Suite à un livre que j’ai beaucoup aimé, La flèche Rouge, d’Yves Viollier, Pascale m’a conseillé de lire ce roman. En général, un conseil est tout ce qu’il me faut pour me précipiter sur un roman et cette fois-là encore, ça n’a pas manqué. C’est sans la moindre idée du contenu du roman que j’ai commencé cette lecture, par un bel après-midi d’hiver enneigé.

Ce roman met donc en scène un petit nombre de protagonistes : Balashov, ancien militaire converti, maintenant castrat. Anna Petrovna, une jeune veuve un peu libertine et son fils adoré, Alyosha. Le lieutenant Mutz, qui aime Anna, sans que cela soit réciproque. Le capitaine Matula et sa mégalomanie. Et Samarin, bagnard en fuite au passé mystérieux.

Dans cet huis-clos glacé où les histoires de chacun se dévoilent petit à petit, on apprend la difficulté de vivre en Sibérie, à cette époque-là. La révolution russe est en cours, le tsar vient d’être assassiné, le pays est aux mains des communistes. Un grand bouleversement se prépare.

Le roman commence par présenter la vie de tous les protagonistes, à mesure qu’ils apparaissent dans l’histoire. Pour cette raison, il est un peu long à démarrer, mais en même temps, découvrir le passé de chacun est passionnant, leurs histoires sont intéressantes et les connaître est indispensable pour comprendre les événements présents.

Ce roman n’est pas une lecture facile, ni même plaisante. La réalité qui y est décrite est dure, sans pitié et elle laisse peu de place au bonheur et à la joie. Y avait-il de toute façon une joie de vivre, en cette période de troubles politiques, où le peuple souffrait de la pauvreté et du froid ? C’est une histoire où les blessures et les meurtrissures de la guerre côtoient les idéaux révolutionnaires et les actes terroristes. Une histoire troublante et dérangeante, par certains aspects.

Malgré la dureté de ce roman et malgré les aspects sombres de la nature humaine qu’il dévoile, j’ai aimé cette lecture. Ce n’était pas du tout ce à quoi je m’attendais (même si je ne m’attendais à rien), mais j’ai apprécié ce livre. J’ai aimé et compris les personnages, leurs motivations, leurs envies, sans toutefois être toujours d’accord. Mais j’ai compris leurs sacrifices. C’est roman que l’on ne peut pas oublier facilement. Ce n’est pas un coup de cœur, ni un coup de poing, c’est un cliché de la réalité, une fenêtre qui s’ouvre sur la vie à cette époque. Un cliché qui se trouve être loin des idées romantiques que j’ai de la Russie et de la Sibérie. Loin de ce que je me représente quand je pense à ces pays qui exercent une telle fascination sur moi. Loin de ce que j’ai lu jusqu’à maintenant. Mais qu’il est important de garder en tête.

Pimpi

Extrait :

Au bout du compte, les destructeurs se détruiront entre eux et tout sera terminé. Voilà pourquoi ils s'autoriseront peut-être à agir comme des monstres, chacun en jugera ainsi et c'est légitime. Ils échappent à la culpabilité et à l'innocence. Ils sont terribles, effrayants, sanguinaires. Mais il est en vain de les juger, tout autant que de juger une rivière en crue, quand bien même elle vous aurait terrorisé, et quel que soit le nombre de vos proches qu'elle a massacrés. Les eaux redescendront et la crue disparaîtra, laissant derrière elle un territoire transformé.


Éditions Points - 466 pages