De Montréal à Vancouver, de la forêt à des bords d'autoroute, la petite raconte, dans ce récit, les rencontres qu'elle fait pendant son périple et les pensées qui lui traversent l'esprit. Malgré tout ce qu'elle vit, elle ne perd pas ça de vue : elle écrit.

Il s'agit d'un récit publié par une maison d'éditions spécialisée dans les essais. Mais les éditeurs n'ont pas pu résister à la force brute du propos d'Anaïs Airelle et on les comprend. Il y a quelque chose de très vif et brutal, de très épidermique dans le style de l'auteure. Malheureusement, une narration alternée (notes de journal à la première personne - en italique - et narration à la troisième personne) ne sert pas toujours le rythme du livre. J'aurais préféré qu'on choisisse un des deux modes et m'y laisser porter. Parce qu'il est triste ce récit, mais aussi lumineux à sa façon, et sans aucun doute nécessaire. Il y a effectivement des réflexions intéressantes chez Anaïs Airelle, mais surtout une ouverture à l'autre et un humanisme qui fait du bien.

Malheureusement, certains propos plus anecdotiques (petites engueulades, petits détails de vie, etc.) ne m'ont pas semblé nécessaires. Plus important encore, il y a par moment un propos très hostile face aux gens banals qui mènent des vies banales (les normopathes), propos que je suis habituée à entendre pourtant, mais auxquels je ne m'habitue pas. Il est heurtant, quand tu es celle qui a choisi une vie certes plus facile, mais que tu te bats chaque jour pour que cette vie reste accrochée à tes valeurs profondes, d'entendre l'hostilité de ceux que tu te forces pourtant à respecter.

Non, les fonctionnaires ne sont pas tous des cons sans envergure!

À lire tout de même, parce qu'il s'agit d'une voix trop rare qui mérite d'être entendue.

Catherine

La Recrue du mois est une initiative collective qui met en vedette le premier ouvrage d’un auteur québécois. Pour lire les autres commentaires sur ce livre vous pouvez donc vous rendre sur le site de La recrue du mois

Extrait  :

Cette nuit, le sommeil ne la trouve pas. L'insomnie, c'est cette vigilance sans but où rien ne se passe...

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.. et pourtant, dans la tête, qu'est-ce que ça fait comme boucan !

La petite erre sur la place du village!

« Pssst! Abricot ! »

C'est Thiento. Il l'emmène aux cuisines: le refuge des noctambules.

Thiento lui offre clope sur clope et se raconte toute la nuit: « J'ai été répudié par ma mère, mes amis... Je croyais que je pouvais leur faire confiance, qu'ils allaient accepter... alors je leur ai annoncé que j'aimais un homme. Et puis on m'a regardé de travers. En France, l'homophobie, c'est comme le racisme ou le sexisme : très ancré dans les mentalités. Alors tout le monde m'a fui. Et puis... la bouteille est venue à moi. Maintenant, je prends des médicaments pour calmer ma soif. Avant, j'avais honte quand mes mains se mettaient à trembler. Ici, au moins, tout le monde s'en fout. »


Éditions Écosociété - 133 pages