En fait c'est le paradoxe de Renée, le personnage principal de ce livre. Une concierge, à l'ancienne. Elle vit et officie dans un immeuble de riches. Elle a toutes les caractéristiques des concierges: le chat, la moustache (pas du chat), la télé qui hurle toute la journée, elle ronchonne à longueur de temps. Bref une caricature...
Oui mais voilà, comme le hérisson, si on dépasse les piquants, une toute autre réalité apparaît. Renée est un monstre de culture. Elle a tout lu et elle philosophe. Elle adore la philosophie, le cinéma japonais
Elle se cache car ses voisins sont bien différents et ne s'attachent qu'à l'apparence.
Sauf .... Paloma.
Pauvre petite fille de riches. Elle vit dans le même immeuble. Elle a douze ans. Elle doit subir sa famille. Hyper intelligente mais qui ne fait pas que ingérer de la culture ou des connaissances. Elle les intègre et les digère. Dégoûtée du monde autour d'elle. Incomprise par sa propre famille. Elle décide de se suicider. La date est fixée. Il s'agit de savoir le comment. Oui mais voilà, elle rencontre Renée. Elle va, peu à peu, découvrir qui est la vraie Renée.
Et au fil du livre vont se tisser une amitié, un amour improbable.
Différents personnages évoluent avec ce duo dont Mr Ozu et la femme de ménage portugaise. C'est un vrai plaisir.
Mais qui aime bien, châtie bien. Je dois quand même faire une réserve. La culture de Renée peut parfois être indigeste car tout le monde ne possède pas le même niveau de philosophie pour suivre ses digressions. C'est un peu trop... Cela devient pédant et va à l'encontre de la démonstration voulue que la culture n'est pas réservée à une élite.
A part ce bémol, c'est un magnifique roman avec des personnages attachants.
Par Kez
Les critiques qui suivent ont été mises en ligne le 03 juillet à la suite du "Prix Biblioblog"
Avec Renée et Paloma nous allons suivre les pensées de ces deux habitantes de la rue de Grenelle que tout aurait dû séparer, surtout la société qui ne se mélange pas. C’est là le hic de ce roman : trop de stéréotype, trop de case bien rangé, bien carré. Trop de clichés ou d’anti-cliché, a chaque fois on tombe dans les extrêmes. Autre point négatif : j’avoue ne pas avoir compris certaines phrases trop alambiquées, un langage trop intellectuel par moment qui m’a fait relire plusieurs fois la même phrase pour au bout du compte la laisser tomber. Mais comme tout n’est pas ni tout blanc ni tout noir j’ai aimé l’intercalage des deux narrations Paloma / Renée qui donne un peu de rythme à une histoire qui n’en a pas. En effet à part les pensées et les réflexions philosophiques des deux personnages centraux il n’y a pas grand-chose d’autre.
Pour ma part je dois dire je n’ai aucune réserve. J’ai adoré ce livre. Il est certain qu’en général la philosophie n’a pas sur moi un effet rébarbatif. Mais je comprends le bémol de Kez parce que je crois en effet qu’il peut s’agir là d’un frein pour certaines personnes. Mais moi j’ai ADORÉ ce livre.
J’ai adoré l’intelligence, la plume un peu caustique, cynique, tranchante, mais très littéraire, très appuyée. Les références au cinéma japonais et hollywoodien, aux livres, à l’actualité. J’ai trouvé ce livre plein de poésie, d’humour (j’ai ri, j’ai tellement ri !), de tendresse (j’ai presque cru que l’amour pouvait peut-être exister même quand ça semble désespéré – j’ai bien dit presque peut-être… hey ho… faudrait pas s’emporter). C’est plein d’émotions aussi. J’ai pleuré. En plein milieu du métro, la grosse larme qui s’étend sur la joue et tout le bataclan.
Mais ce livre m’a fait un bien fou.
Bien que plus intellectuel, il a quelque chose de Ensemble c’est tout, dans cette énergie, ce tout positif, cet espoir qui goûte bon.
Le Beau existe vraiment. On nous en parle. Et on le tient entre les mains.
