Flash-back. 13 février 2004.
Le narrateur, commissaire de son état, est dépêché au Bois Maudit. Le facteur du patelin vient de découvrir le cadavre d'une jeune femme. Aidé de son fidèle assistant Sylvain, le commissaire amasse rapidement un certain nombre de preuves permettant de confondre le meurtrier : la police scientifique est formelle, l'un des deux ADN relevés sur le lieu du crime appartient à François Leyrat, résidant à quelques mètres de la macabre découverte.

Arrêté et interrogé sur l'identité du deuxième homme, il s'enferre dans un mutisme incompréhensible, se contentant d'affirmer son innocence. Mais les preuves sont là, irréfutables. Il est donc rapidement condamné à 30 ans de réclusion.
Pourtant, le commissaire n'aura jamais la conscience parfaitement tranquille. Et si l'histoire et les sciences se trompaient?

Hervé Sard nous propose un long voyage dans les arcanes des instances judiciaires, quand les preuves peuvent devenir incohérentes.
Durant tout le récit, le lecteur cherche à démêler le vrai du faux, croit comprendre qui est le vieil homme qui 50 ans plus tard remet cette histoire sur le tapis; puis réalise, berné et heureux de l'avoir été, que la réalité est encore plus sordide.
Un bon polar à découvrir sans bouder son plaisir.

... et là, j'entends quelques voix des fidèles de ce blog disant : Mais enfin, Hervé Sard n'est-il pas l'un des auteurs de Fenêtres sur Court? Comment peux-tu être objective?
Ce à quoi je vous répondrai que l'amitié appelle la lucidité. Mais comme je veux que vous vérifiez par vous même mes dires, mon exemplaire voyage depuis hier après-midi dans les sacs de la Poste. L'un des rédacteurs devrait le recevoir d'ici quelques jours. Charge à lui de le lire, le critiquer ici-même, laisser un petit mot sur la page de garde, avant de passer le relais à un autre. Surveillez vos boîtes-aux-lettres. :)

Du même auteur : Mat à mort, La mélodie des cendres, Morsaline, Le crépuscule des gueux

Laurence


Ce roman voyage d'un rédacteur à l'autre. Ce billet est donc régulièrement actualisé et rend compte de ce périple.


Il y a quelques jours, ma boîte aux lettres a été sélectionnée par notre charmante hôtesse, afin de transformer, le temps d'un livre, mes ambiances scribturales. Le monde offert par Hervé Sard ne fait effectivement pas partie de mes sélections de lecture habituelles. Comme quasi tout le monde, j'ai lu dans mon enfance les "Dix petits nègres" d'Agatha Christie, mais je dois bien avouer que cet ouvrage a constitué la première et la dernière ligne de la liste des polars (ou assimilables) que mes yeux aient pu scruter. Je n'ai pas non plus d'aversion pour le genre, c'est juste que j'ai besoin d'un peu plus d'imaginaire, de monde fantastique, d'univers où l'étrange rejoint un quotidien souvent synonyme de morosité (cf Neverwhere de Neil Gaiman par exemple). Pourquoi vous dis-je tout ça? Simplement pour vous re-situer le contexte de mes commentaires, et vous permettre ainsi de mieux les comprendre. C'est parti!

Parlons tout d'abord de l'objet en lui même. 'Vice repetita' commence à peu près comme tout les livres, par une page semi-rigide sur laquelle figure une image et quelques mots formant un ensemble appelé Titre. L'image, représentant les célèbres falaises d'Etretats, est plutôt grisouille, genre mauvais temps breton. Bien évidement (?), cette image est liée au récit : le lieu, la pluie, la tristesse, autant d'ingrédients qui, lorsque l'on referme le livre, nous offre un simili de résumé. Le titre, basé sur un jeu de mot très fin, est tout autant bien choisit. Pour faire simple et peut être pompeux, je trouve que le livre continue de vivre une fois refermé. Je veux dire par là, que si vous le ressortez de votre bibliothèque 2 ans plus tard , sa couverture parlera d'elle même à vos souvenirs. Et un bon point, un! Passons à la suite : ouvrons le livre et lisons le.

