Lionel Kasdan et Cédric Volokine, deux flics sur le retour sont les acteurs principaux de ce drame en trois actes.
Kasdan est un vieux briscard à la retraite, un arménien bourru qui reprend du service de manière informelle parce que le premier crime s'est passé dans sa paroisse. Et parce qu'il a envie d'emmerder le monde.
Volokine est un jeune chien fou, touche-à-tout, surdiplômé, que l'enquête sort de la maison de désintox où il fait une cure. Un flic accro à la poudre...
Et au centre de l'intrigue : des enfants, de la musique sacrée, de l'héro, et la souffrance omniprésente.
Le dernier crû de Grangé fait plaisir à lire.
Bien mieux et surtout moins prévisible que La Ligne Noire, plus intéressant.
Une enquête menée tambours battant en plein cœur de la capitale et qui se déplace par la suite sur le territoire français. Une plongée dans l'histoire cachée des gouvernements et le Mal. Car c'est bien là que nous amène ce roman. En plein milieu de la folie.
Celle des hommes.
Le chant qui donne le titre au roman, le Miserere d'Allegri, est une œuvre vocale destinée à être chantée dans la Chapelle Sixtine lors de la Semaine Sainte. Depuis sa création au XVIIème siècle, cette œuvre a acquis une certaine aura de mystère car le pape avait interdit sa reproduction et sa représentation autre part qu'à Rome. Cette loi était en vigueur jusqu'au XVIIIème siècle et le passage au Vatican d'un certain Mozart...
C'est aujourd'hui encore l'œuvre chantée pour la messe du mercredi et du vendredi saints, et aussi une des œuvres polyphonique les plus populaire.
Comme il s'agit d'une œuvre évoquée tout au long du roman, je me suis un peu renseigné dessus. Et j'ai même réussi à l'écouter en ligne. Bien que la lecture du roman m'ai un peu préparé à l'écoute, j'ai été époustouflé. Je signale au passage que l'œuvre est réputée être l'une des œuvres vocales les plus difficiles à interpréter, notamment en raison de la partie soprano qui ne peut être chantée que par un enfant ou un castrat. C'est tout dire.
En bref, un roman qui me réconcilie avec Grangé. Un style qui m'a semblé évoluer encore et ici se rapprocher d'un Chattam (par rapport à ma critique du Serment des Limbes) dans les descriptions et le souci des détails. Beaucoup de notions abordées également concernant les faits d'armes des gouvernements et leur implication dans certaines affaires. Ça reste très instructif et les données assez facilement vérifiables.
Un très bon thriller pour passer un bon moment de lecture. Et voir ses enfants avec un regard neuf...
Autres romans de Jean-Christophe Grangé :
L'empire des loups
Le serment des Limbes
La Ligne Noire
La forêt des Mânes
Extrait :
On lui avait présenté un jeune gars modèle, tombé dans la dope à 25 ans, au contact des dealers et des drogués.
Mais ce n'était pas l'histoire.
Pas du tout.
Bien avant la brigade des Stups, Volokine était déjà défoncé. Kasdan voyait plutôt se dessiner un môme fermé sur ses traumatismes. Un gamin qui avait tâté très tôt de la horse. Tentative pour oublier ce qu'il avait vécu dans les foyers ou auprès de son salopard de grand-père.
La même question revint le tarauder. Comment le jeune Volokine s'était-il démerdé financièrement durant ses études ? Ce n'était pas avec les mille francs mensuels du SAV qu'il avait pu s'acheter sa dose quotidienne. Il n'y avait qu'une seule solution, facile à imaginer. Volokine avait dealé. Ou s'était livré à d'autres activités criminelles.
Kasdan appela un de ses anciens collègues de la PJ et lui demanda d'effectuer un passage de fichier. Après s'être fait tirer l'oreille, l'homme accepta de fouiller du côté du permis de conduire de Cédric Volokine et des appartements qu'il avait occupé durant ses études.
En 1999, alors que Volokine passait sa maîtrise de droit, l'étudiant habitait au 28, rue Tronchet, un trois-pièces de cent mètres carrés près de la Madeleine. Au bas mot un loyer de vingt mille francs...
Dealer.
Kasdan demanda quel véhicule il conduisait. L'ordinateur mit quelques secondes à répondre. En 1998, il avait acquis une Mercedes 300 CE 24. La bagnole la plus chère et la plus branchée de l'époque. Le modèle pur frimeur. Volokine avait 20 ans.
DEALER.[...]
Kasdan raccrocha et se posa la question à mille euros. Qu'est-ce qui pouvait un dealer défoncé, dans la force de l'âge, à s''inscrire à l'école des flics et à endosser l'uniforme pour deux années ? La réponse était à la fois limpide et tordue. Volokine avait oublié d'être con. Il savait qu'un jour ou l'autre, il finirait par tomber – et qu'il crèverait à petit feu, en taule, en état de manque. Or, où peut-on se procurer de la drogue, tout en bénéficiant d'un maximum de sécurité ? Chez les flics. Volokine était passé de l'autre côté, simplement pour s'approvisionner en toute impunité. Et à l'œil.
Tout cela n'était ni très moral, ni très sympathique.