C'est le dernier que j'ai lu de la sélection. Et c'est aussi celui qui m'a le plus marqué. Peut-être parce que j'en avais entendu beaucoup de choses différentes, notamment négatives. Donc j'hésitais à le lire, me disant que j'allais être déçu. La première impression, passées les 50 premières pages était « Bon sang, mais dans quoi je me suis embarqué ? » Il est vrai que mes cours de philo sont un peu loin. Exit la phénoménologie
Ceci dit, je me suis retrouvé happé par l'histoire, les personnages, leurs problèmes d'intégration. J'ai accroché au style de l'auteur, clair, satyrique, bourré de références et de clins d'oeil ; et par dessus tout, j'ai adoré l'humour cynique sous-jacent (je ne me vois cependant pas installer le Confutatis dans mes toilettes, ça risque d'être un chouia bruyant...)
Je l'ai lu en surveillance d'examen, j'avais un peu de temps. Je pense que me voyant rire (et à la fin pleurer) tout seul, l'élève que je surveillais a du se poser pas mal de questions
Bref, malgré tout, c'est celui-ci qui pour moi sort du lot. Un grand moment de bonheur.
C'est savoureux à souhait. J'avais déjà bien aimé la plume de l'auteure avec Une gourmandise. Mais là, c'est carrément le 3 étoiles. Sans avoir rien lu des chroniques déjà publiées sur ce livre, j'avais envie de le lire, à coup sûr, rien que pour la magie du titre, très très bien trouvé.
Si le style est très, même trop érudit, compliqué pour certains, qu'il peut donc rebuter au départ, il faut résister contre la tentation d'abandonner cette lecture. Il est des trésors qu'il faut aller chercher pour les apprécier à leur juste mesure. C'est le cas avec L'élégance du hérisson.
Une fois cet écueil passé, vous pourrez savourer un très bon roman et faire connaissance de personnages attachants. Muriel Barbery a le don du portrait. Elle vous cisèle un personnage en mots choisis qui font mouche à tout coup. Elle peut être tendre ou bien acerbe. Elle sait vous sortir quelques vérités bien senties.... de derrière un paragraphe. C'est délicieux !
Mon exemplaire est décoré de post-it comme un sapin de noël de guirlandes. Car je sais que je reviendrai de temps à autre me plonger dans la vie de cet immeuble bon chic-bon genre.
Malgré ces éloges, j’en veux pourtant à Muriel Barbery pour la fin. Mais je ne vous en dis pas plus. Mais bon, quel choc ! Il va me falloir du temps pour m'en remettre.
« Nous ne voyons jamais au-delà de nos certitudes, et plus grave encore, nous avons renoncé à la rencontre, nous ne faisons que nous rencontrer nous même, sans nous reconnaître dans ces miroirs permanents » (Pensée profonde n° 9 page 164)
René, concierge, est conforme à l’image que se font les habitants de l’immeuble, des bourgeois riches et suffisants. Ils ne soupçonnent pourtant pas, ce qu’elle leur cache : une érudition pointue, une passion pour la littérature russe et le cinéma japonais, un goût délicat pour les nourritures du corps comme de l’esprit.
Paloma, 12 ans, petite fille, surdouée et malheureuse, qui devant l'absurdité de la vie, a décidé de mettre fin à ces jours, le jour de ses 13 ans.
J’ai laissé René et Paloma à la page 179.
Je me suis lassée de René, pétrie de pédanterie et de condescendance.
Je me suis fatiguée de Paloma, blasée du bocal.
Je me suis séparée de M. Ozu, à regret.
Je me suis fâchée avec moi, trop velléitaire, que voulez vous, je procrastine, je ne suis pas sage aujourd’hui, pas encore, peut-être demain ou après-demain, mais c’est loin.
Pourtant, je bois du thé !
Allez file Listhain ! c’est mon chat !
Voilà un roman pour le moins littéraire. Le style est recherché, ciselé, un peut trop peut-être. Du coup, il laisse à la marge une partie des lecteurs qui se sentent dépassés par les propos de Renée et Paloma.
Mais il faut avouer qu'il est difficile de trouver un compromis entre exigence littéraire et accessibilité pour tous. J'ai été très sensible à la musique des mots, à la construction narrative, et en même temps, je me suis sentie éloignée des deux protagonistes.
