Le roman débute avec la première lettre qu'envoie Kay à Jonathan, en réponse à sa requête. Commence alors une correspondance plus ou moins régulière entre les deux personnages, dans laquelle, à travers ses préférences littéraires, chacun va se dévoiler petit à petit. D’abord officiel, le ton de cette correspondance se fait de plus en plus intimiste, plus confident et on entre dans les secrets intimes de chacun, dans leurs pensées, dans leur vie, comme on le fait avec un ami proche.

« Dis-moi ce que tu lis, je te dirai qui tu es et comment tu aimes ». C’est ce que promet la quatrième de couverture et elle ne ment pas. Rassemblant une année entière de correspondance, ce roman épistolaire assez court est rempli d’émotions, de la souffrance, des joies et des doutes des protagonistes. On perçoit dans chaque lettre l’extrême sensibilité des deux personnages. A travers leurs préférences littéraires et leurs discussions sur les romans qu’ils ont lus, vont lire ou aimeraient lire, ils dévoilent leurs faiblesses et leurs peurs, mais aussi leurs joies et leurs petits plaisirs.
C'est une histoire réellement touchante et troublante que l'on peut découvrir au fil des lettres, au fil des mots. Des mots qui sont ceux d'une correspondance telle que l'on n'en voit plus aujourd'hui, à l'heure des e-mails et des SMS. Des mots passionnés et toujours pensés, des mots qui trahissent les sentiments les plus profonds, des mots qui avouent le plaisir d’aimer, la douleur de perdre, le courage de vivre quand même, la force de continuer grâce aux livres.

Autre petit plaisir du roman : on retrouve au détour de chaque page des noms d'auteurs ou de romans familiers, que l'on a, ou pas, déjà lus soi-même, tels que Mme de la Fayette avec sa Princesse de Clèves ou Faulkner, avec Les Palmiers sauvages, pour ne citer qu'eux. Notez qu’il n'est pas nécessaire d'avoir son carnet à portée de main pour noter les titres au fur et à mesure de sa lecture, car l'auteur ajoute en annexe une liste des principales références parsemées dans la correspondance, ce qui, il faut bien l’avouer, est très commode. J’ai acheté suite à la lecture de ce roman quelques-uns des titres donnés en référence. L’amour des livres que l’on sent à chaque page est réellement très contagieux ! On voudrait lire tous les livres mentionnés !

Le seul petit bémol de ce roman, c'est sa fin, même si elle s’avère assez facile à deviner. Mais bon, face à la beauté du roman, est-ce vraiment si important ? Pour ma part, cela ne m’a pas dérangée le moins du monde. Le chemin est parfois plus important que la destination !

Ce roman a reçu à sa publication une très mauvaise critique par une journaliste du magazine Lire, une critique, avec laquelle je ne suis pas du tout d'accord. Comme quoi, l’avis des critiques littéraire n’est pas parole d’évangile ! Chacun perçoit les romans avec son propre vécu et sa propre histoire et le ressenti dépend de tout ça ! Pour ma part, j'ai été touchée, tellement émue en lisant ce roman (deux fois déjà) que j’ai dû m’interrompre dans ma lecture de peur que mon cœur n’explose sous l’avalanche d’émotions que j’ai ressenties.
Bien sûr, l’article de Lire n’a pas totalement tort, et l'on ne peut s’empêcher de comparer ce roman au magnifique 84 Charing Cross Road d’Helene Hanff, qui a eu tant de succès et a rallié tant d’admirateurs avant que Katherine Pancol n’écrive Un Homme à distance. C’est vrai qu’ils ont énormément de points communs, ne serait-ce que la forme et le sujet (discussion entre un libraire et un client). Mais ayant lu le roman d’Helene Hanff après avoir lu Un Homme à distance, je me sens obligée d’avouer, à mon grand regret, que 84 Charing Cross Road ne m’a pas apporté le quart du plaisir et des émotions que j’ai ressenties avec le roman de Katherine Pancol. Les mots ne m’ont pas touchée de la même manière. Mais je pense que c’est parce qu’il n’a pas trouvé en moi le même écho. Je l’ai lu ce roman avec mes tripes, je l’ai abordé avec mon vécu, avec mes rêves, mes illusions et mes désillusions. Dès les premières pages, j’ai été happée par Kay et sa librairie, par sa sensibilité à fleur de peau, par cet amour des livres et des mots, par tout ce qu’on sent de fragile et pourtant de fort chez elle. Je me suis totalement identifiée à Kay. Et parce que ce roman est arrivé à un grand moment de doute pour moi, à une période difficile, une période où j’avais besoin de me raccrocher à quelque chose, parce qu’il a fait ressortir un rêve profondément enfoui, un rêve que je traîne avec moi depuis longtemps, ce roman restera incontestablement une référence pour moi. On a tous besoin d’un livre auquel s’accrocher quand ça ne va pas. Ce livre, je l’ai trouvé. Les différents lecteurs n’auront sûrement pas le même ressenti que moi et c’est normal, chacun a son propre vécu, mais rien que pour la beauté des mots et l’amour des livres, il vaut le détour ! Je vous le recommande chaudement !

Du même auteur : La valse lente des tortues

Pimpi

Extrait :

Pourquoi n’aime-t-on pas les hommes qui restent et vous dispensent de subir les atroces souffrances de l’abandon brutal ? Pourquoi a-t-on besoin de sublimes douleurs pour sceller les grandes histoires d’amour ? Pourquoi ne retient-on de l’amour que les moments de torture fulgurante ?
Vous qui êtes un homme et qui avez de l’expérience, pouvez-vous répondre à mes questions ?
Le soleil baisse à l’horizon. Il n’y a plus que moi à la terrasse du café. Le patron attend que je parte. J’arrache les pages de mon carnet où j’ai écrit ces mots, ces mots de 14 juillet qui ne dansent pas sous mes lampions car ils réveillent des souvenirs dont la blessure n’est toujours pas refermée.
La lecture n’est pas une activité innocente.
On n’en ressort pas toujours indemne.
La lecture est dangereuse.
Elle m’a extirpée des aveux que je ne vous aurais pas faits sous l’emprise du bourreau…
J’ai la tête qui tourne et vais poster ma lettre…
Je n’irai pas danser, ce soir, aux bals du 14 juillet.

Un homme à distance
Éditions Le Livre de Poche - 153 pages