Célibataire depuis un certain temps, nouveau propriétaire d’une maison dans Outremont, un des quartiers huppés de Montréal, Jean-Marc ne s’attendait pas à ce que cette rencontre avec un tout jeune acteur sans le sous le bouleverse à ce point. Entouré de ses grandes amies de toujours, il franchira les étapes qui mènent au grand amour. Si Jean-Marc arrive dans cette relation avec ses blessures et ses peurs, Mathieu, lui, arrive avec son fils Sébastien, élément très nouveau pour Jean-Marc qui n’a jamais côtoyé d’enfant.

Le cœur découvert est un roman où se succède plusieurs narrations : l’une à la première personne, la voix de Jean-Marc, et l’une à la troisième personne où se succède les points de vue de Mathieu et d’autres personnages.

J’avais adoré ce roman quand j’étais adolescente. J’avais aimé le personnage de Sébastien. Avec le recul, après avoir connu des voix d’enfants tellement riches (dans Le souffle de l’harmattan, dans Extrêmement fort, incroyablement près, ou même dans d’autres Tremblay), celle-ci semble bien banale. J’avais aussi aimé ce roman parce qu’il m’avait convaincu que l’amour, c’est l’amour, peu importe comment il se décline.

Mais pour être honnête… ma lecture d’adulte m’a irritée. Je n’ai pas encore résolu pourquoi Michel Tremblay, qui est un auteur bavard, ça fait partie de son style, est si accrocheur dans son théâtre et dans ses romans des Chroniques du Plateau Mont-Royal et me devient si difficile quand il décrit le Montréal des années 80. Je crois justement que la différence, c’est que son écriture, bien que bavarde, s’écoule dans une répartie jouissive dans Les Belles-Sœurs ou dans La grosse femme d’à côté est enceinte. Ici, c’est lui qui est bavard. Les détails, trop nombreux, et cette façon de nous expliquer les choses qu’il vient d’esquisser, comme pour être bien certain que nous ayons compris…

Les 100 premières pages m’ont enchantées. J’ai retrouvé l’énergie qui m’avait marquée adolescente, celle d’un amour naissant. Ensuite… bof… L’élément qui pour moi devrait être central dans ce roman (c’est-à-dire la difficulté posée aux yeux de la société de mettre des homosexuels en contact avec un jeune garçon) est finalement assez évacué et traité rapidement en toute fin… et parfois un peu grossièrement.

Et pour couronner le tout, il y a dans ce roman de grossières erreurs de concordance chronologique. Ceux qui me connaissent savent combien ça m’insupporte.

Du même auteur : Hotel Bristol New-York N.Y. , Thérèse et Pierrette à l'école des Saints-Anges, Albertine en cinq temps, Encore une fois si vous permettez, Hosanna, Belles-Sœurs, Le vrai monde?, La grosse femme d’à côté est enceinte, La traversée du continent, Douze coup de théâtre, Un ange cornu avec des ailes de tôle et Pièce à conviction (entretien avec Michel Tremblay)

Par Catherine

Extrait :

Le trac m’a pris quelques minutes avant que Mathieu arrive. Aurait-il mangé ? J’avais justes quelques tranches de viande froide qui finissaient de sécher dans le fond du frigidaire et une bouteille de vin de dépanneur. Buvait-il beaucoup ? J’ai décidé depuis longtemps, depuis l’époque où je buvais trop, de n’acheter que le strict nécessaire pour la maison ; il me restait donc exactement trois cannettes de bière. J’ai fait un saut chez Mélène et Jeanne ; elles n’étaient pas là. Je suis ressorti sous la pluie. Et plus de la bière j’ai acheté cinquante-six cochonneries inutiles, genre chips, peanuts, et même un de ces gadgets ridicules pour faire du pop corn dont je ris depuis tant d’années et que je m’étais toujours juré d’éviter.

couverture
Éditions Babel/Actes Sud - 411 pages