Hélène
Ce roman présente la particularité d'avoir deux narratrices particulièrement névrosées, Renée et Paloma. J'ai été amusé par les réflexions de Renée sur le bon usage de la ponctuation, mais un peu ennuyé par les longueurs de ses digressions culturelles. De son côté, Paloma passe son temps à critiquer les membres de sa famille et leurs amis. Le personnage de Renée m'a paru très sympathique, mais je n'ai pas vraiment trouvé l'explication que j'aurais attendue sur ce qui la fait dissimuler sa personnalité propre dans ce rôle de caricature de concierge.
Ce livre me laisse une étrange sensation...
Muriel Barbery écrit extrêmement bien, à n'en pas douter. On sent derrière ses phrases l'amoureuse des mots et de la syntaxe, et il est très réconfortant aujourd'hui de lire des romans de si bonne facture.
Et pourtant, j'ai eu beaucoup de peine à pénétrer dans son récit. Je me demande d'ailleurs si cela n'est pas dû à l'écriture justement. Ce langage très soutenu, ces constructions syntaxiques enchevêtrées, quoique parfaitement justes, ont eu l'effet d'un filtre et déclenché chez la lectrice que je suis un effet de distanciation. Comme si les mots prenaient le pas sur les émotions. Or, à mon sens, toute l'ambition de la littérature se trouve ici : parvenir à cet équilibre précaire entre l'émotion provoquée par le contenu et celle déclenchée par la forme.
L'arrivée de Kakuro et la rencontre de Renée et Paloma marquent une césure. Tout à coup, en quittant la solitude de ces deux monologues, Muriel Barbery a réussi à me faire ressentir cette empathie nécessaire à la lecture.
Je m'attendais donc à un bilan certes nuancé, mais positif.
Malheureusement, la dernière page, ou plus exactement les dernières phrases m'ont désemparée. Cette fin, qui aurait été tout à fait à propos dans un roman d'Anna Gavalda, ne me semble pas à la hauteur de ce récit. Un peu trop convenu et bleuet peut-être... À moins que je sois passée à côté de l'essence même de ce récit, ce qui est encore possible.
Laurence
Sélection du Prix Biblioblog 2007
Extrait :
.... elle a l'élégance du hérisson : à l'extérieur, elle est bardée de piquants, une vraie forteresse, mais j'ai l'intuition qu'à l'intérieur, elle est aussi simplement raffinée que les hérissons, qui sont des petites bêtes faussement indolentes, farouchement solitaires et terriblement élégantes.[...]
Dans l’imaginaire collectif, le couple de concierges, duo fusionnel composé d’entités tellement insignifiantes que seule leur union les révèle, possède presque à coup sûr un caniche. Comme chacun sait, les caniches sont des genres de chiens frisés détenus par des retraités poujadistes, des dames très seules qui font un report d’affection ou des concierges d’immeuble tapis dans leurs loges obscures.[...]
Dans Taniguchi, les héros meurent en escaladant l’Éverest. Comme je n’ai aucune chance de pouvoir tenter le K2 ou les Grandes Jorasses avant le 16 juin prochain, mon Éverest à moi, c’est une exigence intellectuelle. Je me suis donné pour objectif d’avoir le plus de pensées profondes possible et de les noter dans ce cahier: si rien n’a de sens, qu’au moins l’esprit s’y confronte, non ?[...]
Le test de la mirabelle s'effectue dans ma cuisine. Sur la table en formica, je dépose le fruit et le livre et, entamant le premier, me lance aussi dans l’autre. S’ils résistent mutuellement à leurs assauts puissants, si la mirabelle échoue à me faire douter du texte et si le texte ne sait gâcher le fruit, alors je sais que je suis en présence d’une entreprise d’importance et, disons-le, d’exception tant il est peu d’œuvres qui ne se voient dissoutes, ridicules et fates, dans l’extraordinaire succulence des petites boules dorées.
Éditions Gallimard - 359 pages
Commentaires
lundi 30 avril 2007 à 13h00
Il est noté dans mon challenge ABC, j'espère qu'il me plaira !
lundi 30 avril 2007 à 15h21
J'hésite vraiment à le livre, car j'ai déjà entendu de cette difficulté au niveau de la culture. J'ai un peu peur de ne pas être à la hauteur...
lundi 30 avril 2007 à 19h27
Tiens, je suis en train de lire ce livre, je me demande bien pourquoi... ;o)
lundi 30 avril 2007 à 23h13
C'est ma chouchoute !
