Nous retrouvons Smoky, la fliquette intrépide de Shadow Man, maintenant en charge de l'éducation de Bonnie. Décidée à faire un trait sur leur horrible passé et à chasser les fantômes de son appartement, Smoky profite de sa semaine de congés pour mettre dans des cartons les affaires appartenant à son mari et sa fille aujourd'hui décédés. Elle se demande même si elle ne va pas quitter son job au FBI. Mais son entreprise de rangement est interrompue par un appel urgent de son collègue Allan : une adolescente, dénommée Sarah, un flingue sur la tempe, entourée des cadavres dépecés de sa famille adoptive, menace de se suicider si Smoky ne vient pas au plus vite.

Comme dans Shadow Man, Cody McFadyen ne perd pas de temps en introduction inutile : dès les premiers chapitres, le lecteur est plongé dans l'horreur la plus absolue et comprend que ce massacre n'est que le premier d'une série macabre. Une fois arrivée sur place, Somky découvre une jeune fille terrorisée, qui se dit victime depuis 10 ans d'un serial killer qui s'attaque à tous ceux qu'elle aime. Sarah confie alors à Smoky le journal dans lequel elle a consigné son histoire. D'un point de vue narratif, le lecteur alterne alors entre l'avancée de l'enquête menée tambour battant par l'équipe du FBI et les extraits du journal de la jeune Sarah.
Si l'on met de côté le fait que le sort s'acharne sur Smoky (pour rappel, son mari et sa fille ont été tué devant elle; dans Shadow Man elle a dû affronter un tueur sanguinaire qui l'a obligé à s'auto-mutiler pour sauver Bonnie, la fille de sa meilleure amie), et qu'il paraît invraisemblable après toutes ces épreuves qu'elle ne soit pas devenue totalement folle, La mort en face est un thriller implacable. Comme dans son précédent roman, Cody McFadyen porte un soin tout particulier aux personnages secondaires et leur donne une épaisseur très bénéfique au récit dans son ensemble. Il ne s'agit pas simplement de découvrir le meurtrier, mais de vivre aux côtés de ceux qui mènent l'enquête, de partager leurs doutes, leur colère, leur découragement ou leurs espoirs. Mais comme il s'agit d'un thriller, on ne peut occulter le plus important, l'intrigue elle-même. Et là encore, Cody McFadyen se révèle être un maître du genre : bien qu'étant au fait de sa façon de raconter les histoires, et bien qu'ayant cherché dès le départ qu'elle pouvait être l'identité du meurtrier, je n'ai compris qu'à l'instant précis où l'auteur a abattu son jeu. En attendant, je me suis fait balader, j'ai suivi les fausses pistes, j'ai élaboré des théories fumeuses, et surtout j'ai eu ma dose de frissons et d'angoisse. Dévoré le temps d'un week-end, ce deuxième roman, loin de me décevoir, a fini de me convaincre sur les talents de conteur de l'horreur de Cody McFadyen.

Du même auteur : Shadow Man

Laurence

Extrait :

La chambre est décorée par la mort.
C'est la chambre des parents. Immense. Le lit très large, surmonté d'un miroir, n'occupe qu'un tiers de sa surface. Un écran plasma est fixé au mur. Au plafond, un ventilateur arrêté dont l'immobilité alourdi le silence de la pièce. La moquette beige omniprésente couvre encore le sol, ce que je trouve presque réconfortant dans ces circonstances.
Car il y a du sang partout !Il éclabousse le plafond, macule les murs jaunes pâle, pointille les pales du ventilateur. L'odeur est accablante ; ma bouche se remplit d'un goût métallique et je déglutis péniblement.
Je compte trois corps. Un homme, une femme et, apparemment, un adolescent. Ils sont tous nus, allongés sur le dos sur le lit.
Le matelas lui-même est dépouillé de ses draps et de ses couvertures qui gisent en tas sur le sol, trempés de sang.
L'homme et la femme encadrent le garçon. Les deux adultes sont été étripés, dans le pire sens du terme. Ouverts de la gorge à l'entre-jambe et vidés. Et aussi égorgés comme des verrats, d'une oreille à l'autre.
- Laaaa. Laaaa. Laaaa. Laaaa.
Mes yeux se tournent vers la fille. Elle est assises sur l'appui de la fenêtre, le regard perdu sur le jardin gagné par la nuit. J'aperçois de vagues contours de toits dans le lointain. Un monde crépusculaire, suspendu entre le soleil qui se meurt et les lampadaires qui se réveillent. Quelle synchronisation!
La fille tient un révolver, le canon appuyé contre sa tempe droite. Elle ne 'est pas retournée en entendant la porte s'ouvrir.
Je ne peux pas lui en vouloir. Moi non plus je n'en aurais pas eu le courage.


Robert Laffont -  473 pages