Dans ce très court récit, le lecteur est invité à suivre Patte Folle le temps d'une fin de journée et d'une nuit. Alors que l'enfant s'apprêtait à rentrer chez lui après une longue journée de labeur, il se fait attaquer par un cobra femelle d'une taille gigantesque. À l'instant fatidique, alors que le serpent allait planter ses crocs dans le cou de l'enfant, ce dernier arrive à attraper la tête du cobra et à la maintenir à distance. Mais que faire ensuite? Si l'enfant relâche la pression, le serpent le tuera immanquablement. C'est cette lutte entre l'enfant et l'animal qui nous est conté dans Venin.

C'est un conte cruel et terrifiant, mais aussi une fenêtre sur le mode de vie de certains villages thaïs. On sent aussi derrière le récit toute la révolte de l'auteur contre les faiseurs de croyances, les gourous et autres manipulateurs. Au-delà du combat entre l'enfant et l'animal, c'est un combat entre l'innocence et l'imposture. Même si je ne partage pas l'enthousiasme de l'éditeur quand il parle d' « intensité rare », je reconnais que l'écriture de Saneh Sangsuk est fluide et que ce court roman pourra notamment séduire un jeune lectorat.

Laurence

Extrait :

Ces parages étaient son domaine. Son nid et les fougères au-dessus de son nid, elle les gardait jalousement. Sur ce tamarinier pourrissant, à la nuit tombée, elle rampait souvent pour s'étirer et jouir du vent. Que ces petits d'hommes violent son territoire l'emplissait de fureur. Les œufs près d'éclore dans son nid faisaient qu'elle ne craignait rien ni personne et qu'elle était prête à risquer sa vie pour eux. Se montrer de la sorte était un soi une déclaration de guerre et, du tréfonds de son instinct, elle était prête à guerroyer de toutes les façons, sans faire de quartier. Elle était prête à frapper.


Éditions Le Point - 74 pages