J'adore.
( soyons honnête, question culture, elle sait aussi pimenter et s'autoriser des remarques humoristiques voire acerbes qui démontent les quelques pages ardues qu'elle a écrites auparavant )
vendredi 15 juin 2007 à 11h29
J'ai acheté le livre pour ce qu'en disait le bouche à bouche. En le lisant, j'ai d'abord été bienveillante, puis gênée, et j'ai fini, après la moitié du roman, par le détester. Les personnages présentés comme les "positifs" ne valent pas mieux que ceux qu'ils vilipendent. Snobisme, intolérance, mépris pour les autres,sentiment de supériorité, autosatisfaction de ne pas être comme la masse, conformisme de l'anticonformisme, ... et pédantisme.
Tou est attendu : les correspondances entre Paloma (personnage mal traité) et renée, le rôle de M. Ozu, la mort de Renée ... Les allusions littéraires ou cinématographiques sont lourdement introduites, lourdement expliquées. C'est très prof, pas sensible.
Quand on lit les critiques ci-dessus, cela confirme mon point de vue : c'est un livre qui exclut au lieu d'embrasser.
mardi 26 juin 2007 à 23h56
Entièrement d'accord avec Goeland.
Tout est lourd, populiste, et de plus, le style parfaitement indigeste.
Prétentieux.
Je comprend mal cet engouement pour de pseudo bons sentiments et conte pseudo philosophique lourdement moral.
mardi 3 juillet 2007 à 16h20
@Arsenik_ : en lisant le début de ta critique, j'ai cru me lire

@Laurence : oui oui nous sommes d'accord
mardi 3 juillet 2007 à 20h03
N'est-ce pas Flo?
Quand tu as publié ta critique, je me suis mordu la langue et croisé les doigts pour ne pas t'écrire publiquement ce que j'en pensais, puisque j'étais tenu au silence jusqu'au 1er juillet. Mais effectivement, j'ai toujours du mal à comprendre l'enthousiasme qu'a soulevé ce livre. Oui c'est une œuvre littéraire, sans conteste, mais pour moi elle n'a pas réussi la gageure du rassemblement, et a parfois même le tort d'enfoncer les portes ouvertes.
lundi 9 juillet 2007 à 15h30
Quand Delerme rencontre Cohelo.
Epicure revisité et propos du niveau maitrise de philo !
Amelie Poulain a 12 ans ,Amelie Poulain à 54 ans
L'ntelligence et la culture heros de roman.
Joli produit certes !
Mais creux
vendredi 31 août 2007 à 17h23
On peut, certes, être un peu dérouté par cette histoire non dénuée de clichés, mais quelle importance si l'on considère le plaisir que procure un style riche et sobre à la fois, avec cet humour mordant qui nous transporte véritablement dans les beautés du monde.
samedi 1 septembre 2007 à 08h53
HB
personnellement, ce qui m'a gêné justement c'est le style que j'ai trouvé un peu trop ampoulé. Mais bon, chacun voit midi à sa porte, et c'est tant mieux si un livre soulève des réactions différentes.
lundi 3 septembre 2007 à 15h05
J'ai également été troublé par ce livre : une distanciation d'entrée. Toute cette culture étalée, la phénoménologie,... m'ont laissé froid. Et cette prétention à avoir toujours raison, à s'enfermer dans les clichés que les autres se font de nous, quelle horreur! Puis, quand Mr Ozu, que Renée se laisse un peu emportée par ses sentiments, qu'elle oublie tout ce qu'il y a autour, je me suis laissé avoir. Jusqu'à la fin trop abrupte et qui fait faux.
Pour le style, j'ai trouvé que le livre se lisait bien, mais je pense ne pas en retenir grand chose. Un moment rapidement passé, sans beaucoup de souvenirs.
lundi 17 septembre 2007 à 11h53
Derrière d'apparentes reflexions philosophiques se cache surtout une culture sociologique très riche mise au service de la construction d'un monde social coherent et realiste. Plutot que de denigrer le niveau philosophique du livre qui n'est pas son element principal, je suis plutot surpris du manque de references sociologiques de ceux qui critiquent ce meme ouvrage. Visiblement tout un pan du bouquin est passe au travers de la lecture acerbe de "philosophes" trouvant une bonne maniere de se gargariser a faible cout.
