souvent juste, c'est que j'ai essayé de faire modestement ici. "La langue qui se dessèche", comme il avait raison, notre richesse lexicale est en train de disparaître pour mon (notre) plus grand malheur.
mardi 7 février 2006 à 16h03
Bonjour Laurence,
Je ne pense tout de même pas que notre richesse lexicale soit en train de disparaître. Beaucoup de gens écrivent très bien encore aujourd'hui, même si une certaine forme d'appauvrissement de la langue dans une partie de la jeunesse peut laisser perplexe. Claude Nougaro a en tout cas introduit la modernité poétique dans la chanson et a atteint souvent une hauteur d'écriture assez rare dans ce domaine. C'est le plus littéraire de nos chanteurs (Odette, Paris mai... et bien d'autres textes). Il est un fantastique précurseur dans la forme et un remarquable producteur de sens. Je travaille depuis pas mal de temps à un long texte sur lui, une sorte d'hommage que j'estime lui devoir après tous les grands moments qu'il m'a donnés.
Amicalement
Philippe
dimanche 26 mars 2006 à 11h58
Bonjour Laurence,
Pour une Toulousaine transplantée dans le nord de la France (Compiègne)merci de m'indiquer où puis-je trouver ce magnifique livre.
C'est vrai qu'il nous manque cet architecte du verbe.
Amicalement. Martine
dimanche 26 mars 2006 à 12h36
Bonjour Martine et bienvenue ici !

tu devrais pouvoir commander ce livre dans n'importe quelle librairie si il n'est pas en stock. En effet, cette édition est largement distribuée en France, donc pas de soucis.
Et oui, tu as raison, il nous manque énormément. ;(
mercredi 1 novembre 2006 à 08h57
A Hélène Nougaro
Partie le vendredi 08 septembre vers 22 heures de la fin des terres ou la mer de phares, avec mon automobile et accompagner de Françoise (mon ile) en navigant sur le serpent noir zébrer, pour arriver au petit matin dans la ville flambant rose.
Oui ! enfin nous allions à Toulouse voir le concert hommage de Claude Nougaro dans sa ville natale, et essayer de mieux comprendre ou il coulait des jours heureux.
Notre arriver fut plus rapide que prévu, car nous marchions sur le très beau pont saint Pierre illuminer de couleurs violette vers 6 heures 30, déjà un sentiment de joie et une envie de découverte nous envasaient et de ce pas nous visitons les dessous et jardin du pont ou nous voyons la Garonne qui sans dormir et inexorablement coule dans le lit de Claude, mon visage s’assombrit, mes yeux larmoyant ce dérobe du regard d’autrui, car je sais qu’il est la !
Mon ile me regarde, me comprend, me rassure et m’embrasse pour effacer la rosée qui perle de mes joues.
Puis nous naviguons vers l’association pour une adhésion faite déjà depuis si longtemps dans notre cœur, ou surprise nous serons amenés à discuter autour d’un café avec les très charmants parents d’Hélène qui nous rejoindras quelques temps plus tard.
Mon cœur saute dans sa cage ! Une joie tétanique m’envahie et je suis comme un con !
J’arriverais à dire quelques mots de remercîment à cette immense dame de ma folle passion mais si maladroitement.
Une fois rentré en Finistère après notre Nouga-pèlerinage de Toulouse a l’ile de Ré je prendrais ma plume binaire pour écrire, pour remercier, pour avouer combien je remercie et respecte cette illustre famille si simple et sincère animées d’une telle fougue.
Voilà Mme ce que j’aurais du vous dire le 09 septembre 2006 vers les 9 heures du matin quand j’ai eu la chance de vous embraser en vous disant simplement merci.
A Hélène qui est la gardienne des mots
A Hélène qui est la sagesse de nos maux..
Au delà de cette dure tache elle est aussi le moteur à inculquer, annoncer, donner, et bien sur réaliser.
Car tel la statue de la liberté elle brandit fièrement la torche érectile du patrimoine motsical nougaresque, clamant et appuyer par son association qui rassemble avec force, puissance et conviction, si fougueuse et comme des olympiens nous : les anonymes amoureux attisons la flamme par notre passion partagées afin que celle-ci brule a jamais.
Bravo ! Et merci encore Mme Hélène Nougaro de cet amour qui ne peut être que communicatif et référen-cieux qui au delà de la vie plonge dans les grands fonds de la mer de la tranquillité. Preuve que l’ici bas a rejoint l’ultime.
Claude à jeter son encre sur une ile Hélène et tous deux ont encré le papier a musique qui peut a peut c’est transformer en encyclopédie de la langue, la sienne, la tienne, la mienne, la notre, la seule !
Il n’y a pas assez de mots pour dire Ö combien j’apprécie l’homme et son œuvre, pas moins d’ailleurs que pour remercier cette ile de Nougamour si paisible et sincère qui aime ses rivages enneiger a la lumière glacer et ou coule céleste ment une Garonne crépu, c’est ici que Claude a eu la sagesse de s ‘amarrer amoureusement pour son éternité.
Comme toujours il ne pouvait trouver meilleur allier
Comme toujours il ne c’est point tromper.
Merci ! Merci infiniment pour tout et de nous tous.
Paulolabrique famille Sainte-Croix.
vendredi 3 novembre 2006 à 12h43
Merci à vous de nous faire partager cet hommage.
mardi 13 novembre 2007 à 14h57
Tout d abord ,bonsoir a tous et a toutes.
j ai decouvert claude nougaro tardivement et je n aurais jamais soupconne le talent de cet artiste. un jour gratouillant sur ma guitare je m attaque a une de ses chansons mythiques "ah tu verras" . je decouvre un texte qui m envahit d emotions et m expedit direct dans le jardins des pleurs .
je decouvre alors la puissance des mots ,pouvant ainsi etre aussi douloureux qu une balle en plein coeur,ou dans le cas contraire aussi reconfortant que la main d un ami posé sur son epaule.
il semble que ton travail d une vie entiere continue a porter ses fruits ,aidant des individus tel que moi a comprendre l essentiel de l echange des verbes et des mots. je voulais t exprimer ma gratitude encore une fois et merci pour ce patrimoine spirituel que tu as laissé a notre disposition .
merci a toi , claude.
olivier 34ans
samedi 7 janvier 2012 à 12h46
'Si quelqu'un pouvait m'aider ? je recherche un texte de Claude Nougaro que je ne trouve nulle part et entendu à la radio il y a quelques années. Il était question de sang du désert. Merci d'avance''
dimanche 12 janvier 2014 à 19h50
peut etre sa chanson l"hymne bonne chance