Fils de Lugalbanda, roi puis dieu à sa mort, Gilgamesh monte sur le trône d'Ourouk, une des plus puissantes cités de Mésopotamie, dont la déesse tutélaire est Inanna. Le roi et la grande prêtresse règnent de concert. Normalement. Mais Gilgamesh est dieu aux deux-tiers, un tiers homme seulement. Mais il n'est pas sage de mettre une déesse en colère.
Enkidou, l'ami que les dieux lui ont donné pour qu'il ne ressente plus la solitude liée à sa royauté, lui est enlevé par les maléfices de la déesse. Le chagrin de Gilgamesh est tel que rien ne peu le consoler.
La folie le prend, avec la peur de sa propre mort, inéluctable. Commence alors la quête pour l'Immortalité.
Ecrit d'après les tablettes relatant L'Epopée de Gilgamesh, ce récit à la première personne nous plonge dans un monde jusqu'alors oublié. Environ 2500 ans avant notre ère, alors que la plupart des civilisations sont à l'état embryonnaire.
Premier récit de littérature épique connu, L'Epopée de Gilgamesh est avant tout une oeuvre singulièrement troublante : une méditation poétique sur la mort, l'inéluctable destinée. Gilgamesh, héros s'il en est, être surhumain qui défie les démons, se retrouve paralysé par la peur de sa propre mort.
Un récit dans lequel j'ai eu du mal à démarrer, concurrencé par d'autres livres en cours. Puis finalement je me suis plongé dedans avec plaisir, découvrant une civilisation émergeant des ruines que nous connaissons aujourd'hui, remontant aux sources de la légende de Gilgamesh, personnage dont je connaissais l'existence par certains textes croisés lors de mes études mais dont je n'avais jamais pris la peine d'approfondir l'histoire.
Ce texte peut cependant en décourager par la difficulté à s'immerger dans cette période (ceci dit, regarder Les Dix Commandements de Cécile B. De Mille est une bonne introduction ), les tournures de phrases conservent le ton épique spécifique à ce genre d'écrit et que l'on retrouve chez Homère, ce qui rend parfois la lecture malaisée. Il faut également se familiariser avec les noms et le Panthéon. Bref, s'immerger totalement dans un monde antique disparu aujourd'hui.
Mais quel plaisir ! Et quelle leçon... à découvrir.
Du même auteur : L'oreille interne
Par Cœur de chene
Extrait :
« Je suis celui que vous nommez Gilgamesh. Je suis le pèlerin de toutes les routes du Pays et d'au-delà le Pays. Je suis celui à qui toutes choses ont été révélées, vérités dissimulées, mystère de la vie et de la mort, et de la mort surtout. J'ai connu Inanna dans le lit du Mariage sacré ; j'ai terrassé des démons et je me suis entretenu avec les dieux ; je suis dieu moi-même aux deux tiers, un tiers homme seulement. Ici, dans la cité d'Ourouk, je suis roi et, quand je marche dans les rues, je marche seul car aucun homme n'a l'audace de me côtoyer. Je n'ai pas désiré qu'il en soit ainsi, mais il est trop tard pour que ces attitudes changent ; je suis un homme à l'écart des autres, un homme solitaire, et ceci jusqu'à la fin de mes jours. J'ai eu autrefois un ami ; il était le coeur de mon coeur, le sein de mon sein, mais les dieux me l'ont enlevé et ils ne me le rendront pas.
Lugalbanda, mon père, a connu la même solitude sans doute, car il était roi lui-même, et dieu aussi, et le grand héros de son temps. Sa condition l'éloignait des hommes du commun, comme elle m'éloigne d'eux. »
Éditions Folio SF - 381 pages
Commentaires
vendredi 8 février 2008 à 22h14
J'ai un (très) gros faible pour Silverberg
samedi 9 août 2008 à 09h00
Bonjour,
Gilgamesh représente la synthèse de la vanité humaine, un genre de Prométhé.
Il a une représentation de lui purement mythique.
Par contre on peut se demander si cette légende précisément n'est pas justement la métaphore décrivant cette indécrottable vanité humaine... qui en même temps est son malaise existentiel...
Cordialement
dimanche 10 août 2008 à 02h44
Quelque part c'est un peu ça, effectivement. La quête de l'immortalité qui a toujours conduit l'homme à s'opposer à (aux) Dieu(x) et vouloir se placer au centre de l'univers.
Gilgamesh incarne parfaitement ce fantasme (au demeurant très masculin) mais arrive également, comme dans toute légende ou fable moralisatrice, à passer au-delà de cet état pour se réaliser finalement lui-même. En perdant sa quête, il se trouve, et ressort grandit des épreuves qu'il a traversé (idem pour Hrolf Kraki et Beowulf, autres héros dont la quête s'est cristallisée dans l'imaginaire des peuples).