Clara est toile pour artiste peintre. C’est son métier.
Depuis quelques années l’H.D. (Hyper-Dramatisme) fait rage dans le monde de l’Art. Il s’agit de peinture en trois dimensions ayant pour matière première des corps humains. Le maître en la matière, Bruno Van Tysch, rencontre un succès mondial avec ses expositions « Fleurs » et « Monstres ». Mais voilà que l’un de ses tableaux, une jeune fille de 14 ans, est retrouvée assassinée sauvagement.

Oeuvre d’un psychopathe ? Ou destruction d’une peinture, orchestrée par la concurrence ?
C’est ce que tentent de comprendre Boch et Wood, deux employés de La fondation Van Tysch.
Pendant ce temps-là, Clara s’apprête à vivre son ambition : être transformée en chef d’œuvre.

Ma première surprise a été de découvrir un registre que je ne connaissais pas chez cet auteur : ni fantastique, ni S.F., à peine un récit d’anticipation. On est plutôt dans un thriller classique : des meurtres sanglants, un modus operandi atroce, des enquêteurs qui jouent contre la montre.
Enfin, classique… pas tout à fait.
La toile de fond de ce récit (excusez le mauvais jeu de mot), est tout à fait originale et intéressante. Somoza pousse l’art contemporain à son paroxysme. Ces toiles humaines, abandonnées aux quatre volontés d’artistes plus ou moins pervers, sont à la fois fascinantes et abjectes. Toutes les techniques d’apprêts, de création, de tension de la toile m’ont captivée. Somoza nous plonge dans un univers glauque où l’humain ne l’est plus tout à fait.

Maintenant, s’agissant de l’intrigue proprement dite, je n’ai pas vraiment été « bluffée » et j’ai retrouvé des mécanismes déjà usées dans un certains nombre de thrillers.

Du même auteur : La dame n°13,Le détail,La théorie des cordes,La bouche,Daphné disparue,La clé de l'abîme,L'appât

Laurence

Extrait :

- J’aime faire preuve de délicatesse avec les tableaux… Celui-ci est très beau, c’est vrai. Les r vibraient dans sa bouche comme un court-circuit. Comment as-tu dit qu’il s’intitulait ?...
- Jeune fille à son miroir.
- Beau, très beau… Si tu le permets, Gertrude, je vais prendre un catalogue.
- Tous ceux que tu voudras.
Clara resta immobile après leur départ. « Beau, beau, très beau, mais tu ne vas pas m’acheter. Ça se sent à des kilomètres. » Elle savait que c’était mal de se laisser distraire alors qu’elle se trouvait en pleine immobilité, mais elle ne pouvait l’éviter. Elle était inquiète du fait qu’on ne l’achetait pas.
Quel était le problème avec Jeune fille à son miroir ? Elle l’ignorait. L’huile n’était pas extraordinaire, mais on l’avait acquise dans des œuvres bien pires. Elle posait debout entièrement nue la main droite sur le pubis et la gauche sur un côté, les jambes un peu écartées, peinte de haut en bas dans différentes nuances de blanc. Ses cheveux étaient une masse compacte de blancs profonds qui faisaient ressortir les tons brillants et veloutés. Devant elle se dressait un miroir rectangulaire de presque deux mètres de hauteur incrusté dans le sol, sans cadre. C’était tout. Il coûtait deux mille cinq cents euros avec un entretien de mille cinq cents euros par mois, un prix accessible pour n’importe quel collectionneur moyen. Alex Bassan lui avait assuré qu’elle serait vendue rapidement, mais elle était exposée depuis presque un mois à la galerie GS de la rue Valesquez de Madrid et personne n’avait encore fait d’offre concrète. On était le mercredi 21 juin 2006 et l’accord entre le peintre et GS expirait dans une semaine. Si rien ne se passait d’ici là, Bassan la retirerait et Clara devrait attendre qu’un autre artiste veuille peindre un original avec elle. Mais, pendant ce temps, de quoi allait-elle vivre ?

couverture
Éditions Babel - 648 pages.