Et bien, croyez le ou non, moi que ne vais jamais voir les dernières pages avant l'heure, j'ai été prise d'une envie subite d'y jeter un œil.
Mais, respectant sagement la mise en garde, je m'en suis finalement abstenue et ai commencé ma lecture.

Don Baltasar, le narrateur, est un être étrange. Un peu poète, un peu marginal, un peu lunaire aussi...
Au décès de don Jacinto, alors que tout le monde conclut à une mort naturelle, don Baltasar observe. Il regarde tout dans les moindres détails. Et pour lui, une chose est sûre : c'est le premier assassinat d'une liste qui s'annonce longue.
Dès lors, il se met à la poursuite d'un assassin que lui seul semble percevoir.

Plus la narration avance, et plus les doutes sur la santé mentale de don Baltasar se font sentir...

Ce récit est intéressant, car José Carlos Somoza, grâce à son avertissement et à sa façon de faire monter les doutes et l'angoisse, parvient à maintenir en éveil son lecteur... Le récit se fait de plus en plus trouble et confus. Les descriptions des nuits espagnoles sont saisissantes de vie. Et puis, impossible de lâcher le livre avant d'arriver à ces 4 fameuses dernières pages...
Malgré tout, j'ai ressenti quelques longueur ça et là, d'autant plus regrettable que la fin est une réussite. Mais... chut... je ne peux rien dire....

Du même auteur :
La dame n°13

La théorie des cordes
Clara et la pénombre
La bouche
Daphné disparue
La clé de l'abîme
L'appât

Laurence

Extrait :

Je cessai de contempler le combat de Guernod contre sa propre douleur pour contrôler attentivement la chambre. Quelques détails préalables - les nuages lents au-dessus de la mer, la poussière accumulée dans les coins - m'inquiétaient. Je décidai de mener mon enquête en embuscade.
Il est temps pour moi d'expliquer ce que j'entends par cette expression. Dans un cahier bien antérieur à ces faits, j'écrivis :
"Mener l'enquête en embuscade. Capture des détails du coin de l'œil. Lasso visuel pour emprisonner des oiseaux impossibles qui se posent pendant un temps indéterminé sur le seuil de l'attention [rayer ce qui précède. Très prétentieux.] Observation patiente de ce qui n'arrive jamais ou n'en finit jamais d'arriver. Espionnage de la vie.
Celui qui le décide peut voir pousser les feuille d'un arbre.
Ma soif de culture me pousse à fouiller dans ma bibliothèque : les Hindous disent que l'orange est déjà dans l'herbe ou sur le point de tomber de l'arbre, mais que nous ne la voyons jamais tomber.
Cependant, investiguer en embuscade c'est voir tomber l'orange."

couverture
Éditions Mille et une nuits - 108 pages