Nous sommes en pleine guerre civile au Liban. Bassam, le narrateur, travaille au port ; Georges dans un tripot de machine à poker sombre appartenant à la milice. Comme quoi le point de départ annonce souvent le chemin et même la destination : l’un prendra la mer, l’autre coulera dans l’obscurité. On suit donc les deux jeunes amis au cœur de la guerre, son horreur et sa banalité. Dans leur quête du vivre ou du mourir : les premières expériences sexuelles, les amis, les magouilles. Le rêve et la désespérance, la magie et l’horeur.

D’entrée de jeu j’aurais envie de dire : ne lisez pas ce que j’ai à dire de ce livre.

Tout au long de ma lecture j’ai eu le sentiment de passer à côté de quelque chose d’important et de beau. Je n’entrerai pas dans les facteurs qui expliquent cette rencontre ratée, mais juste en parcourant le livre à la recherche d’un extrait j’appréciais cette langue qui pourtant, en première lecture, ne m’a pas accrochée. J’ai passé la première partie à me demander ce que tout le monde avait à encenser ce livre, j’ai plus accroché à la deuxième, finalement commencé à vraiment comprendre la force de l’ouvrage à la troisième. Pour une raison que je ne saurais expliquer le livre me rappelait par moment L’aveuglement de José Saramago, un autre livre encensé de toute part qui ne m’a pas rejoint. J’étais, par moment, lassée de ce qui me semblait du verbiage : des images très fortes mais que je ne comprenais pas… comme si mon intelligence métaphorique était au repos.

En gros, j’ai la conviction que ce livre est excellent et qu’il mérite que vous vous lanciez…. Mais moi je suis passée à côté : mauvais timing. Il rejoint automatiquement le Saramago dans ma bibliothèque dans la catégorie : à relire dans deux ou trois ans, le temps d’oublier et de redécouvrir!

Par Catherine

La Recrue du mois est une initiative collective qui met en vedette le premier ouvrage d’un auteur québécois. Pour lire les autres commentaires sur ce livre vous pouvez donc vous rendre sur le site de La recrue du mois

Extrait :

Je repris contact avec la fraîcheur du sol, ses écrase-merdes allaient et venaient comme des vagues s’écrasant sur des rives nébuleuses, comme des voiles noirs éclipsant le soleil devant mes yeux, comme le fracas de dix milles tambours dans mes oreilles, comme une coulée de bonbon sur mon menton, comme, dans la salle de classe, l’odeur des gommes à effacer. De nouveau la poussière s’éleva de la terre à l’instar des nuages de craie que soulevait sur le tableau noir ce lèche-cul de Habib, tiens, ça me rappelait les coups de règle que faisait pleuvoir le jésuite français sur nos mains en guise de bénédictions, les genoux rompus sur le prie-Dieu de la chapelle, l’odeur de l’encens qui revenait me donner un avant-goût céleste et pardonnez-moi mon père car j’ai pêché, j’ai secoué mon arbre et il a éjaculé des fruits, j’ai brisé le verre de la pierre de saint Pierre, j’ai chapardé des bonbons et j’ai tripoté une gamine dans l’abri sous la pluie des bombes, tandis que sa mère ronflait au rythme des nouvelles à la radio. Vous voyez, mon père, je le confesse, c’est moi qui ai attendu que la chandelle expire, moi qui ai glissé une main sous sa chemise de nuit jusqu’à sa toison d’or flambant neuve, elle n’a pas dit un mot, elle m’a suivi dans mon jeu, quand je suis monté sur le toit elle m’a suivi comme un chiot, comme une oiselle. Depuis ce jour, mon père, elle s’est mise à porter des fringues tapageuses, à jouer avec ses cheveux, à mâcher du chewing-gum la bouche ouverte, à danser sans vergogne sur le moindre tube

De Niro's Game - Rawi Rage - couverture
En France : Éditions Denoël - 204 pages
Au Québec : Éditions Alto - 362 pages