Sur le style, incontestablement, c’est un Lapierre et Collins. Vous avez lu « Paris brûle-t-il ? », « Cette nuit la liberté », « Le cinquième cavalier », vous reconnaîtrez incontestablement la patte des deux auteurs.
Le rythme est rapide, la phrase précise, la narration passe d’un évènement à l’autre d’un personnage à l’autre, sans que jamais le lecteur ne soit perdu. L’histoire est prenante, vivante et se laisse lire comme un roman, que pourtant ce livre n’est pas vraiment. C’est un récit historique particulièrement fouillé et documenté. Il raconte la naissance de l’État d’Israël, le premier conflit avec les Arabes.
Bien sûr c’est un pavé, tous les Lapierre et Collins sont des pavés. Mais que cela ne vous effraie pas, si vous entrez dans ce récit vous aurez vraiment du mal à en sortir.
J’ai lu « Ô Jérusalem » au milieu des années 80. Depuis plus jamais je n’ai suivi les évènements du Moyen Orient comme avant cette lecture.
Je suis un français ordinaire, je n’ai pas mis les pieds à l’Eglise beaucoup plus qu’un autre. Ma famille n’était pas pratiquante, mais bon la Bible, oui, j’en ai un peu entendu parlé, je l’ai un peu lue aussi … Bref, Israël, le pays des Juifs ? Bah oui, évidemment … quelle question !
Et pourtant dès les premières pages d’Ô Jérusalem on apprend, qu’en novembre 1947, au moment où l’ONU décide, par un vote solennel, la création de l’Etat d’Israël avec attribution d’un territoire en Palestine, on apprend donc qu’en 1947 ce territoire même est habité depuis SEPT siècles par des Arabes, que 90% de la population qui habite ce territoire est palestinienne et non pas juive.
Oui fin 1947. Un peu plus de deux ans après que le monde, horrifié, ait découvert l’atrocité du génocide, la monstruosité des camps … Alors bien sûr, les Juifs ont droit à leur état.
Fallait-il pour autant chasser du leur les Palestiniens ?
Celui qui veut aujourd’hui comprendre, avoir une vision claire du conflit israélo-palestinien ne peut pas ne pas prendre en compte la dimension historique. Ce livre nous y aide. Pourtant il a été dit qu’Ô Jérusalem était partisan, qu’il faisait la part belle aux Juifs … Peut-être … J’avoue que ça ne m’avait pas du tout frappé lors de ma première lecture du livre. Mais au fond qu’importe !
En lisant ce livre, en le mettant en perspective avec l’histoire de la région de ces cinquante dernières années, un esprit libre et juste en viendra à cette seule conclusion : vienne enfin le temps du compromis !
Par Alain
Extrait :
(Les Palestiniens) étaient un million deux cent mille à considérer qu'un partage de ce territoire , sur lequel ils étaient majoritaires depuis sept siècles, représenterait un acte d'iniquité monstrueux perpétré par l'impérialisme occidental pour réparer un crime qu'eux, Arabes, n'avaient pas commis. Jusqu'alors, les Juifs avaient presque toujours vécus en paix aux côtés des Arabes. Leur exil avait même connu son unique âge d'or dans l'Espagne des Califes. De tout temps, l'Empire Ottoman leur avait ouvert ses portes alors que la plupart des pays d'Europe leur fermaient les leurs. Et la longue succession des persécutions anti-sémites, qui devait trouver son atroce apogée dans les fours crématoires hitlériens, avaient été accomplis par les nations chrétiennes d'Europe et non par l'Islam. C'était donc sur ces nations-là protestaient les Arabes, et non sur eux, que devait retomber le fardeau de ces crimes. En outre, sept cents ans d'occupation ininterrompue leur semblaient un droit infiniment plus justifié que les lointains liens historiques des Juifs pour revendiquer la possession de leur terre.
(...)
David Ben Gourion avait décidé de rentrer d'urgence à Jérusalem. "Comme ils sont inconscients, songea-t-il en découvrant toute la ville en train de danser, ils s'imaginent qu'une guerre peut commencer dans des farandoles !" Il gagna directement son bureau à l'Agence Juive. De nouveau réunie autour de l'édifice, la foule attendait une apparition des ses dirigeants.
Fermement résolu à faire partager à ses compatriotes les sentiments d'angoisse qui l'étreignaient, Ben Gourion finit par sortir sur le balcon, entouré de ses principaux adjoints. Tandis qu'il parlait, quelqu'un chuchota à l'oreille de Golda Meïr une information qui justifiait singulièrement l'avertissement qu'il apprêtait à lancer. Trois Juifs venaient d'être massacrés dans une embuscade à la sortie de Tel-Aviv.
Éditions Pocket - 924 pages
Commentaires
vendredi 6 avril 2007 à 07h53
J'avais découvert ce fait historique pendant mes cours d'histoire, et j'ai toujours été choquée que l'on ait pu expatrier tout un peuple pour en "loger" un autre. Maintenant, je pense que la situation est malheureusement inextricable. L'occident est responsable de cette plaie béante.
vendredi 6 avril 2007 à 09h02
Tu me donnes vraiment envie de lire ce livre. J'ai depuis longtemps envie d'en savoir un peu plus sur ce sujet... Merci pour cette belle critique!
dimanche 8 avril 2007 à 14h06
Adolescente, j'avais adoré ce livre (de même que tous les autres du duo Lapierre-Collins). Il permet vraiment de bien comprendre les enjeux et le contexte historique.
lundi 24 septembre 2012 à 04h12
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mercredi 16 octobre 2013 à 11h04
Ne tombez pas dans les clichés!
