Je suis tombée en amour de cette écriture sobre, précise, élégante, crue parfois mais jamais vulgaire, de ces portraits si poignants. Billy, marin pas comme les autres et qui rencontre une mystérieuse dame de L'Iguaçu, à ses risques et périls. Diego, l'Angolais, en attente d'un départ, aux histoires fabuleuses. Et ces femmes, sublimes, avec une préférence pour Jeanne, dans la dernière nouvelle.
On embarque avec l'auteur, qui a laissé l'acteur à quai, mais emporté avec lui le cinéaste et le marin qu'il a été dans sa jeunesse. J'ai aimé, adoré ce style si imagé. Comme si on découvrait les ports visités à travers l'oeil d'une caméra, d'un appareil photo. Rien ne nous échappe, ni les clairs-obscurs de la vie, ni le malstrom des émotions.
Et si comme moi vous lisez ces nouvelles avec à l'oreille la mélodieuse voix de B. Giraudeau, l'embarquement est immédiat.
Comme il est si bien écrit sur la quatrième de couverture : c'est beau à pleurer.
Dédale
Du même auteur : Les dames de nage
Extrait :
Il faudrait s'arrêter pour lire toutes ces vies qui s'écrivent dans les ruelles sombres d'Alfama. Il faudrait des vies pour connaître celles des autres. C'est vivant, un quartier populaire, c'est sale, bruyant, ça baigne dans les odeurs de cuisine, ça ruisselle d'eau trouble, ça pisse au coin des murs, mais c'est vivant. Le touriste devant moi se régale d'une photo de vieille épuisée. Il se délecter de cette façade rouge piquée d'herbe avec ses rides autour des fenêtres. Il y a un pot de fleurs et une misérable lessive accrochés au grillage. Deux rideaux pathétiques camouflent le secret d'une alcôve. Il y meurt des vies que le photographe ne voit pas, il y a des rires qui rebondissent dans les cours, sur les marches de pierre, jusqu'aux chambres aveugles. Une paume repousse les miettes jusqu'au bord de la table. Une cigarette fume entre des doigts jaunis. Des lunettes s'embuent. Celui-là ferme les yeux en levant le coude. A quoi pense-t-il avec ce soupir satisfait ? Le soleil n'est jamais venu jusque-là et pourtant c'est joyeux, même si elle s'assied, lasse, son torchon sur les genoux. Des amoureux s'embrassent. Quelqu'un a oublié une paire de chaussures devant une porte, un distrait ou un discret. ...
Éditions le Métaillié - 178 pages
Commentaires
lundi 11 septembre 2006 à 13h13
Bon alors, autant le dire, je suis super déçue d'avoir raté (pour des causes d'intendances: connexion impossible au net grrr!) cette palpitante énigme. Ce n'est, bien sûr, que partie remise! En tout cas, je n'ai pas manqué de noter ce livre... que j'ai réservé à la bilio! Merci Dédale !
samedi 22 novembre 2008 à 21h43
Il est sorti cette année une BD sous le titre R97 qui reprend magnifiquement ces atmosphères.Les textes de Giraudeau sont mis dans une lumière magnifique.Une BD à lire et relire et relire....
mardi 25 novembre 2008 à 07h52
Cet ouvrage en BD ? Oh mais il me faut y aller voir de plus près.
Merci pour l'information, Le Mérydien.
mercredi 26 novembre 2008 à 20h56
Les références completes sont "R97 les hommes à terre" de Christian Cailleaux et Bernard Giraudeau paru en avril 2008 chez Casterman Album cartonné 18 €. Je me doute que Dédale avait su retrouver ces références mais si cela peut éviter de les rechercher, je vous les transmet bien volontiers.
vendredi 28 novembre 2008 à 08h06
J'avais effectivement trouvé les références, Le Mérydien.
Mais merci pour cette petite attention. C'est très sympa. Et puis maintenant, elles sont à disposition de tous et toutes