La trame de l'histoire est toute simple. Un homme est pris dans un embouteillage et comme cela arrive parfois sa voiture ne veut plus redémarrer. C'est la panne. Quelques badauds musclés l'aident à pousser son véhicule jusqu'au premier garage ; celui du village de Plan-les-Ouates (j'ai vérifié, cette ville suisse existe bien ! ) Et tant pis pour la séance d'apnées à la ville voisine !
En attendant la réparation, il a du temps à tuer et en profite pour visiter le village le nez en l'air. Pour donner un peu de consistance à ses déambulations, il décide de suivre une inconnue dotée d'un ruban carmin dans les cheveux et d'un appareil-photo.
Au fil des rues, l'auteur déroule gentiment la filature d'Arsène, notre apnéiste, ses réflexions délicieusement truffées de mots difficiles et rares (Arsène est aussi lexicographe et aime les dictionnaires). Marine, la femme suivie (petit clin d'œil aquatique), cherche quant à elle à retrouver la mémoire et sa vie d'avant.
La rencontre aura lieu dans une église autour d'un mensonge pas très pieux pour ne pas dire une vraie imposture.
Voilà ! Tout est dit ou presque. C'est court, très bien écrit. Cette histoire a aussi l'avantage de nous faire ressortir notre dictionnaire et lui donner une bonne bouffée d'air pour lire attentivement quelques définitions. Ce qui ne gâche rien.
Un petit roman donc, nettement plus léger que le grave et superbe Radeau du même auteur mais où la qualité de style et de l'histoire, le plaisir de lecture sont toujours présents.
À savourer comme un délicieux bonbon.
Du même auteur : Le Héron de Guernica, Cour Nord
Dédale
Extrait :
Je ne sais pas si elle prit la photo.
Quand, après un temps, je me relevai, elle tenait son appareil au niveau du menton et juste au-dessus, ses yeux étaient braqués sur moi. Je restai en plan au milieu de la chaussée, les bras serrés le long du corps. Un triporteur me klaxonna durablement mais je ne bougeai pas. Il me contourna au plus près.
Le regard de la femme s'enrichit, me sembla-t-il, d'un rien de commisération.
Nous nous faisions face.
En quelques instants, je passai de l'état de grâce causé par cette complicité soudaine au bourbier de la situation qui, les secondes s'écoulant, m'apparut complexe et sans espoir de dénouement fluide.
J'eus la tentation de m'enfuir.
Une tentation lointaine, incompatible avec l'hypoxie naissante et cette sorte d'engourdissement qui me gagnait tout entier.
Ainsi, devant elle, au beau milieu de la rue, sans réel désagrément et dans une posture somme toute digne, je me pétrifiais, comme sous l'emprise d'un quimboiseur.
Éditions La fosse aux ours - 102 pages
Commentaires
mercredi 25 novembre 2009 à 22h47
Un petit roman qui m'a été récemment offert mais que je n'ai pas encore lu... Tu me donnes envie de m'y mettre rapidement!
vendredi 27 novembre 2009 à 07h41
Il ne faut pas hésiter, Kali, pour cette petite douceur
mercredi 17 février 2010 à 18h12
Choplin, bien sûr !
Il faut aussi lire "léger fracas du monde" (pas léger du tout) ou encore "radeau" chez le même éditeur.
Si j'ai un peu de temps je ferai une chronique sur l'un ou l'autre
mercredi 17 février 2010 à 21h10
Ah le Radeau. Quel souvenir !! J'ai déjà hâte de te lire, Alice-Ange, sur l'un ou l'autre de ces titres
dimanche 11 avril 2010 à 18h51
ce livre est un petit bijou !!
truffé d'humour et d'intelligence
mardi 13 avril 2010 à 07h59
On ne peut mieux résumer. Merci Frenchpeterpan.