Lily n'a pas vraiment les moyens de refuser un(e) client(e) : les finances sont au plus bas, les factures s'entassent, en deux mots elle est au bord de la faillite. Alors quand Maryse Pradelle lui demande de partir jusqu'à Montauban pour prouver que son mari a une aventure extra-conjugale, Lily n'a d'autre choix que d'accepter.

Sans grand enthousiasme, elle quitte donc la capitale pour la petite ville du sud, et s'apprête à effectuer un travail fastidieux et sans grand intérêt. Heureusement, dans l'hôtel où elle loge, un congrès annuel de commerciaux s'est également invité, et l'un d'eux ne la laisse pas insensible. Sauf que rien ne se déroulera comme elle l'avait prévu, et que très rapidement, Lily Verdine va se retrouver mêlée à une affaire trouble et dangereuse...

Malheureusement, cette seconde rencontre ne fut pas aussi réjouissante que la première. Pour commencer, le style de l'auteur m'a paru cette fois lourd et artificiel: Zolma a semble-t-il voulu utiliser le "parlé" du milieu (argot, tournures de phrases...) mais je n'ai pas réussi à y adhérer. Impossible pour moi d'imaginer une privée du XXIème siècle s'exprimer ainsi. J'avais parfois l'impression de me retrouver dans certains vieux films de gangsters. C'est peut-être un peu étrange, mais ce "parlé" manquait de féminité à mon goût; je devais sans cesse me remettre en tête que le narrateur était du sexe féminin (oui, je sais, dit comme ça, ça à l'air un peu réac :-D ).
Le style a donc pour moi été un réel frein à ma lecture. L'intrigue en elle-même est certes bien ficelée, et comme dans Mistral Gagnant, Zolma en profite pour "taper" sur des questions tristement d'actualité. Mais voilà, je n'ai pas été embarquée. J'ai lu pour savoir, mais n'ai ressenti aucune urgence, aucun frisson.

Je conseillerai donc à ceux qui veulent découvrir cet auteur, de plutôt se diriger vers Mistral Cinglant, roman que j'avais bien plus apprécié.

Laurence

Extrait :

Maryse est arrivée à l'heure. Elle était allée directement au bar et avait questionné Philippe. Il avait désigné du menton la table en formica que j'occupais au fond de la salle à côté du billard français.
Quand elle s'est dirigée vers moi, elle était assez loin et je n'apercevais pas les détails. Elle paraissait beaucoup plus jeune que sa voix. De près, j'avais rectifié : elle était bien à point, la baronne. Mais, elle appartenait à ce genre de femmes qui mettent tout en œuvre pour planquer les traces du vieillissement. Coups de serpe plus ou moins inspirés d'un chirurgien esthétique, maquillage étalé au rouleau, teinture rutilante histoire de masquer quelques cheveux blancs, fringues colorées dans les tons floralies tropicales... Et le plus impressionnant, c'était ses mains: une vitrine de la place Vendôme! Une bagouse de plus et il faudrait lui greffer une phalange, à la vieille.
J'étais toujours un peu surprise devant ce type de gonzesse. D'accord, le fait de me rapprocher de mon épitaphe ne me réjouissait pas, moi non plus. Mais autant d'énergie consacrée à se transformer une vitrine des grands boulevards la veille de Noël, ça m'étonnait toujours. J'aimais pas trop, à vrai dire. Alors, faut bien avouer que Maryse Pradelle, d'emblée, elle m'a déplus. Hélas, ce jour-là, l'argent n'avait plus d'arôme. Impossible de choisir le client.
[...]
J'étais soulagée par la perspective de récupérer un peu de fraîche. Maryse Pradelle m'a confirmé ses désirs de preuves puis on a topé et conclu sur un montant d'honoraires décent avant de terminer nos breuvages. J'ai suggéré de passer chez elle le lendemain pour récupérer des photos, histoire de mémoriser la trombine du gonze. Et pour prendre une petite avance, aussi. On a retopé. Elle est partie.
Philippe m'a apostrophée :
- Dis donc, tu l'avais bien imaginée la mamie. Mais putain, nom d'Illich, t'as maté les fresques sur la gueule ? On croirait la Sixtine. Enfin, chacun son truc. Et ton affaire, ça se précise ?
- Ouais. Je vais sûrement partir à Montauban. Le mâle aurait trouvé une autre femelle dans ce coin. Il pourrait songer à changer de tanière, donc elle préfère s'assurer une rente avant la migration.

Croisière jaune
Éditions Krakoen - 271 pages