Me voici donc embarquée à ses côtés afin d'essayer de comprendre ce qu'Einstein cachait dans son fameux E=MC2.
Pour nous aider, Léo, un journaliste obscur, déroule l'Histoire des mathématiques de l'Antiquité égyptienne, en passant par Aristote, Copernic, Descartes ou Newton, jusqu'à notre fameux "grand zinzin" Einstein.

Le roman se situe donc à deux niveaux : la course poursuite d'Irène qui tente de résoudre la dernière énigme que son mari lui a laissée avant de disparaître, d'une part. et de l'autre, un cours accéléré des progrès scientifiques, brossant les biographies et théories de ceux qui ont compté dans le décryptage de notre univers complexe.

Et bien, je dois reconnaître que j'ai trouvé cette seconde partie une peu trop longue. Non pas que le côté scientifique soit abscons, bien au contraire. Leïla Haddad a su parfaitement vulgariser des principes qui m'étaient jusqu'alors totalement inaccessibles. Mais les parenthèses et digressions trop nombreuses sur la vie des grands zinzins me faisaient oublier le roman, et il me semblait lire un ouvrage théorique. Or, si j'avais acheté cette fiction, c'était bien pour pouvoir appréhender des notions abstraites et complexes sous une forme ludique.
Je pense que quelques coupes sérieuses dans les passages autobiographiques et une narration plus resserrée auraient permis à cette fiction de vulgarisation scientifique d'atteindre réellement son but.
En attendant, je ne regarderai plus jamais du même œil, un oignon, un citron dans un verre de boisson gazeuse, ou une simple feuille de papier. Pourquoi ? Lisez "Le principe du tire-bouchon", vous comprendrez alors de quoi je veux parler.

Extrait :

- Ce mouvement de la Terre, nous ne pouvons et ne pourrons jamais le sentir. Nous savons qu'elle bouge, et pourtant tous nos sens nous hurlent que c'est le pendule [de Foucault]. Connaissez-vous le principe du tire-bouchon?
- Jamais entendu parler. Il fait aussi partie de la relativité?
- Et comment !
Léo posa sur le sol le gros sac en cuir noir qu'il portait à l'épaule et en sortit deux bouteilles de bourgogne, plus une paire de tire-bouchon modèle standard, avec deux oreilles et une queue en ressort.
- Vous croyez que c'est raisonnable? bredouilla Irène, en jetant un regard autour d'elle.
- Il paraît qu'on ne comprend la physique qu'en tripotant, s'exclama-t-il en lui tendant une bouteille et un tire-bouchon. Vous pouvez l'ouvrir?
- Heu...
- Juste enfoncer le tire-bouchon.
- Voilà, s'exécuta-t-elle.
- Dans quel sens avez-vous fait tourner le tire-bouchon?
- Heu... temporisa Irène en répétant le geste au-dessus de sa bouteille. Dans ce sens-là...
- Celui des aiguilles d'une montre. De gauche à droite. Est-ce qu'il y a un autre moyen d'ouvrir cette bouteille?
- Je ne crois pas, non.
- Pourtant, si. Regardez.
Léo avait pris la seconde bouteille et piqué dedans le second tire-bouchon.
- Je prends ma bouteille et mon tire-bouchon, continua-t-il. Je l'enfonce un peu...
Puis il posa la bouteille sur sa cuisse et la fit pivoter autour du tire-bouchon, maintenu immobile.
- Je le tiens bien fixe, conclut-il. Et... je tourne la bouteille dans le sens inverse des aiguilles d'une montre... de la droite vers la gauche.
- C'est compliqué !
- Je suis d'accord. J'ai dû beaucoup m'entraîner. Voilà...
Le tire-bouchon était enfoncé presque jusqu'à la garde dans le morceau de liège. Léo prit les deux bouteilles et les plaça côte à côte sur le sol. Les mains sur les hanches, il les contempla avec un air satisfait.
- Il n'y a plus qu'à tirer pour ouvrir... Le résultat est exactement le même, il n'y a aucune différence entre les deux bouteilles. Que j'aie tourné le tire-bouchon dans le sens des aiguilles d'une montre, ou la bouteille dans le sens inverse, les deux méthodes sont tout à fait équivalentes. Si je ne vous avais rien dit et rien montré, vous auriez été incapable de me dire laquelle a été employée et pour quelle bouteille. C'est la même chose pour la Terre et le ciel. Que ce soit l'un ou l'autre qui bouge, c'est du pareil au même.
- C'est à dire?
- C'est à dire que nous observons de toutes façon exactement la même chose.

couverture
Editions de La Table Ronde - 433 pages