La lecture se fait assez rapidement, comptez quelques jours de lecture modérée, et vous y êtes. Cette rapidité s'explique par deux éléments principaux: premièrement, pas de fioritures superfétatoirement inutiles (voila, vous avez compris ce que je voulais dire non?). Le style est ni trop simple, ni trop enlevé, juste comme il faut. Les descriptions sont justifiées et servent l'histoire. Je n'ai pas eu l'impression de lire des passages de remplissage, et ça pour moi, c'est un must 'not' have pour un bouquin! Deuxièmement, vous vous faites tout simplement happer par la narration. Loin de moins l'idée de vouloir faire plaisir à Laurence où à l'auteur en disant cela, mais, lisez le et vous verrez. L'histoire suit un cheminement que, malgré ma non compétence en la matière, je jugerais de classique, mais, car ce qui m'a happé c'est bien évidement le 'mais', l'auteur pimente cette 'classitude' d'éléments anodins que l'on ne peut expliquer avant la fin de l'histoire. La navigation est intelligente: on a constamment l'impression de devancer le récit, mais ce sentiment est maîtrisé par l'auteur, et alors que l'évidence nous paraît évidente, un petit grain de sable vient se placer dans nos rouages. Pour faire simple, j'ai aimé me faire remettre un peu en place quand je me disais: mais ça doit être untel qui a fait le coup et pour cette raison là. Bravo.

Avant de refermer mon billet, et sans faire de spoiler, je décernerai la palme du personnage au gros Mimile qui m'a fait hurler de rire. Ce personnage haut en couleurs, à la verve et au verbe emplis de poésie et de cohérence, mériterait un livre à lui tout seul! Bien sûr le genre serait carrément différent, mais sa vision du monde, de la justice et d'à peu près tout le reste, sonnait très humain en moi. Si ce livre avait été un film, un homme comme Villeret aurait trouvé sa place dans ce rôle.

Pour conclure, ce livre m'a bien plu, et je n'ai donc pas de honte à en faire sa promotion. L'auteur manie avec brio son récit (ainsi que sa couverture ;) ) et nous offre en prime un personnage mémorable, que demander de plus ? Félicitations à Hervé Sard, et merci à Laurence de m'avoir fait parvenir cet ouvrage.

Laton


Vice repetita, c'est une histoire horrible tant par les crimes qui y sont commis que par le supplice que l'auteur a decidé de faire subir à ses lecteurs. Je m'explique. J'assure que l'auteur place ses lecteurs sur une table de tortures. C'est intenable. Il nous distille les éléments de l'enquête, les indices au compte goutte et allonge le supplice sur moult années, au fil de l'enquête ;-) ; le tout entre-mêlé de portraits de personnages tous plus réalistes les uns que les autres. Je note tout de même que l'on apprend peu de choses du narrateur-commissaire. A moins que cela soit une technique de H. Sard pour nous faire entrer pleinement dans cette intrigue.

Des personnages, j'ai été surprise par la tirade du Gros Émile lors de son procès. Je l'ai trouvée un peu longue - déformation professionnelle sans doute - mais finalement elle cadre bien avec le personnage. Il en fait un chouilla de trop mais c'est là tout son charme. Et pas si bête le Gros Émile ! C'est qu'on ne lui en fait pas accroire, à lui !! Mais hélas, personne ne l'écoute. C'est bien là le drame.
J'aurai bien aimé un suspect un peu plus combatif (question de tempérament certainement) mais quand on est, comme lui, pris au piège dans les fils d'une toile d'araignée, le moindre mouvement resserrant immanquablement et un peu plus les mailles, il est impossible de s'en échapper. Pourquoi donc se débattre quand le sort s'acharne autant ?
La torture réside dans cette maîtrise des indices, des situations. On lutte contre le sort. On imagine toutes les combinaisons possibles et imaginables et au final..... la solution est toute autre.
Alors, là, je dis que c'est du vice de la part de l'auteur de nous manipuler ainsi. Mais j'espère bien que le repetita sera pour bientôt.
Mr. Sard, vous savez ce qu'il vous reste à faire !!

Dédale


Mais qu'a donc fait au ciel ce pauvre Leyrat pour que la malchance s'accroche à lui à ce point ?

Plusieurs décennies et une confession sont nécessaires pour élucider le mystère. Un bon polar !

Par Joëlle


Et la boucle est bouclée.
D'après ce que j'ai compris, je suis le dernier rédacteur à avoir reçu, lu et signé ce livre voyageur. Il repart dans quelques heures chez Laurence avec la maturité d'un livre qui a roulé sa bosse...
Ce que j'en ai pensé... hum...
Au premier regard, j'avoue que j'ai hésité. La couverture terne à souhait n'attire pas le regard, au mieux on se dit qu'on le lira "plus tard", au pire on glisse sur le titre pour passer à autre chose. Mais bon. Laurence avait laissé un commentaire très intéressant, alors pourquoi pas essayer ?
A peine ouvert, le livre révèle quelques surprises. Tout d'abord, les petits mots de mes compatriotes ;) ensuite, une écriture fluide, un cadre dès les premiers mots, une ambiance qui prend illico. Et hop. Dernière page. Déjà ? Mais c'est quelle heure ? Ah. Bon. Pris dans les rebondissements de l'histoire, le temps à passé sans moi. J'étais immergé dans ma Bretagne natale au milieu des bois, tentant de répondre à cette question : Qui est le troisième homme ?