Mais Kasdan se sentait attiré par ce chien fou qui avait bricolé avec la vie au point de bousculer tous les repères. L'Arménien pressentait une autre vérité. La drogue et le passage aux Stups ne constituaient qu'une étape pour le Russe. Kasdan le sentait profondément, Cédric Volokine avait choisi d'être flic pour une autre raison.
Au bout de deux ans il était passé à la BPM. Y mettant une fureur particulière. Le vrai combat, la vraie motivation de Volokine, c'étaiit les pédos. Protéger les enfants. Pour cela, il lui fallait sa dose et il avait dû bosser aux Stups pour établir ses réseaux. Alors seulement il était passé aux choses sérieuses. Sa croisade contre les prédateurs pédophiles.
En parcourant ses notes, Kasdan avait l'impression de lire la biographie d'un super-héros, comme il en lisait autrefois dans les bandes dessinées Marvel ou Strange. Un super-flic doté de nombreux pouvoirs – intelligence, courage, expertise du muay thai, habileté au tir – mais possédant aussi une faille, un talon d'Achille, comme Iron Man et son cœur fragile, Superman et sensibilité à la kryptonite...
Pour Cédric Volokine, cette fêlure avait un nom : la came. Un problème qu'il n'avait jamais réussi à régler. Comme en témoignait son séjour actuel en désintox.
Kasdan sourit.
Dans toute sa carrière, il n'avait connu qu'un seul flic aux motivations aussi tordues.
Lui-même.
Éditions Albin Michel - 524 pages
Commentaires
mercredi 17 septembre 2008 à 09h05
Laurence, c'est super d'avoir pu intégrer les liens.
Merci.
Juste une petite chose, deux fois rien... Mais le prénom de l'auteur c'est Jean-Christophe. Voila
mercredi 17 septembre 2008 à 09h24
Oups ! Désolée Cœurdechene, c'est corrigé. Je me disais bien aussi qu'un truc me chiffonnait....
mercredi 17 septembre 2008 à 13h41
je suis déchirée: ce livre me tente, mais en dehors des livres de français, d'anglais, de néerlandais, bref d'une liste abondante et (parfois) rébarbative, j'ai plein de travaux à faire et un emploi du temps très rempli.
Je vais donc noter le titre en petit sur le coin d'une feuille et attendre d'avoir le temps
mercredi 17 septembre 2008 à 13h44
Autant j'ai aimé L'empire des loups et La ligne noire, autant je n'ai absolument pas accroché Au serment des limbes...alors, je ne sais pas pour Misere. Les thèmes sont tentants ( le parallèle avec M.Chattam aussi ).
mercredi 17 septembre 2008 à 15h08
J'ai entendu une émission littéraire où se trouvait l'auteur qui parlait de ce dernier roman policier. Une vraie petite merveille, selon le journaliste. A te lire, Laurence, je crois que je vais me faire un petit plaisir en le lisant
mercredi 17 septembre 2008 à 16h03
Merci Nanne, mais je crois qu'il y a erreur... je ne suis pas l'auteur de ce billet, c'est Cœurdechene qui l'a écrit.
mercredi 17 septembre 2008 à 17h11
J'ai eu ma période Grangé durant laquelle j'ai lu tous ses bouquins dans la foulée... Je suis tentée d'en reprendre une petite dose avec celui-là, histoire de me remettre dans le bain !
vendredi 26 septembre 2008 à 15h09
Jean Christophe GRANGE avec Stéphan KING font la paire, plus tordus je connais pas, mais quelle imagination, quel talent, on aime ou on aime pas, moi une inconditionelle ils nous tranportent dans un autre monde pas forcément trés beau mais bizarre, inquiétant, étrange......et si jamais......... je me demande si leur mental est bien équilibré car des fois ils dépassent un peu les bornes et moi d'apprécier ce genre de livre suis-je normale?
vendredi 26 septembre 2008 à 23h55
Normale ou pas, je ne sais pas mais celui-là je ne le raterais pas ! J'aime trop les bouquins de Grangé !
Merci de m'avoir conforter dans mon envie.
dimanche 12 octobre 2008 à 17h44
j'avais été déçue par la ligne noire et le serment ...
sachant que mon préféré de Grangé reste , le vol des cigognes ..
le voici donc le Grangé que l'on attendait apres l empire des loups ... ouf !
et, il vaut le coup..
je l ai dévoré !
les personnages sont attachants à la manière des rivieres pourpres
on ne voyage pas forcément, mais on apprend plein de choses d un point de vue culturel
bravo, du grand grangé !
mercredi 30 septembre 2009 à 20h33
Aimant beaucoup Jean-Christophe Grangé, je m'attendais a un super livre. Et je n'ai pas été déçu! Loin de la!
Les personages bien recherché sont exeptionel! Un duo faisant un peu penser à Niemans et Abdouf des rivières pourpres (un peu).
Les quelques petites références musical donnent une note de modernité au livre, ce qui n'est pas pour me déplaire!
Bref, encore un livre formidable!
Merci pour votre article!!!
Mes respects! Bonne soirée!
samedi 14 novembre 2009 à 20h52
Bonsoir,
Je viens de finir de lire le livre Miserere. Quel suspens ! Et quelle atrocité ! Rien que pour ces deux adjectifs, celles et ceux qui aiment les romans noirs, cela vaut la peine de le lire.
Pourrait-on imaginer une suite avec l'enfant qui détient le fameux pouvoir ?
Bonne soirée et faite de beaux rêves !!!
Cath7