Pour ceux qui ont peur de lire ce livre parce qu'il semble trop ardu, je tiens à les rassurer : la plupart de ceux qui ont dit cela n'ont pas decele les subtilites que tout lecteur charitable percoit. Ce n'est pas un livre abscons, il est simplement riche de reference plus ou moins explicite, la plupart du temps utilise tres a propos. La non comprehension de ces references na pose aucun probleme de comprehension. Il s'agit plus de niveaux de lectures. Et ce livre en comporte beaucoup, ce qui constitue deja une richesse en soi. Je conseille donc ce livre à tous et j'ajoute une petite mention à l'egard de ceux qui ont quelques references sociologiques : ce livre presente un interet pour vous uniquement pour cet aspect.
Kolia
samedi 15 décembre 2007 à 09h53
L A F E U I L L E V O LA N T E
La Feuille Volante est une revue littéraire créée en 1980. Elle n’a pas de prix, sa diffusion est gratuite,
elle voyage dans la correspondance privée et maintenant sur Internet.
N°286– Décembre 2007
L'ÉLÉGANCE DU HÉRISSON – Muriel BARBERY - GALLIMARD.
Le bandeau de l'éditeur avait quelque chose d'encourageant, pensez-donc « Prix des Libraires 2007 ». Depuis le syndrome du Goncourt, l'obtention d'un prix, quel qu'il soit, surtout s'il s'affiche sur un morceau de papier rouge vif en travers de la couverture, est toujours, à tout le moins pour moi, assez engageant. Sur la 4em de couverture, j'apprends que le précédent roman de l'auteure, que j'avoue n'avoir pas lu, a été traduit en douze langues! Je suis toujours resté sur la certitude que la traduction d'un ouvrage dans une langue étrangère était forcément un gage de qualité. Ajoutez à cela, une publication chez Gallimard... Je ne pouvais donc qu'être transformé en lecteur attentif!
Le lieu, un immeuble cossu, 7 rue de Grenelle à Paris où se succèdent des générations de résidents-propriétaires. Les personnages, Renée, 54 ans, veuve et concierge de son état dans ledit immeuble et qui voit chaque jour passer devant sa loge la faune des propriétaires riches qui, bien entendu l'ignorent avec suffisance. Paloma, 12 ans, deuxième fille d'une famille de résidents influents, névrosés et snobs, à l'intelligence précoce et quelque peu en révolte avec son milieu social et sa famille et qui, malgré son jeune âge, a déjà l'intuition de ce que la vie lui réserve de désespérant et pense à son prochain anniversaire qu'elle célébrera en mettant le feu à l'immeuble qu'elle habite avec ses parents, et en se suicidant! Elle pense pouvoir y échapper temporairement en rédigeant une sorte de journal intime. Le décor et les principaux protagonistes avaient déjà quelque chose d'attachant, j'aime assez ceux qui se révoltent contre leur milieu et cultivent leur différence. C'est vrai qu'ici, le lecteur est servi. Cette concierge, sous des dehors conformes à son état, est en réalité une lettrée[un peu trop!] volontairement secrète, passionnée de littérature russe et de cinéma japonais, une « autodidacte prolétaire ». C'est elle qui a l'élégance du hérisson, pleine de piquants au dehors, mais sensible et subtile à l'intérieur. Elle vit avec un chat prénommé Léon, en hommage à Léon Tolstoï, et des souvenirs. Paloma distille des aphorismes et des remarques désobligeantes contre le milieu qui l'a vue naître. En arrière-plan, il y a la faune de l'immeuble, indifférente, compassée, imbue d'elle-même et pleine de condescendance pour cette concierge qu'elle traite comme les êtres conscients de leur prétendue supériorité savent le faire avec les subalternes... par le mépris! Il y a cependant des exceptions. Cela menaçait d'être intéressant!
Il y a une vrai complémentarité entre Renée et Paloma, deux solitudes, qui ne se rencontrent qu'à la fin. Le récit lui-même est une sorte de balancement entre deux extrêmes, deux conceptions opposées de la vie. Entre elles il y a cependant une sorte de compréhension pleine de non-dits, d'empathie secrète et muette.
