Un journaliste et un anthropologue. Deux copains de bancs de fac qui se retrouvent après des années autour d'un sujet brûlant d'actualité. Le journaliste désabusé tient son scoop avec la découverte dans les glaces alpines d'un corps en parfait été de conservation. Ce qui les réunit, c'est la tentative de réanimation cellulaire décidée par les autorités, afin de « confesser le bonhomme », car il pose un problème à la science.

Résumé lapidaire s'il en est, mais comment en dire plus sans en dire trop ?
Sachez toujours que le genre est plutôt à tonalité scientifique / fantastique. Le fantastique n'est là qu'à cause de Tronche de Gargouille, l'humanoïde. D'ailleurs, à comparer, l'atmosphère générale et le sujet m'ont d'emblée évoqué La Nuit des Temps, de Barjavel. Il y a autant de fantastique dans l'un que dans l'autre...
Le roman se lit d'une traite et mon attention, qui était au départ très éparpillée, s'est recentrée sur l'histoire au fil de la lecture. Impossible de lâcher l'ouvrage avant de l'avoir achevé. Et c'est un plaisir que de pouvoir en parler.

Il n'y a aucune date. Ça pourrait très bien se passer aujourd'hui, encore que nos cataclysmes naturels  n'aient pas encore atteint la violence dépeinte dans l'ouvrage. La science, elle, est en avance. Il est désormais possible de revitaliser des membres, voire même de ressusciter des corps. Jurassic Park est un jeu d'enfants et fait rire...
Entre énigme scientifique et extrapolation historique, l'auteur nous balade et nous, trop contents de ce que nous découvrons, le suivons volontiers. Le style est un peu particulier, peu de noms au début, puis trop à la fin. Je me suis un peu embrouillé dedans, mais au final la compréhension est bonne. Les caractères sont intéressants, toutefois pas assez marqués pour certains. J'eus aimé plus d'intervention de la part du journaliste. Toutefois le propos est fort bien amené et on s'étonne d'en être arrivé là, de manière tout à fait logique et naturelle.

La construction du roman en lui-même est assez originale. S'agissant d'une novella, l'auteur a peu de place pour développer ses idées. Il prend parfois des raccourcis. Certainement la bonne idée qu'il a eu est d'avoir eu recours à un style « document classé Secret Défense », avec une précision incroyable en peu de mots. Ce qui permet aussi quelques ellipses temporelles. Quant au final, explosif. Les Annexes données sont aussi importantes que le corps du récit et vu la teneur du dernier, on ne pouvait en attendre moins de ce côté là. Et moi, je suis frustré pour en parler, car si j'en dis plus, je dévoile les grandes lignes de l'intrigue, ce qui serait réellement dommage. Je tiens à laisser la surprise comme j'ai eu la mienne.

Ceci dit, la référence à Pandore n'est pas innocente. Et l'éditeur en la mettant dans le quatrième de couverture à su titiller juste ce qu'il fallait ma curiosité. J'espère que j'ai réussi à exciter la vôtre ?

Cœur de chene

Extrait :

L'image de ce corps conservé dans la glace ne constituait pas vraiment un spectacle dont on aurait aimé se souvenir pour meubler de longues soirées solitaires.
Ce n'est pas le bouleversement du landerneau archéologique et biologique consécutif à la découverte qui m'a gêné. C'est le portrait du bonhomme... « Tronche de Gargouille », je l'ai appelé. Et je l'oublierais volontiers. En tant qu'anthropologue, j'en ai pourtant vu d'autres...

Au départ, un satellite de quadrillage automatique a donné l'alerte. Il y avait un artefact sur un plateau alpin. Comme d'habitude, on y a envoyé une équipe de repérage de trois pékins nantis de tout un appareillage de contrôle. Les images numériques des radars à terre ont reconstitué une silhouette humaine. On a alerté les services concernés. Nous, en l'occurrence, la profondeur de détection, la distance de l'artefact aux bords rocheux et par conséquent la datation approximative de la trouvaille ayant permis d'exclure un crime contemporain. Au cas contraire, on aurait frappé directement à la porte des flics.
Quand nous avons extirpé le corps quasiment intact de dessous la moraine et l'avons eu nettoyé, toute l'équipe est restée silencieuse un instant, comme paralysée. […]
Le type était mort en fin d'inspiration. Nous avons tous pensé, c'est apparu spontanément lors de cette réunion, qu'il avait crevé de peur. Et que son attitude évoquait celle d'un hurlement avorté. Ce qui ne nous aurait guère étonné s'il s'était fait ramasser par une avalanche, ou prendre dans une chute à l'intérieur d'une faille profonde ou bourrée de peuf.
La question subsidiaire a été de savoir ce qu'il pouvait bien fabriquer à cet endroit là.


Éditions Griffe d'Encre - 101 pages