Mais si l’on tend bien l’oreille à cette musique quotidienne relatée en une partition de douze nouvelles, il est une mélodie en sourdine qui joue en continue. Elle change bien de tournure de temps à autre pour nous brouiller un peu mais elle est toujours là. Et l’auteur nous la dévoile sous ses différents déguisements. C’est la petite musique de la solitude toujours présente, souvent accompagné de ce besoin continuel d’amour et de tendresse
 
Dans The Opel Touch, ce sont les mots de cette étudiante en droit, vendeuse dans magasin de prêt-à-porter, qui compare son cœur à un grand sac. « Mon cœur est comme un grand sac vide, le sac, il est costaud, y pourrait contenir un souk pas possible et pourtant, y a rien dedans ! »
 
Ce besoin d’amour et d’attention se retrouve aussi chez les plus endurcis - enfin c’est ce qu’ils croient ! - comme dans Permission. Un jeune homme rentre chez lui en perm' pour quelques jours. A son arrivée à la gare, personne, personne non plus à la maison sauf les chiens qui lui font tout de même la fête. « .. Alors comme ça, y’en a quand même des êtres vivants qui m’aiment et qui attendent après moi sur cette petite planète.. » Nous sommes un peu comme lui parfois avec ce fichu espoir rivé au cœur. « Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part.. c’est quand même pas compliqué  ».
 
Et puis, et puis, il y a tous les autres personnages des autres nouvelles, des poignantes (I.I.G, Pendant des années) comme des plus désopilantes (Junior, Clic-clac ou Épilogue). L’auteur nous montre son brio à jouer sur la gamme des sentiments. De la vraie « dentelle de Calais tricotée mains… ». et même parfois elle égratigne un ou deux personnages en des portraits pas piqués des vers, nous révèle leurs travers et défauts, leurs faiblesses avec ironie, humour, franchise, cela n’est jamais avec méchanceté aucune.
 
Alors, je dis que les exercices de gamme d’Anna Gavalda avec ces nouvelles ont été bénéfiques pour ses lecteurs car ils y trouvent beaucoup de choses, de bonnes choses, dont un grand plaisir à lire ces histoires. Cela donne surtout une très bonne idée du potentiel qui va exploser par la suite.

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Du même auteur :
Je l'aimais
Ensemble c'est tout
La consolante
L'échappée belle

Dédale

Extrait :

Dans Clic-clac
 
Elles m’avaient dit :
- Amène des collègues si tu veux… C’est vrai, t  nous présentes jamais personne..
Et pour cause les filles… pensais-je plus tard en admirant la faune et la flore qui mangeaient mes cacahouètes vautrées sur le canapé Cinna que maman m’avait offert pour mon diplôme de comptable, et pour cause…
 
Il était déjà tard et nous étions tous bien cassés quand Myriam – partie chercher une bougie parfumée dans ma chambre – est revenue glougloutant comme une dinde en chaleur avec le soutien-gorge de Sarah Briot entre le pouce et l’index.
 
Mes aïeux.
On peut dire que ça a été ma fête.
- Hé mais qu’est-ce que c’est que ça ?! Attends Oliviers, t’es au courant que y’a des accessoires de sex-shop dans ta chambre ???? De quoi donner la gaule à tous les mecs de Paris ! Nous dis pas que t’es pas au courant !?
La voilà partie dans un show d’enfer, incontrôlable.
Elle se dandine, mime un strip-tease, renifle la culotte, se retient à l’halogène et tombe à la renverse.
Incontrôlable.
Tous les autres sont morts de rire. Même le champion de golf.
- C’est bon. Ca suffit j’ai dit. Donne-moi ça.
- C’est pour qui ? D’abord tu nous dis pour qui c’est.. pas vrai les autres ?
Et voilà tous ces connards en train de siffler avec leurs doigts, de se cogner les dents contre leurs verres et de dégueulasser mon salon surtout !
- En plus t’as vu les lolos qu’elle a !!! Attends mais c’est au moins du 95 !! Hurle cette abrutie de Laura.
- On s’embête pas hein… m’a soufflé Fanny en faisant des trucs tordus avec sa bouche.
 
Je me suis levé. J’ai pris mes clefs et mon blouson et j’ai claqué la porte.
VLAM.


Éditions Le Dilettante - 118 pages