Le style est alerte, emprunt d'humour, d'érudition[un peu trop peut-être?J'ai souvent eu la désagréable et agaçante impression que nombre de chapitres n'étaient là que pour mettre en valeur celle de l'auteure], élégant, jubilatoire même et bien dans l'esprit de cet ouvrage qui est une véritable critique des apparences et du pouvoir sous toutes ses formes. Mais j'avoue que j'ai eu du mal à terminer ce roman qui commençait si bien. L'auteur confie qu'elle s'est fait plaisir en l'écrivant, ce que je veux bien croire et cela me paraît être la moindre des choses, mais moi, en tant que simple lecteur, je ne l'ai que peu partagé, poursuivant ma lecture, davantage par curiosité que par véritable intérêt.
J'ai ressenti, toute au long de cette fiction, une sorte de superficialité, malgré les choses évoquées, une sorte de placage d'idées étrangères aux personnages et, bizarrement, à la fin, cela a laissé place à quelque chose de plus authentiquement humain, de moins intellectuellement apprêté, comme si les choses reprenaient leur vraie place dans un banal quotidien. « Rien n'est jamais acquis à l'homme, ni sa force, ni sa faiblesse ni son coeur ... » nous rappelle le poète.
© Hervé GAUTIER - Décembre 2007.
monsite.orange.fr/lafeuil...
mardi 26 février 2008 à 18h05
Je pense que cette histoire est à prendre avec un certain recul. la culture de Renée (et de Paloma) est, je pense, volontairement exagérée, ce qui fait l'intérêt et le piquant de l'histoire. Je pense que le but n'est pas la vraissemblance; L'auteur a voulu se faire plasir. c'est un peu un regroupement de pensées philosophiques regroupée sous une histoire, qui n'a pour fonction que de lier ces différentes pensées de manière plus ou moins plaisante (suivant les goûts).
mardi 26 février 2008 à 19h16
ok avec miss ! J'ai adoré ce livre, qui est une caricature, il ne faut pas l'oublier, d'où l'exagération dans la culture.
mardi 11 mars 2008 à 15h51
@ Kolia :
je ne suis certainement pas un grand sociologue, mais je ne vois ce qu'il y a de sociologique dans ce livre. Un grand immeuble bourgeois est certes le lieu de l'intrigue, mais quel rapport avec la sociologie ? Elle n'entre jamais dans la description précise de la vie de ses habitants. Ce n'est qu'un cadre.
De plus, je ne pense pas que Renée soit un idéal-type de la concierge, ni Paloma celui de la collégienne. C'est une fiction, qui se revendique comme telle, avec sa part de caricature, et n'est pour moi en rien une analyse sociologique. Mais peut-être pourras-tu m'éclairer ?
En revanche, je suis plutôt d'accord qur les différents niveaux de lecture.
jeudi 13 mars 2008 à 18h18
Yohan : excellente réponse. Je n'avais pas pris le temps de répondre aux derniers commentaires sur ce billet, mais tu l'as très bien fait.
mercredi 26 mars 2008 à 13h23
Merci Laurence, mais j'ai répondu car j'ai vraiment du mal à voir ce que la sociologie vient faire là dedans. Et Kolia ne m'a apportée de réponse :-s
samedi 26 juillet 2008 à 21h25
J'ai lu ce livre l'hiver dernier et j'ai trouvé que c' était une très belle écriture. Il faut aimer la langue française et tous ses tourments pour apprécier ce livre. Au-delà de cela l'histoire est originale et lorsqu'on arrive à rentrer dedans, on s' attache facilement à Renée et à Paloma.
jeudi 21 août 2008 à 00h36
je viens de finir ce livre et j'ai eu plaisir à découvrir vos réactions car j'avoue avoir eu du mal à y trouver de l'intérêt. Contrairement à beaucoup d'entre vous, j'ai trouvé le style de l'écriture forcé même si d'apparence, tout le monde reconnaîtra que c'est bien écrit. je n'ai pas décelé cette petite pointe de genie et de spontanéité dans cette écriture mais un auteur qui cherchait désespérément à faire du beau, du bien comme il faut.
