La Révolution gronde et Paris s'embrase.
Au milieu de la tourmente, Robespierre reste impassible. Il a trouvé le moyen de réunifier le peuple de Paris derrière lui. Il va créer l'événement avec une fête magistrale pour le 14 juillet : la Fête de l'Être Suprême.
Comme tout événement, celui-ci a besoin d'être médiatisé et d'être représenté. Il passe donc commande à son ami le peintre David dont l'atelier est au Louvre pour lui fournir un tableau représentant cet Être Suprême.
De son côté, David rencontre un jeune garçon albinos pour qui il se prend d'affection et décide d'en faire la figure d'un jeune martyr de la Révolution.
Coup du destin ? Rêverie tragique ? La Terreur prendra fin avec Robespierre sans que jamais ni l'une, ni l'autre commande ne soit réalisée.

BD autant qu'album, œuvre d'art à part entière, cet ouvrage est un petit bijou servi dans un écrin de couleurs, de bruit et de fureur.
Je connaissais Yslaire par la saga des Sambre, œuvre noire et tragique où les tons sépias dominent. Je découvre ici un Yslaire tout en finesse, en couleurs, en traits tirés à la hâte, en esquisses et en tableaux inachevés comme ceux de David, comme cette Révolution agonisante qui finit par dévorer ses propres enfants.

D'ailleurs, la peinture est le cœur de cet album.
En effet, tout tourne autour de l'atelier de David, au Louvre, ou autour de son travail d'artiste. C'est par sa vision que nous voyons les événements, ses relations avec Robespierre. Jean-Claude Carrière, comme un conteur, déroule la trame de l'intrigue comme le peintre s'active dans son atelier.
Tout d'abord une toile de fond, quelques à-plats, de grands coups de pinceaux pour brosser l'ambiance et le paysage, puis un retour minutieux sur les détails avec un pinceau fin, reprenant un peu ici, fignolant là... Du coup, lorsqu'on voit le résultat, la collaboration avec Yslaire est une évidence tant les deux manières de travailler s'imbriquent. Pour un résultat exceptionnel.

C'est un album sublime, c'est une BD magnifique, c'est les deux à la fois ou aucun tellement la frontière est mince.
En tout cas, c'est un vrai travail de collaboration, un travail d'artiste comme on en voit peu qui nous fait revisiter un peu notre passé.
Le voyage dans le temps à travers les tableaux disséminés dans les cases fonctionne complètement et l'on peut sans doute espérer d'autres créations de cet acabit...

A s'offrir et à offrir, avec plaisir.

Cœurdechene

Du même auteur : La controverse de Valladolid, L'argent, sa vie, sa mort.


Éditions Futuropolis - 80 pages