Un jour, Chroniqueur, un écrivain public parcourant le monde à la recherche d'histoires, sorte de Geoffrey Chaucer avant l'heure, croise le chemin de Kothe. Bien vite, il est persuadé que cet aubergiste n'est pas ce qu'il prétend être. Qu'il serait Kvothe, le plus grand magicien que la terre ait connu, qui a disparu plusieurs années en arrière dans d'étranges circonstances.
Après s'être fait tirer l'oreille, l'aubergiste avoue. Il est bien Kvothe. Et il accepte de raconter son histoire pour qu'elle soit écrite et rétablisse la vérité sur lui, car les légendes se sont emparées du personnage et l'ont magnifié.
Chroniqueur et lui passent un marché : Kvothe s'engage à dire la vérité, à ne rien dissimuler de sa vie, en retour, l'écrivain lui accorde trois jours pleins et entiers pour écouter son récit. D'abord choqué, car les plus grands héros dont il a recueilli le témoignage n'ont mis au plus qu'une journée pour parler, il finit par accepter.
Voici, tel que racontée par Kvothe, la première journée des Chroniques du Tueur de Roi...

Patrick Rothfuss est un illustre inconnu.
La biographie de Bragelonne est assez lapidaire. Normal, me direz vous, c'est son premier roman.
Certes, c'est son premier roman. Et le second ne devrait plus tarder à voir le jour, vu que le manuscrit est achevé et qu'il est parti chez l'éditeur pour une première lecture... Pourtant, on aimerait en savoir plus de l'homme qui vient de faire une entrée fracassante dans le monde de la fantasy avec un « premier roman » extrêmement complet, puissant, d'une force narrative exceptionnelle...
En fait, je suis à court de superlatifs.

Bon, j'ai achevé ma lecture en avril... cela fait donc trois mois que je retarde l'écriture de cette chronique et je ne suis toujours pas plus avancé. Pourquoi ? Simplement parce que je ne sais toujours pas comment dire qu'il faut le lire, absolument.

Il n'y a pas de révolution du genre. Rothfuss n'est pas un nouveau Tolkien ou que-sais-je encore. Il reste simple dans son écriture comme dans son propos. Pourtant, il y a derrière ces presque 800 pages un univers qui s'ouvre et une fois passés les premiers chapitres, le lecteur n'a qu'une seule envie, c'est de tourner les pages le plus vite possible pour avoir la suite de l'histoire.
Les personnages sont attachants, humains par tous leurs bons et mauvais côtés.

L'histoire est chronologique, avec une certaine mise en abîme puisque nous avons une histoire dans l'histoire. Kvothe raconte ce qu'il a vécu des années auparavant à un Chroniqueur parfois dubitatif. Le récit est émaillé de pauses où les personnages qui entendent le récit dans l'auberge réagissent aux actions et aux informations que Kvothe livre sur son passé. Un peu d'humour, de l'amour, de la beauté, du courage, du désespoir, de la violence, de la musique... et de la magie, tant dans les faits que dans les mots...

Bon, j'en dis pas plus, sinon je vais vous décourager.
En conclusion... et au cas où j'aurais pas été assez explicite... il FAUT le lire. Mais bon, vous avez le choix, hein ? D'aimer ou pas, mais après l'avoir lu.

Cœur de chene

Extrait :

Mon nom est Kvothe, ce qui se prononce presque comme « Quothe ». Les noms sont importants, car ils en disent long sur une personne. J'ai moi-même eu bien plus de noms qu'on a le droit d'en porter.
Les Adems m'appellent Maedre. Ce qui, selon la façon dont on le prononce, peut vouloir dire « La Flamme », « Le Tonnerre » ou « L'Arbre fendu ».
« La Flamme », c'est évident à peine m'a-t-on aperçu. Mes cheveux sont d'un roux flamboyant. Si j'étais né quelques siècles plus tôt, on m'aurait sans doute pris pour un démon et brûlé vif. Je les coupe court, mais ils sont d'une nature rebelle. Dès que je les laisse pousser, ils se hérissent et on dirait que j'ai pris feu.
« Le Tonnerre », je l'attribue à ma voix de baryton et au fait que j'ai arpenté les tréteaux des théâtres dès mon plus jeune âge.
Je n'ai jamais trouvé que « L'Arbre fendu » soit très significatif. Bien que, avec le recul, j'imagine que l'on pourrait considérer ce surnom comme en partie prophétique.
Mon premier mentor m'appelait E'lir, parce que j'étais malin et que je le savais. Ma première véritable maîtresse m'appelait Dulator parce qu'elle en aimait la sonorité. J'ai aussi porté le nom de Shadicar, de Doigts légers et de Six Cordes. On m'a aussi appelé Kvothe, Celui qui ne saigne pas, Kvothe l'Arcaniste, Kvothe le Tueur de Roi. Tous ces noms-là, je les ai gagnés. Je les ai mérités et j'ai payé pour chacun d'entre eux.
Mais j'ai grandi sous le nom de Kvothe. Mon père m'a dit une fois que ça signifiait « savoir ».
Bien entendu, on m'a donné bien d'autres noms. La plupart étaient fort grossiers, mais ils n'étaient pas souvent usurpés.
J'ai libéré des princesses retenues dans les tumulus de rois. J'ai incendié la ville de Trebon. J'ai passé une nuit en compagnie de Felurian et m'en suis sorti la vie sauve et en possession de tous mes esprits. J'ai été chassé de l'Université à un âge où la plupart n'y sont pas encore admis. J'ai suivi des pistes au clair de lune que personne n'oserait même évoquer en plein jour. J'ai conversé avec des dieux, aimé des femmes et écrit des chansons qui tirent les larmes au ménestrels.
Vous avez sans doute entendu parler de moi.


Édition Bragelonne - 781 pages