Comme des milliers d’autres, ils font partie sans le savoir d’un programme initié par l’Eglise du Moncle : ils serviront de cobayes pour un voyage spatial de cent vingt ans à la recherche d’une planète habitable, Ester la planète d’origine est menacée par l’instabilité de son étoile.
Pris dans la tourmente politique d’un monde au bord de la rupture, contrôlés par des « mentalistes », manipulés par l’Eglise, Abzalon et Ellula sont le dernier espoir des hommes et des femmes embarqués de force dans les soutes de l’Estérion.
Voici l’histoire de leur survie.

On va passer sur la rencontre prévisible de la Bête (Abzalon) et la Belle (Ellula) pour ne garder que le talent de conteur de Bordage. Car il y a une dimension épique dans les lignes de ce roman. L’auteur convie son lecteur à explorer tous les aspects de la société, les thèmes qui lui sont chers : religion, politique, condition humaine, écologie, le gâchis des richesses naturelles .… Tout y est brillamment dépeint.
On avance au fil de ces centaines de pages de surprises, rebondissements en questionnements. Comment des criminels de la pire espèce, des kroptes archaïques et intégristes, des moncles représentants de l’Eglise dominante au pouvoir absolu, des ventresecs, pourront-ils vivre, cohabiter dans un espace confiné, limite carcéral naviguant dans l’espace vers une destination hypothétique ? Comment va se terminer ce voyage vers l’infini entre les désirs individuels, les luttes de pouvoirs, les manipulations entre groupes religieux, les manigances des mentalistes. L’Etre humain vole-t-il à la perte ??

Tout est dans ce premier opus de ce space-opéra mené de main de maître.

Ne manquez pas l'interview exclusive que Pierre Bordage nous a accordée.

Du même auteur : L'évangile du serpent, Les derniers hommes, Orchéron, Les guerriers du silence, Porteurs d'âmes, Le feu de Dieu, Les fables de l'Humpur

Dédale

Extrait :

« Rien prouve que c’était un Qval, Objecta Abzalon.
- Est-ce que tu n’as pas revue des scènes de ton passé, des épisodes de ta petite enfance que tu avais oubliés ? demanda le Taiseur.
- M’a plutôt semblé que ces images venaient pas de moi. En tout cas, j’les reconnaissais pas.
- Les explorateurs des Ier et IIe siècles de l’ère monclale ont décrit les mêmes sensations. » L’excitation échauffait maintenant le Taiseur dont les mains s’agitaient dans les tous les sens comme des serpents exaspérés. « Le contact avec les Qvals les a reconnectés à leur mémoire profonde, une mémoire qui ne contient pas seulement leurs propres souvenirs mais également et surtout les clefs profondes de la nature humaine, ses liens intimes avec l’univers…
- Quand ce.. cette chose m’a touché, j’avais juste la trouille, reconnut Abzalon.
- La culture estérienne assimile des Qvals à le peur et à la mort. Dans leur inconscient collectif, les hommes n’ont pas trouvé d’autre façon de justifier leurs actes. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que les terreurs implantées depuis la naissance remontent à la surface dans ce genre de situation. »
Une expression de méfiance, de haine presque, s’afficha sur la face difforme d’Abzalon.
« Tu causes comme un mentaliste , grognat-il.
- Tu ne les protes pas dans ton cœur, n’est-ce pas ?
- J’aime pas ceux qui fouinent dans la tête des autres. »
S’ensuivit un long moment de silence habillé par les gémissements des blessés et les vociférations lointaines qui annonçaient une reprise imminente des hostilités.
« Je les aimes pas non plus, reprit le Taiseur, mais pour d’autres raisons. Et, si je parle comme un mentaliste, c’est que j’en étais un. J’ai même travaillé pour le compte du gouvernement estérien sur divers programmes d’amélioration du comportement. Et puis j’en ai eu ma claque, j’ai donné ma démission et je me suis rendu dans les montagnes noires afin de réaliser un vieux rêve. Les Qvals me fascinent depuis l’enfance. J’espérais tout apprendre d’eaux, vivre en leur compagnie, étudier leur langage, leurs mythes, leurs croyances. Réflexe de mentatliste sans doute. Ils ont sûrement des quantités d’enseignement à nous délivrer. Mais ils ne m’ont pas admis comme l’un des leurs, et je ne sais d’eux par davantage que ce qu’en ont rapporté les récits des explorateurs du début de l’ère monclale. Tout çà pour vous dire que la rencontre entre un humain et un Qval ne relève ni de l’anecdote ni de la coïncidence. »

couverture
Éditions J’ai lu – 541 pages