Concernant la suite de clichés sur la bourgeoisie et l'aristocratie parisienne, elle est d'une banalité affligeante et quid de notre concièrge autodidacte, passionnée de literrature russe et de cinéma japonnais qui nous fait croire pouvoir dominer son DESCARTES et son KANT avant de s'attaquer, non sans difficulté tout de même, à la phénoménologie d'HUSSERL. Personnage peu vraisemblable, qui me donne l'impression d'exister simplement (et cela m'a fortement agacé) parce que l'auteur voulait se faire plaisir et nous livrer quelques unes de ses réflexions ou regrets d'incompréhension philosophiques.
Bref, je retiendrai tout de même quelques pointes d'humour mais qui constituent un trop maigre intérêt pour que j'encourage une autre personne à lire ce livre.
mardi 26 août 2008 à 18h15
Je viens juste de finir ce livre ...
Je me suis souvenu qu'il était dans la première sélection du prix et donc j'ai lu toutes vos critiques avec intérêt ... même si elles sont plutôt sévères.
J'ai quant à moi beaucoup, beaucoup aimé.
J'ai été comme certains d'entre vous agacé par la pédanterie de certaines pages, j'avoue que j'en ai même sauté quelques unes ! Mais j'ai été touché par les personnages, Renée (quand Muriel la laisse être son personnage) est très attachante.
L'un d'entre vous a cité "ensemble, c'est tout". J'ai également pensé au film d'Agnès Jaoui "Le goût des autres".
Bref, un très bon moment de lecture !
mardi 8 mars 2011 à 22h09
Puisque l'auteur cite les mangas de Taniguchi, le film Blade Runner et place le mot "tellurique", il m'est impossible de ne pas apprécier ! : )
Trêve de plaisanteries, le style ne m'a pas bouleversée, les enchaînements sont parfois un abrupts et la fin assez "renversante" et pourtant pas surprenante. Dur d'être un hérisson !
Il y a tout de même quelques formules assez bien senties, graves ou complètement "kawai" ( genre le "coeur serré comme un chaton en boule") et quelques instants délicats que je retiendrais.
Pour le reste, je ne peux pas en vouloir à l'auteur, prof de philo, de me confier les références des oeuvres d'art qu'elle apprécie, de parler de la beauté, de ses inquiétudes sur l'université. Et si je ne connais pas toutes les références citées, cela me regarde. Z'avez qu'à lire "Mémoires d'une jeune fille rangée" et vous verrez si vous vous trouvez toujours cultivés après, croulant sous les références ! Celles citées par Barbery ne vous paraîtront pas trop nombreuses.
Et pourquoi ne pas enchaîner avec un roman de Tolstoï, ou un manga de Taniguchi ou un film d'Ozu, c'est plutôt une jolie perspective, non ?
Après les passages sur le thé, la cuisine japonaise et les pâtisseries, cela me donne de l'appétit pour lire le premier roman de l'auteur qui porte le doux nom de "gourmandise".
mardi 8 mars 2011 à 22h31
Ce qui me plaît, c'est qu'il y a peut-être aussi un autre niveau de lecture que celui des simples personnages et de leur rencontre :
Paloma et Colombe (c'est la même signification) ne sont-elles pas les deux facettes d'une même jeune femme (l'auteur quand elle étais plus jeune ? ses étudiants actuels? ), face à son avenir (d'universitaire) ?
Quant au hérisson, peut-il se passer de ses épines protectrices ? La concierge peut-elle espérer une ascension sociale ? N'est-elle pas condamnée à son sort ? Au delà de ce qui arrive au personnage, c'est cette impasse sociale qui est triste je trouve.
mardi 30 avril 2013 à 08h26
En tant que formatrice en Français j'ai proposé des extraits de ce livre à mes stagiaires gardiens d'immeuble à plusieurs reprises et j'ai été exaspérée par la pédanterie alambiquée de la concierge et aussi par les réflexions complètement décalées, improbables dans un langage tellement suranné de l'adolescente. Cela sonne trop faux et n'est pas ancré dans l'époque. Le film qui en est tiré Le hérisson qui reprend la trame est bien meilleur et émouvant, ce dont le roman est dépourvu car trop de mots, trop d'analyse et d'explications, trop d'exégèse chassent l'émotion'