Stephano (Step pour les intimes) a quitté Rome il y a deux ans pour faire des études à New-York, mais surtout pour fuir ceux qui restaient : sa mère, son ex petite amie Babi et le fantôme de son meilleur ami Pollo. Mais l'exil n'a qu'un temps et il doit songer aujourd'hui à rentrer pour affronter la réalité.

Step, c'est un gros dur, un type qui n'a peur de rien. Tous les jeunes de la cité se souviennent encore de ses frasques et de ses coups d'éclats; et il a beau affirmer à son frère Paolo que le séjour New-Yorkais l'a changé, ce dernier en doute fort : il n'y a qu'à voir comment il maltraite l'Audi toute neuve à sa sortie de l'avion ou comment dès le premier soir il finit dans le lit de la belle hôtesse de l'air. Ce que Step n'avait pas prévu c'est qu'il croiserait une petite voleuse effrontée et que celle-ci ferait voler en éclat toutes ces certitudes. Gin, n'est pas du genre soumise ou réservée. C'est une jeune femme impétueuse, sauvage et qui a la répartie mordante. S'engage alors un jeu du chat et de la souris, mais le prédateur n'est pas forcément celui auquel on pense.

Frederico Moccia, à travers l'histoire de ses deux protagonistes, nous dépeint la jeunesse romaine un peu paumée de ce début de XXIème siècle. Très vite, il alterne les narrations sans crier gare et le lecteur navigue entre les pensées de Step et Gina. Ce procédé un peu déconcertant au départ, prend rapidement tout son sens. Il faut dire, que Federico Moccia parvient parfaitement bien à rendre les errements de la pensée et des sentiments de ces deux âmes perdues : nos deux héros ont parfois le comportement de deux gamins qui se cherchent et se chamaillent pour ne pas se dire qu'ils s'aiment; leurs joutes verbales sont succulentes teintées d'humour malgré la douleur de ne pas savoir dire. "L'amour n'est beau que s'il est un peu bagarreur..." et Step et Gina s'aiment beaucoup.
Parallèlement à leur histoire, on sent que Step trimballe derrière lui une série de casseroles, toutes ces choses qu'il n'a pas réglées avant son départ et qui vont refaire surface à un moment donné.

La violence n'est pas absente de ce roman, bien au contraire, et certains trouveront sûrement que Federico Moccia fait l'apologie d'une certaine forme d'obscénité et de vulgarité (comme j'ai pu le lire sur le forum du Livre de Poche). Si vous aimez les histoires à l'eau de rose avec un romantisme de conte de fées, il vaut mieux passer votre chemin car vous risquez d'être très déçu. Non, J'ai envie de toi n'est pas une fleurette gentillette et gluante de bons sentiments (encore que...); ce n'est pas non plus un "grand roman", n'allons pas jusque là. Mais il y a un vrai souffle, un regard affûté sur une génération perdue. Ce roman m'a plu car il est comme la vie : tendre et brutal à la fois. Évidemment, cette histoire s'adresse sûrement plus à la génération dont il est question (adolescents et jeunes adultes) mais j'ai trouvé qu'il était en tout cas bien meilleur que bien des histoires d'amour sirupeuses que l'on peut nous proposer ces derniers temps.

Voir aussi l'avis de Laure, qui une fois de plus n'est absolument pas d'accord avec moi. ;)

Laurence

Extrait :

Je sors, libre, de nouveau à Rome. J'ai passé deux ans à New York et j'ai l'impression d'être parti hier. Je marche rapidement vers la sortie. Je croise des gens qui tirent des valises, un type qui court à bout de souffle vers un avion qu'il ratera peut-être. Derrière les barrières, des familles attendent quelqu'un qui n'arrive pas. Des filles, belles et encore bronzées de l'été, attendent leur amour ou ce qu'il a été. Les bras croisés, immobiles ou se promenant, les yeux agités ou sereins, en tout cas, elle attendent. "Taxi, vous voulez un taxi?" Un faux chauffeur court à ma rencontre en se faisant passer pour honnête : "je vous fais un bon prix." Je ne réponds pas. Il comprend que je ne suis pas une bonne affaire et il laisse tomber. Je regarde autour de moi. Une femme élégante, portant une robe claire et une fine chaîne en or, me suis tranquillement des yeux. Elle est belle. Je lui souris. Elle ébauche un semblant de réponse, qui pourtant contient tout. Trahison, je voudrais mais je ne peux pas, envie de liberté. Et puis elle regarde ailleurs, renonciation. Je continue à regarder autour de moi. Rien. Quel idiot. Bien sûr. À quoi je m'attendais? Qu'est-ce  que je cherche? C'est pour ça que tu es revenu? Alors tu n'as rien compris, tu n'as encore rien compris. Je me sens bête et j'ai envie de rire.

J'ai envie de toi
Éditions Le livre de Poche - 574 pages