Mais les objets ne se laissent pas abandonner si facilement. C'est au moment où ils passent aux mains d'un nouveau propriétaire qu'ils se mettent à parler à Antoine. Celui-ci replonge alors dans ses souvenirs.
L'inventaire est effectivement minuscule en quantité d'objets : 8 pas un de plus. Mais il est majuscule puisqu'à eux seuls, ces 8 objets contiennent toute une existence.
Avec beaucoup d'auto-dérision, Jean-Philippe Blondel réinvente la crise de la quarantaine. Son narrateur est à l'heure des bilans : dans la balance, ce qui a déjà été et ce qui pourrait être.
À travers 8 chapitres, 8 destins d'objets, il nous raconte la vie d'un homme qui doute, aime et redoute. Puis le livre se dédouble, et les objets que l'on croyait disparus, renaissent entre les mains de leurs nouveaux acquéreurs. Une seconde vie pas si éloignée de la première, et un pied de nez aux chemins qui se croisent et se décroisent. Chaque paragraphe est un petit trésors d'émotion et de poésie. L'écriture de Jean-Philippe Blondel est non seulement très fluide mais absolument attachante.
Ne ratez pas l'interview exclusive de Jean-Philippe Blondel.
Du même auteur :
6h41
Et rester vivant
G229
Le Baby-Sitter
This is not a love song
Accès direct à la plage
1979
Juke Boxe
Passage du gué (Prix Biblioblog 2007)
Un endroit pour vivre
À contretemps
Au rebond
Laurence
Extrait :
Mes parents ont plus d'un tour dans leur sac.
Je ne savais pas qu'ils connaissaient des expressions comme "garde alternée". C'est ce jour-là aussi que j'ai appris que non seulement ils avaient un ordinateur portable - le premier prix - mais également une liaison internet et l'ADSL. Et évidemment une adresse mail. J'ai bredouillé qu'ils auraient au moins pu me la donner mais mon père m'a fait remarquer que je n'en aurais eu aucune utilité puisque j'habitais à moins de deux kilomètres. J'ai voulu savoir avec qui ils pouvaient bien échanger des courriers électroniques, mon père a haussé les épaules sans répondre.
À bien y réfléchir, c'est une réaction que j'ai régulièrement déclenchée chez les autres ces derniers temps, le haussement d'épaules. Ma femme terminait souvent nos conversation de cette manière et les enfants lui emboîtaient facilement l'omoplate, comme si, avec moi, ce n'était pas la peine de rentrer dans les détails, tu prends ce que je te dis et tu te mets un mouchoir dessus.
Le pire, c'est que je le faisais.
En allant vendre les affaires de ma vie en pleine rue dimanche, je fais table rase des épaules qui se haussent et de la moue qui les accompagne. À partir de lundi, je veux bien provoquer de la surprise, de la colère, des sourcils qui s'offusquent en accent circonflexe, mais je refuse cette légère indifférence teintée de lassitude. Je suis un menhir, soit, mais je serai digne. Graffité, j'exposerai mes entrailles. Un morceau de préhistoire qui s'exhibe sur une table à tréteaux et se donne au plus offrant.
Éditions Robert Laffont - 295 pages
Commentaires
mercredi 13 septembre 2006 à 07h52
Une idée originale de se détacher de ces choses inanimées et qui nous "parlent" à leur manière...
mercredi 13 septembre 2006 à 18h08
Je ne sais pas si tu as particulièrement bien choisi l'extrait ou pas, mais en tout cas, il est alléchant, ce billet! Je note ça dans mon petit carnet! Il faut que je trouve un bouquin pour changer les idées...Je viens de lire Les Heures de Cunningham...dépressifs s'abstenir!
mercredi 13 septembre 2006 à 19h38
Ah, oui, un excellent roman qui se lit très bien. J'aime bien aimé le travail de transition entre chaque chapitre/objet. Une petite musique mélodieuse qui roule toute seule. Bref, je suis fan. J.Ph. Blondel fait partie depuis un bon moment de mon Club des Chouchous. Et il le sait
Je ne saurai trop vous conseiller la lecture de son tout dernier roman : Le passage du gué. On pleure, mais qu'est-ce que c'est beau !!
vendredi 15 septembre 2006 à 08h36
Wictoria > Un idée originale et bien menée

Choupynette > L'extrait est à l'image du reste de l'oeuvre. Et encore, il y a tant de petits passages encore plus savoureux... mais je ne voulais pas dévoiler l'histoire de ces objets, j'ai donc mis en extrait "l'avant vide-grenier".
Dda > D'ailleurs tu sais que je compte sur toi...
samedi 27 décembre 2008 à 18h11
Bonjour,
Je viens de finir ce roman que j'ai cherché (et miraculeusement trouvé a la bibliotheque francaise ici en Hongrie) et lu apres avoir vu vos recommandations sur ce site.
Au début cet air de crise de quarantaine m'a un peu énervée, mais j'ai poursuivi tout en sachant que c'est pas que ca. Et vous aviez raison: finalement j'étais ravie du style de l'auteur + de l'idée bien réussi: des objets qui incitent le protagoniste a parler et a plonger dans ses souvenirs + tant de fils différents qui s'entrelacent tout au long du roman.
Merci de m'avoir fait découvrir Jean-Philippe Blondel, j'espere bien que j'aurai l'occasion de lire d'autres romans de lui.
samedi 27 décembre 2008 à 19h31
Bonsoir Tournesol,
c'est toujours un plaisir de découvrir vos commentaires, et je suis très heureuse de savoir que vous n'avez pas été déçu par nos conseils. Si vous avez l'occasion de le trouver, je vous conseille vraiment "Passage du gué" du même auteur.
dimanche 28 décembre 2008 à 13h55
C'est exactement celui que possede encore la bibliotheque parmi les oeuvres de Blondel, donc la prochaine fois pas question de le prendre:) Heureusement pour moi il n'est pas encore tres-tres connu ici, donc il es presque certain qu'il sera dispo quand j'y irai.
D'ailleurs on peut se tutoyer, si ca vous dérange pas, les "vos", je les ai écrit en pensant a l'équipe entiere qui édite ce site:)
dimanche 28 décembre 2008 à 14h16
Message bien reçu Tournesol, au plaisir donc de te relire
dimanche 28 décembre 2008 à 16h14
Merci, pour moi pareil: plaisir de venir ici:)
vendredi 6 mai 2011 à 21h55
Bonsoir.
Je découvre ton blog et cet article ce soir grâce à une copinaute sans blog, "Midolu", qui m'a donné ce lien. En effet le sujet proposé par la communauté du haïku ce vendredi est "A la brocante" et cela lui a fait penser au livre de Jean-Philippe Blondel. Un beau sujet en effet. Je note cette référence. Merci de l'avoir partagée avec nous.
Bonne soirée
dimanche 8 mai 2011 à 13h17
Merci Oxygène, et juste pour rectifier une petite inexactitude, ce n'est pas "mon" blog mais celui de toute une équipe