Premièrement, la création d'Israel n'est pas une réponse à la shoah. Le mouvement sioniste a vu le jour à la fin du 19e siècle, et le «Nouveau yichouv» - l'embryon de la société israélienne-, s'y est développé dès cette époque, avec ses villes, villages, sa langue, universités...
Quant aux puissances européennes occidentales, hormis l'URSS qui voyait en Israel un potentiel allié dans le cadre de la Guerre froide - les Juifs de Palestine étaient à l'époque plutôt pro-soviétiques - elles n'ont pas réellement soutenu la création d'Israel. Le Royaume-Uni s'est abstenu au moment du vote aux Nations-Unies, alors que les États-Unis ont retiré leur soutien au partage en mars 1948, lorsque les Américains se sont mis à craindre pour leur position dans le monde arabe(dans les pays pétroliers surtout). Certes, l'intelligentsia européenne a vu dans la Shoah, la preuve que les Juifs avaient besoin d'un refuge, mais dans les faits, les chancelleries européennes ont fait passer leurs intérêts l'émotion. N'oublions pas, également, qu'en 1947, la plupart des Occidentaux étaient encore antisémites. Ce n'est que depuis les années 60, que l'on parle spécifiquement du génocide juif, sans noyer celui-ci dans masse des crimes commis par les nazis contre les autres déportés (résistants, etc.).
Deuxièmement, la plupart des Palestiniens qui ont fui pendant la Guerre de 1947-49, n'ont pas été expulsés. Sur les 500 et quelques villages Palestiniens qui ont été dépeuplés, il y en a environ 120 où la population a été expulsée manu militari. Ailleurs, ils ont fui les combats.
De plus, les Palestiniens aussi ont expulsés beaucoup d'Israéliens pendant la Guerre de 1947-49. Dans toutes les régions de Palestine conquises par les armées arabes, tous les Juifs, sans exception, ont été expulsés. Au total, 10% des Juifs israéliens ont été chassés de chez eux pendant cette guerre.
Par ailleurs, la Guerre de 1947-1949 a été déclenchée par les Palestiniens et les pays arabes voisins qui voulaient détruire Israel. S'ils n'avaient pas déclench cette guerre, personne n'aurait été déplacé.
Enfin, une chose est vraie. Israel a été crée sur un territoire qui était déjà occupé par un autre peuple et cela est moralement problématique.
Cependant, il ne faut pas oublier que les Juifs n'avaient pas d'autre territoire.
C'est pour cela que les Israéliens ont crée leur État en Palestine, pas juste parce que les Juifs y ont vécu il y a 2000 ans, contrairement à ce que disent les antisionistes de façon très caricaturale.
On ne peut pas comparer un peuple sans terre qui souhaite récupérer une partie de sa terre d'origine afin de pouvoir avoir son propre pays, et un peuple qui possède déjà un territoire, et qui souhaite récupérer des terres lui ayant appartenu par caprice irrédentiste.
Et c'est pour cela qu'il était juste, d'un point de vue sioniste, d'allouer une partie de la Palestine aux Juifs, pour qu'ils puissent eux aussi avoir un pays.
Alors, bien sûr, ce territoire était déjà peuplé. Et c'est pour cette raison, que les Juifs n'ont reçu qu'une partie de la Palestine.
Les sionistes se plaignent toutefois du fait que les Juifs auraient reçu une partie plus grande du territoire, que celle octroyée aux Arabes. Ceux qui affirment cela oublient qu'en 1922, la Jordanie, qui représentait alors près de 80% de la Palestine, a été donnée aux Arabes.
Ainsi, ce n'est pas 55% de la «Palestine historique» que les Juifs ont reçus, mais à peine plus de 10% du territoire.
Dernière remarque: on entend souvent dire que le mouvement sioniste adhérait à l'idéologie colonialiste européenne, mais c'est faux. En réalité, seuls les premiers sionistes étaient colonialistes. Mais dès la deuxième aliya, c'est-à-dire, dès la deuxième vague d'immigration juive en Palestine, qui a eu lieu entre 1904 et 1914, le mouvement sioniste n'était plus du tout colonialiste. Au contraire, les sionistes de la deuxième vague d'immigration juive ont même offert une alliance aux Arabes, et ce, dès 1913, alors que le mouvement sioniste a envoyé une délégation assister au premier Congrès nationaliste arabe qui a eu lieu à Paris, justement pour proposer l'idée d'une alliance judéo-arabe. Dans les années 30, Ben Gourion a été encore plus loin, en énonçant le projet d'une confédération sémite unissant Juifs et Arabes. Même l'idée d'un État binational, qui fait aujourd'hui fureur chez les pro-palestiniens, provient à la base du mouvement sioniste. La principale force politique qui en faisait la promotion, était le mouvement des kibboutz, Hachomer Hatzair.
Alors évidemment, lutter contre l'occupation des Territoires palestiniens par Israel est légitime - bien que les Palestiniens soient aussi largement responsables de cette occupation, car c'est le terrorisme des groupes islamistes palestiniens, dont le but n'est pas la formation d'un État palestinien indépendant mais plutôt la destruction d'Israel, qui a détruit la gauche israélienne.
Néanmoins, vouloir qu'Israel se retire des Territoires palestiniens, n'est pas une raison pour dire des choses fausses sur ce pays.
En même temps, je ne vous en veut pas. La propagande anti-israélienne est aujourd'hui telle, qu'il est impossible d'y échapper.
Ceci-dit, entre les militants pro-palestiniens d'un côté et les ultras d'Israel de l'autre, je vous conseille de vous intéresser un tout petit peu au Camp de la paix israélien (qu'on appelle aussi souvent «sionistes pro-palestiniens»). Vous verrez, ils ouvriront vos horizons!
Bonne continuation!
C. Bendavid