Isoler la maison pour ne plus entendre les vampires la nuit. S'assurer de la survie du groupe électrogène. Trouver de l'essence pour la voiture. Aller porter les corps abandonnés chaque matin au sol dans la fosse. Voilà de quoi est faite la vie de Robert Neville. Survivre pourquoi quand plus rien de ce qu'on aimait ne subsiste? Survivre pour qui quand tous les nôtres sont morts ou transformés en bête assoiffée de sang ? Survivre par instinct et par un espoir - ténu - qu'ailleurs survive un autre humain, un autre de sa race.

Entre les attaques des vampires, les réminiscences de l'épidémie et de la mort de ses proches, les stratégies de survie, la vie de Robert Neville se rythme de façon constante pendant les trois années du roman jusqu'à ce que le héros croise, par hasard, une femme en plein jour: une autre survivante? Cet incroyable apparition, Ruth, serait-elle la réponse à toutes ses attentes ?

Laurence m'a offert ce livre sachant bien que je n'étais ni très science-fiction, ni très vampires! Pari réussi : j'avoue y avoir pris beaucoup de plaisir. Le roman m'a happé et j'ai eu ma part de frissons d'épouvante quand la maison de Neville est encerclé par les vampires. J'ai beaucoup aimé le rapport de Neville à la survie et sa volonté encore si forte de comprendre l'épidémie même s'il est seul au monde. J'y ai vu un beau portrait de l'homme rationnel qui cherche à comprendre pendant qu'il suffoque. Je me serais passée de certaines images un peu convenue : les larmes de cristal qui glissent sur la main et autres du genre. 

Mais le roman a été écrit en 1954 ! Et le parallèle politique avec la Guerre froide et l'ère des Grands Ennemis n'est pas à négliger. Une lecture agréable donc, même pour ceux qui ne connaissent pas tellement la littérature de ce genre.

Du même auteur : Nouvelles (Tome 1 : 1950-1953), Nouvelles (Tome 2 / 1953-1959), Le jeune homme, la mort et le temps, La maison des Damnés

Par Catherine

Extrait :

«La puissance du vampire tient à ce que personne ne croit à son existence.»

Merci quand même, docteur Van Helsing, pensa-t-il en posant son Dracula. L'air morose, il s'abîma dans la contemplation de la bibliothèque en écoutant le deuxième concerto pour piano de Brahms, un whisky sour dans la main droite, une cigarette glissée entre les lèvres.

C'était vrai. Ce livre était un ramassis de superstitions et de clichés feuilletonesques, mais il avait raison au moins sur ce point: autrefois, personne ne croyait aux vampires. Dès lors, comment aurait-on pu les combattre ?

C'était dans ce contexte que ces créatures des ténèbres avaient surgi du Moyen Âge. Des êtres sans consistance ni vraisemblance, jusque-là consignés aux pages de la littérature romanesque. Les vampires symbolisaient le passé: le mélodrame épistolaire de Stocker, quelques lignes dans l'Encyclopaedia Britannica ou du grain à moudre pour les magazines à sensation et les producteurs de films de série B... Une vague légende qui se transmettait de siècle en siècle.

Eh bien, la légende était vraie.


Éditions Folio SF - 228 pages