Des personnages, je retiendrai le commissaire, fort sympathique même si on ne sait rien de lui. Mais peut-être est-ce mieux, trop de détails gâcheraient. Le jeune Sylvain, un flic tout feu tout flamme, encore plein d'idéaux. Presque décalé par rapport à la société qu'il analyse jour après jour à travers le prisme de son travail de terrain. Enfin, le dandy assassin, peut-être, mais non. Je préfère et de loin Mimi le Gros. Laurence, tu comprendras pourquoi lorsque tu auras pu lire mes textes... Il dégage, en plus de sa forte odeur, un je-ne-sais-quoi que j'aime beaucoup, une espèce de charisme animal, avec sa volonté de provoquer un peu, de s'amuser beaucoup et de taper sur les institutions. Ses interventions, je les ai trouvé jouissives et pleines d'humour, celui que j'aime, celui qui fait de l'ombre, qui fait crisper les mâchoires et grincer les dents :D

En définitive, j'ai passé un excellent moment en votre compagnie, monsieur Hervé. Je regrette pas d'avoir ouvert le livre, ni d'avoir passé quelques heures dans un univers en noir et blanc à l'apparence trompeuse. Car contrairement à ce que l'on peut voir sur la couverture, l'histoire finalement nous apprend que les nuances existent. Et qu'au delà du noir et blanc, une troisième couleur, plus agressive, peut exister... La troisième couleur.

Par Cœur de chene


Un polar ? Non plus que cela encore … En collaboration avec l’enquêteur-narrateur le lecteur cherche le véritable assassin car il est prévenu dès les premières pages que le jugement sera une erreur judiciaire. Qui a violé et tué Sophie ? Pourquoi ? Devine … espère … "Mais oui, mais bien sûr, mais voilà le vrai coupable" quand au détour d’une phrase il comprend qu’il s’est encore trompé. La lecture est rapide de part l’écriture et l’envie de découvrir l’assassin mais surtout son mobile et les circonstances de cet acte criminel.

Le récit est mené avec brio par Hervé Sard (auteur déjà lu dans Fenêtres sur court), des personnages terriblement crédibles dans leur rôle, François Leyrat pourrait être votre ami, votre voisin, vous … Tout comme Sophie ! Et cette erreur judiciaire peut arriver à n’importe qui, est sûrement déjà arrivée, il y a tant d’exemple comme celui de Patrick Dils ou encore le doute qui subsiste toujours dans l’affaire du pull-over rouge. Alors fiction ou pas ? En tout cas un très bon moment de lecture. Merci Laurence pour cette merveilleuse idée de faire tourner un livre. A ton tour miss Google, il est parti vers chez toi !

Par Arsenik_


Extrait :

Dans quelques jours, quelques semaines tout au plus, je ne serai plus de ce monde. J'irai régler depuis cet au-delà auquel je ne crois pas les comptes que je n'ai pas su rendre ici-bas. Je vais mourir. Mais avant cela, je compte utiliser le peu de force qui me reste pour livrer un secret. Un bien étrange secret.
Secret? Pour les rares personnes qui peut-être gardent encore en mémoire les événements de l'époque, il n'y a jamais eu de secret. Une part de mystère tout au plus. Des détails non résolus. Un fait divers qui ne change rien, qui pimente le quotidien. qu'est-ce que la mort d'une femme, dans un monde qui tue à tout va? Rien. Absolument rien.
J'ai tué celle que j'aimais. C'est vrai. Jamais je n'ai oublié ce moment de folie, cet instant hors du temps où j'ai basculé de l'humanité vers la bestialité. Certains gestes sont irréversibles. J'en ai fait l'expérience.
J'ai toujours gardé le silence, je suis resté muet. Pourquoi? Je ne sais pas. D'une certaine façon, livrer la vérité m'aurait soulagé. Apaisé. Mais je n'ai pas eu ce courage, voilà tout. J'ai fait preuve de lâcheté.

couverture
Éditions Krakoen - 222 pages
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