Et puis, je me suis souvenue que les textes de Dionysos, absurdes, tendres et violents, c’était lui.
Et puis, j’ai lu le titre, Maintenant qu’il fait tout le temps Nuit sur toi … Un beau titre, non ? Evocateur, et sonnant.
C’est néanmoins plus par curiosité qu’autre chose que j’ai acheté ce roman. Et j’ai été happée par cet univers, conquise.

Mathias est un trentenaire qui vient de perdre sa mère. Il attend le retour de son père et de sa sœur, sur le parking de l’hôpital. Son chagrin lui tient compagnie. Mais soudain … Giant Jack, géant docteur en ombrologie, apparaît pour l’aider à vivre la vie malgré la mort, avec son ombre qu’il prête à Mathias, des livres, des histoires de femme-acacia et de sanglophones, de la musique, des souvenirs.

C’est un livre difficile à résumer … mais que j’aime réellement, et que j’ai déjà racheté deux fois pour le plaisir de l’offrir après relecture.

Il est à noter que de ce roman autobiographique est né un album du groupe, nommé Monsters in Love, où l’on retrouve certains personnages … dont la mère de Mathias, devenue « Little Bird ».

Par Zelda


Quel talent il faut pour parler de la souffrance et du deuil comme le fait Mathieu Malzieu dans ce récit. Il sait trouver les tournures et les mots pour dire le vide, la peur, la colère, le coeur qui s'effrite, l'enveloppe corporelle devenue trop étroite...
Mathias n'arrive pas à accepter la mort de sa mère, il veut la ressusciter par tous les moyens : remonter les horloges, la sortir du cercueil, lui décrocher la lune etc... Mais les ombres envahissent son quotidien. Alors, Jack, du haut de ses 4m50, véritable géant de nos histoires d'enfants, lui offre un bout de son ombre pour envelopper sa douleur.

Mathias Malzieu retrace toutes les étapes du deuil, jusqu'à la fascination de l'au-delà, quand le chant des proches devenus fantômes est plus attirant que la cruelle réalité.
Un récit à la fois dur et doux, comme un câlin de colosse.

Par Laurence
le 31 août 2006


Extrait :

Est-ce que le géant nous a suivis ? Vu la taille de ses jambes, en courant il doit pouvoir atteindre la vitesse d’une voiture. La voiture ralentit et remonte le lotissement, qu’elle connaît par cœur. Chaque maison est exactement comme d’habitude, et c’est absolument terrifiant cette normalité. Les lampadaires nous regardent avec un air genre « Contrôle d’identité, s’il vous plaît. Veuillez sortit les étoiles de vos poches, de vos cheveux, de vos yeux. Tout ce qui brille, vous le déposez dans le sac en plastique : vos sourires, vos souvenirs, vous n’en aurez plus besoin là où vous allez maintenant. »
J’ai rangé mes souvenirs et mes histoires de géant. C’est pas le moment d’en parler à Lisa et papa ; pas encore. Je sens mes os, agrandi dans les épaules, mais pas ma peau. Je suis suspendu à mon squelette.
[…]
Pour la première fois, je m’emmitoufle dans ma nouvelle ombre. Je sais qu’elle est censée m’aider, mais je ne sais pas comment l’utiliser. Enfin, c’est la mienne, le géant me l’a donnée, elle me fait un peu moins peur que toutes celles qui sillonnent la maison, qui comme des lames se plantent dans les portes. Et dans le lavabo de la salle de bain, et dans le crâne de toute la famille qui s’y lave les dents. Elles font mal comme des coups de soleil sur les yeux. Elles diffusent deux produits très toxiques pour la bande de cœurs troués qui se baladent dans cette maison : d’abord du vide visible et ensuite des souvenirs de vie de toi ici. Les deux cumulés, ça arrache la gueule.

maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi
Éditions Flammarion - 169 pages