Mais les objets ne se laissent pas abandonner si facilement. C'est au moment où ils passent aux mains d'un nouveau propriétaire qu'ils se mettent à parler à Antoine. Celui-ci replonge alors dans ses souvenirs.

L'inventaire est effectivement minuscule en quantité d'objets : 8 pas un de plus. Mais il est majuscule puisqu'à eux seuls, ces 8 objets contiennent toute une existence.
Avec beaucoup d'auto-dérision, Jean-Philippe Blondel réinvente la crise de la quarantaine. Son narrateur est à l'heure des bilans : dans la balance, ce qui a déjà été et ce qui pourrait être.
À travers 8 chapitres, 8 destins d'objets, il nous raconte la vie d'un homme qui doute, aime et redoute. Puis le livre se dédouble, et les objets que l'on croyait disparus, renaissent entre les mains de leurs nouveaux acquéreurs. Une seconde vie pas si éloignée de la première, et un pied de nez aux chemins qui se croisent et se décroisent. Chaque paragraphe est un petit trésors d'émotion et de poésie. L'écriture de Jean-Philippe Blondel est non seulement très fluide mais absolument attachante.

Ne ratez pas l'interview exclusive de Jean-Philippe Blondel.

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Extrait :

Mes parents ont plus d'un tour dans leur sac.
Je ne savais pas qu'ils connaissaient des expressions comme "garde alternée". C'est ce jour-là aussi que j'ai appris que non seulement ils avaient un ordinateur portable - le premier prix - mais également une liaison internet et l'ADSL. Et évidemment une adresse mail. J'ai bredouillé qu'ils auraient au moins pu me la donner mais mon père m'a fait remarquer que je n'en aurais eu aucune utilité puisque j'habitais à moins de deux kilomètres. J'ai voulu savoir avec qui ils pouvaient bien échanger des courriers électroniques, mon père a haussé les épaules sans répondre.
À bien y réfléchir, c'est une réaction que j'ai régulièrement déclenchée chez les autres ces derniers temps, le haussement d'épaules. Ma femme terminait souvent nos conversation de cette manière et les enfants lui emboîtaient facilement l'omoplate, comme si, avec moi, ce n'était pas la peine de rentrer dans les détails, tu prends ce que je te dis et tu te mets un mouchoir dessus.
Le pire, c'est que je le faisais.
En allant vendre les affaires de ma vie en pleine rue dimanche, je fais table rase des épaules qui se haussent et de la moue qui les accompagne. À partir de lundi, je veux bien provoquer de la surprise, de la colère, des sourcils qui s'offusquent en accent circonflexe, mais je refuse cette légère indifférence teintée de lassitude. Je suis un menhir, soit, mais je serai digne. Graffité, j'exposerai mes entrailles. Un morceau de préhistoire qui s'exhibe sur une table à tréteaux et se donne au plus offrant.

couverture
Éditions Robert Laffont - 295 pages