Le lendemain, Renaud est réveillé tambour battant par le capitaine Séverine : la police vient de retrouvé le cadavre de Victor. Tout penche à croire à un suicide. Mais la disparition de sa femme Alida et de son fils Charlie éveille les soupçons du capitaine.

Les deux hommes mènent alors des enquêtes parallèles pour dénouer le faux du vrai.

Jean Louis Nogaro annonce dès les premières lignes la couleur de son récit : rouge.
Le rouge révolutionnaire et engagé, dans la droite ligne des polars de Daennincks et Pouy. En effet, le premier chapitre nous plonge dans les manifestations qui animèrent toute la France au lendemain du premier tour des élections présidentielles de 2002. Tout au long de l'intrigue, Jean Louis Nogaro affirme ses convictions (on reconnaîtra d'ailleurs sans mal un certain ministre de l'intérieur) et éveille les consciences. J'aime ces auteurs qui ne sont pas consensuels et lisses : ils sont devenus tellement rares dans le paysage littéraire qu'il en deviennent salutaires. Pour ne rien gâter, Jean Louis Nogaro manie avec maestria l'humour grinçant et l'ironie.
Et comme l'intrigue est finement menée, vous comprendrez que j'ai pris beaucoup de plaisir à me plonger dans cet univers saintois.

Si j'avais un bémol à apporter, ce serait sur la qualité de l'édition : je dois avouer qu'au départ, j'ai été un peu freiner par la finesse de la couverture et certains espaces malvenus dans la mise en page. mais le style de Jean Louis Nogaro m'a permis de passer bien vite au dessus de tout cela pour ne garder que l'essentiel : l'histoire.

Du même auteur : Saint-Étienne Santiago et Les prédateurs font toujours face au vent

Laurence

Extrait :

Depuis que j'avais soufflé quarante bougies, un mois plus tôt, j'avais une certaine tendance à constater avec amertume que ma vie valait principalement par ce qui s'était déjà passé... Un bel avenir derrière soi en quelque sorte ! L'avenir, le vrai justement, ne s'annonçait pas réellement exaltant. Le prochain achat de 4L, ce ne serait pas pour avant trois ou quatre ans, et d'ici là, il me faudrait bien trouver quelque chose pour l'occuper l'esprit.
La jeunesse, c'est la construction de la personnalité, ça prend pas mal la tête, et pas mal de temps. ensuite, il faut se faire sa place dans la société, ou en dehors, d'ailleurs. C'est du boulot aussi. Ça aussi ça occupe. Après, on a une quinzaine d'années peinardes, qu'on passe à savourer ce qu'on a pu faire et à regretter ce qu'on a raté. En clair, on finit par s'enfermer dans le piège qu'on s'est fabriqué, tout seul, comme un grand. Et me voilà, à quarante ans, sur une voie qui est censée être rapide... Pour ceux qui ne sont pas au volant d'une ancêtre atteignant le 120 en pleine descente, après plusieurs kilomètres d'élan. À guetter le doux bruit des pistons! C'est sûr que ça vaut mieux que de se demander quand la neurasthénie nous rattrapera. Si elle ne nous a pas encore rattrapés!
Mes potes avaient un peu de mal à accepter qu'un prof à mi-temps puisse faire de la dépression. Surtout ceux dont la profession n'était pas spécialement valorisée ou présentait des caractères de pénibilité indiscutables. Pour eux, ça se passerait mieux pour moi si je pouvait me dégotter une petite nénette sympa avec qui faire un bout de chemin. Je ne comptais plus les soirée organisées en douce pour me faire découvrir - "Oh quelle surprise, tu es là!' - l'âme sœur. Je les appelais les hameçons. Avec liaison. Ou sans, d'ailleurs.
Pour moi, la question était définitivement réglée depuis la Fac. D'autant plus qu'on était parfois amenés à se croiser avec Alida Miler. Ou plutôt Alida Ougine, depuis une quinzaine d'années maintenant.
À ce propos, il fallait que je me remue un peu, si je voulais être prêt pour la réunion publique organisée par Victor, conseiller général, mari d'Alida, ancien bon camarade, avec qui l'on ne s'est jamais fâché ni vraiment réconcilié. Cette réunion, c'était à 20 heures à la Bourse du Travail de St Étienne.

couverture
Éditions Chloé des Lys - 156 pages