Voilà comment ces fameux margats sont présentés en quatrième de couverture. En quelques pages, nous voilà embringués dans une série de portraits plus intéressants et attachants les uns que les autres. Portraits de ces gamins devant grandir dans les débris de leur quartier, les restes des bombardements, les rationnements d’après-guerre, les batailles (aussi sérieuses que la guerre) de territoire entre les bandes de quartiers différents. Il y a Frédéric, Gérard, Louis, Albert, Pierre-Marie, François, Gilles, Nanou, Germain, Michel, Jean-Baptiste, René et Dominique, la seule fille de toute cette envolée de moineaux.

Au fil de ces portraits, de la plume de Jean Le Boël qui m’est bien familière maintenant, on découvre la vie d’après-guerre, les stigmates qu’elle a pu laisser dans les quartiers, les pierres, les êtres humains ayant survécus tant bien que mal. C’est aussi l’évolution, les progrès auxquels il est parfois difficile de s’adapter tant ils vont à vive allure.

Lecture intéressante ma foi et même si elle se déroule à Boulogne-sur-mer, elle nous donne une idée de ce que certains de nos proches ont pu vivre à cette époque. J’ai vraiment bien aimé suivre ces gamins là.

Dédale

Du même auteur : En ville (petites proses), Quand s'ouvre l'horizon (avec les peintures de Dourlent), Le paysage immobile, Amoureuse mémoire, Un homme

Extrait :

Les ruines les plus dangereuses avaient été abattues, on avait barricadé tant bien que mal les caves béantes, puis les herbes bruissantes avaient estompé des blessures sur lesquelles le regard ne s'attardait pas. Nul, semblait-il, ne voyait les parois noircies, les dessus de cheminée accrochés dérisoirement aux flancs des derniers édifices préservés ni les matelas à la laine brunie mêlés aux gravats qu'on ne remuait plus depuis qu'ils avaient livré leurs bouts de tuyaux pour la récupération ou de bois, pour les cuisinières. On devait s'approcher pour découvrir que tous ces débris dégageaient encore une espèce d'odeur sure, un peu âcre, comme d'urine, qui ne s'était pas totalement dissipée.
Vers le haut, près des bâtiments nouveaux, avaient prospéré des sureaux, rangés en bosquet. A cet endroit, des enfants, de ceux qu'on appelait ici des "margats", jouaient à l'escadrille de bombardement. Ceux-ci avaient pourtant vu le jour à la Libération ou juste après. Avaient-ils reçu ce jeu de leurs aînés ? Leur suffisait-il de lire les plaies du paysage, offertes dans le silence des adultes ?

couverture
Éditons Henry - 116 pages.