R.V. était un inspecteur de police sans histoire. Accaparé par son travail, il tentait de résoudre le mystère des "disparus" : ces gens qui, un jour s'évanouissent de la circulation sans raison, pour ne plus jamais reparaître. Tous ces collègues étaient d'accord pour reconnaître en lui un homme droit et équilibré.
Alors pourquoi a-t-il été reconnu coupable d'une tentative de meurtre sur sa femme et son fils?
Les journalistes, dépêchés sur place un décennie après les faits, découvrent un homme métamorphosé : seul son corps continue de vivre. Le regard semble définitivement perdu dans le vide et aucun son ne sort de sa bouche baveuse et entrouverte.

Un roman angoissant et terrifiant. Javier Garcia Sanchez réussit dès les premières lignes à nous prendre dans ses filets. À travers une écriture très poétique, mais jamais trop bavarde, il distille la peur comme un grand alchimiste.
Quelle est cette clinique isolée du monde? Quels secrets innommables sont enfermés dans ce corps privé de parole? C'est alors que le récit plonge dans la tête de l'homme. Et si tout cela n'était pas que simple folie? ....

Extrait :

"[...] cette agitation toute proche ne les intéresse pas, seul les préoccupe l'homme qui est en face d'eux. Ils le voient de profil, le visage partiellement éclairé par l'épée de lumière que forme le soleil de midi. Il est très émacié, et on voit qu'il a dû être corpulent, et d'une complexion visiblement athlétique. Vu comme ça, complètement inutile, il confirme ce qu'ils savaient déjà. C'est une espèce de légume qui respire et semble méditer. Même si personne ne peut imaginer sur quoi il médite.
Ils se sont installés devant lui sur deux chaises bien alignées. Il est à un mètre d'eux, approximativement. Durant une fraction de seconde, ils sentent un léger tremblement dans les genoux. La chaleur est de plus en plus étouffante. L'air conditionné ne doit pas fonctionner. Ils regardent l'homme. On dirait un buste de plâtre polychrome, et il impose d'avantage par son attitude statique que par la couleur maladive de sa peau. Ce visage est un suaire. Mais ses paupières battent.
Avant de quitter la salle l'infirmier leur rappelle que, s'ils sont besoin de quoi que ce coit, ils n'ont qu'à appuyer sur le bouton de la sonnette situé près de la porte. Ils le regardent, étonnés, en essayant de dissimuler un malaise qui les a envahis peu à peu. Puis l'infirmier ajoute quelque chose qui les déconcerte. Pas un instant ils n'avaient pensé à cette éventualité :
- Mais ne vous en faites pas. Il n'est absolument pas dangereux.
Et, voyant qu'ils gardent le silence, il continue : "c'est une agneau. Un de ceux qui causent le moins de problème au Centre. Un type tranquille, docile."

les disparus
Éditions Joelle Losfeld - 151 pages