En 1944, dans la pension des Panicker, on croise de drôles d'oiseaux : Mr Parkins, qui calcule la hauteur du clocher de la chapelle; Mr Shane, représentant en matériel de traite; Linus Steinman, jeune garçon juif ayant fui l'Allemagne nazie; et Bruno un étrange perroquet gris d'Afrique qui passe ses journée à répéter des chiffres dans la langue de Goethe.
L'assassinat de Mr. Shane va obliger notre célèbre détective à délaisser ses chères abeilles pour tenter de résoudre cette nouvelle énigme.

Ici, le récit est conforme aux règles du genre. Comme dans les romans « Who is the murder », il s'agit plus de déceler les indices qui nous mèneront au meurtrier, que de se voir précipité dans une enquête haletante aux mille et un rebondissements.
L'écriture est lente, un peu surannée, comme les récits de Conan Doyle. Michael Chabon prend son temps à l'instar de protagoniste. Il est d'ailleurs intéressant de noter qu'à aucun moment, l'auteur de nommera précisément « le vieil homme », laissant le soin au lecteur de le reconnaître grâce aux références multiples qu'il essaime dans le roman. En effet, au fil des pages, Michael Chabon s'amuse à faire des parallèles avec les enquêtes qui ont rendu mondialement célèbre l'ami du Docteur Watson.

Malgré tout, je n'ai pas réussi à rentrer totalement dans cette enquête. Peut-être s'agit-il simplement d'un erreur de casting : en effet, je n'ai jamais non plus été une grande aficionado des romans de Conan Doyle. Il me paraît donc logique, a posteriori, d'être restée sur le bas côté de ce récit-hommage. Ce qui peut avoir le charme d'une écriture un peu vieillie chez Conan Doyle, m'a paru laborieux chez Michael Chabon. Et puis, j'ai surtout regretté que Linus , le petit garçon,ait une part si minime dans l'intrigue. Relégué à un rôle plus que secondaire, il fait pâle figure alors que c'est sûrement ce personnage là qui m'aurait permis d'adhérer à l'histoire.
Une rencontre ratée donc, mais ce livre pourrait plaire à tous ceux qui aiment les enquêtes d'une facture classique.

Par Laurence


Incertain.

C’est sans doute le meilleur terme que je puisse trouver pour qualifier ma réaction à la lecture de ce roman. Ce n’est pas une énorme déception (quoique…), mais je ne saute pas de joie non plus…
Effectivement, le héros de l’intrigue est bien le célèbre détective londonien. Mais je crois que ma comparaison s’arrêtera là. Car s’il s’agit d’une énième aventure de Sherlock Holmes, ce n’est certainement pas la plus réussie.

Dès le départ, j’ai été frappé par la douloureuse tentative de l’auteur d’imiter sans jamais égaler le style de Conan Doyle. Incapable de s’affranchir totalement du créateur, il s’enferme dans des descriptions incongrues, totalement inadaptées voire inutiles.
Les éléments distillés dans le récit sont noyés sous une masse d’informations parallèles qui ne font qu’égarer le lecteur, si bien qu’on ne sait plus où nous en sommes.

Quelle déception, en tout cas, de trouver le héros qui me faisait rêver, étant plus jeune, réduit à l’état de vieillard presque impotent, muré dans ses souvenirs, paralysé par l’arthrite et dont le seul souci est d’élever ses chères abeilles.

Je suis également d’accord avec toi, Laurence. Le jeune Linus aurait mérité une plus grande part dans l’intrigue, de même que le perroquet et ses fameux chiffres que j’ai pu identifier avec le peu d’allemand qu’il me reste des mes cours de collège, mais qui ne sont nulle part traduit ou explicités.
Je suis aussi déçu par le titre qui n’évoque finalement rien du roman et me paraît être plutôt un écho de la dernière aventure de Sherlock Holmes : Le problème final.

Un point positif, quand même, les multiples allusions aux enquêtes passées, rédigées par le Dr Watson, qui n’est non plus jamais nommé, qui donnent quelques repères pour identifier le personnage et permettent à l’auteur d’établir la filiation entre ce héros desséché et sans contenance et celui de Doyle…
Bref, moi qui pensais lire une bonne enquête, un bon Sherlock Holmes, en ai été pour mes frais. Je garde mes illusions et retourne lire du vrai, du bon Conan Doyle, celui élevé au grain et plein air.

On voit finalement les méfaits du clonage, même en littérature…

Par Cœur de chene
le 27 novembre 2007

Extrait :

Elle avait rencontré le vieil homme une seule fois auparavant, en 1936, à la gare; il avait surgi de son ermitage infesté d'abeilles pour aller chercher cinq énormes caisses qui lui étaient expédiées de Londres. Ce matin-là, Mrs Panicker se rendait à Lewes mais, quand le vieil homme avait arpenté péniblement le quai sud, escorté du fils aîné de son voisin, Walt Satterlee, un garçon bien bâti, elle avait traversé pour mieux voir. Il y avait des années et des années de cela, son nom – synonyme désormais de la grandiloquence et de la rigidité d'une ère disparue – avait agrémenté les journaux et les gazettes de police de l'Empire, mais c'était sa célébrité locale, plus récente, fondée presque exclusivement sur sa timidité, son irascibilité légendaire et son hostilité envers tout commerce humain, qui, ce fameux matin, l'avait attirée de son côté du quai. Maigre comme un whippet, l'avait-elle décrit plus tard à son mari, avec quelque chose du chien, ou plutôt du loup, dans les traits du visage aussi, des yeux aux paupières lourdes, délavés, intelligents et aux aguets, qui avaient englobé les caractéristiques et le mobilier du quai, le texte des avis placardés, un mégot de cigare, un nid d'étourneau coincé dans les poutrelles de l'avant-toit.

couverture
Éditions Robert Laffont – 157 pages