Mais après quelques années d'existence, la ville est victime d'une tragédie sans précédent. Nul aujourd'hui n'est en capacité d'expliquer le déroulement des événements et c'est pour cela que l'éditeur de Zen City est particulièrement heureux de publier aujourd'hui le témoignage de Dominique Dubois. Le roman est la retranscription du blog de Dominique (avec commentaires en sms et podcast) puis de son journal intime, entrecoupé des explications narratives de l'éditeur. Dominique Dubois, ce français moyen que personne ne remarque dans la rue, est le seul à pouvoir nous dire ce qu'il s'est réellement passé à Zen City.
Grégoire Hervier, dont le précédent roman traitait des excès de la télé-réalité, ne cache pas son admiration pour 1984 et le concept du Big Brother. Cette fois encore il nous transporte dans un univers où la télé-surveillance (ou télé-protection selon le point de vue) est maître. Il y ajoute un composé de notre société moderne : la consommation à outrance. Son héros, Dominique Dubois, en tant que spécialiste marketing, étudie nos comportements de consommation pour mieux nous inciter à acheter. Les passages dans le Zen Marché sont assez révélateurs et contrairement aux apparences, ce que décrit Grégoire Hervier existe déjà en grande partie.
Làs, je n'ai malheureusement pas été convaincue par l'ensemble du récit. Non pas que cela soit incohérent (bien au contraire puisque la plupart des technologies évoquées dans le roman sont déjà mises en pratique sous un forme ou une autre) mais Grégoire Hervier n'apporte rien de réellement neuf au genre. Peut-être cela est-il également dû au choix narratif : si la reproduction sous forme de billets de blog était une idée judicieuse, l'exploitation qui en est faite laisse parfois sceptique (comme la publication des commentaires en sms qui n'apporte rien à l'intrigue). De plus, la longueur des billets et les retranscriptions de dialogues entiers ne semblent pas très vraisemblables. Enfin l'ensemble manque de rythme, d'élan, et tout le début du roman peine vraiment à démarrer.
Disons que la fluidité du texte permet une lecture agréable, sans pour autant que cette dernière soit renversante ou époustouflante.
(D'autres avis plus enthousiastes dans la blogosphère : Biblio(manu), Sylvie, Amanda, Cuné, Lily ou MichelH.)
Laurence
Extrait :
Ce qui surprend au premier abord, c'est le calme. absence totale de caisses, de chariots, de bruit. Tout le monde se balade avec des écouteurs, les mains libres. Les lumières sont douces, enveloppantes et il règne une subtile odeur d'huiles essentielles. Vous vous retrouvez dans un vaste atrium dans lequel quatre directions s'offrent à vous. Chacun correspond à un élément: TERRE, pour tout ce qui est produits d'entretien et habillement, EAU pour l'hygiène, la beauté et les soins du corps, FEU pour tout ce qui concerne la cuisine et l'alimentation et enfin AIR, pour les produits culturels, la communication et les loisirs. J'hésite un peu. Par où commencer ? « Désirez-vous un conseil monsieur Dubois ? » le GPS intégré dans mon PerfectPhone a dû s'apercevoir que je restais sans bouger au milieu d'une allée. Je presse « oui ». « Votre réfrigérateur est vide... 100%. Entrez dans l'élément FEU. »
Éditions Au Diable Vauvert - 348 pages
Commentaires
lundi 14 décembre 2009 à 09h09
Chère Laurence,
merci de ton billet, qui me rassure. J'ai eu à lire ce texte et il ne m'avait pas pleinement convaincu ; j'avais même eu l'impression que l'auteur utilisait toutes les ficelles qu'il faisait mine de dénoncer et que, par l'abus des anglicismes (de langue et de pensée), il contribuait à favoriser l'émergence du monde que nous pourrions redouter. Bref, tout sauf une analyse qui aurait fait la part des choses -il n'y a pas que du négatif dans la modernité-, dans un ouvrage plutôt complaisant, sinon racoleur. Puis je me suis reproché cette sévérité : il ne s'agissait, après tout que d'un polar un peu lourdaud. Ta recension remet les choses à leur juste place.
mardi 15 décembre 2009 à 09h30
Cher Jnf,
quel plaisir de te lire ici. La distance m'a malheureusement empêché de te voir en début de mois, mais je sais que Dédale t'a passé mon bonjour.
Pour le roman de Grégoire Hervier, je comprends tout à fait ton point de vue. En tant que lecteur, on ne peut s'empêcher de penser à tant d'autres romans qui ont déjà traité ce thème; on pense à 1984 mais aussi à "Un bonheur insoutenable" de Ira Levin ou à "Le meilleur des mondes" de Aldous Huxley etc... alors évidemment la tâche pour l'auteur est bien plus ardue...