En de courts chapitres, on découvre l'enfance de l'auteur et ses expériences. L'auteur accorde une place importante aux histoires amoureuses qui n'ont pas été très concluantes. La découverte de l'acte sexuel lors de ce voyage dans le Sud ne peut faire oublier un amour contrarié dans sa jeunesse.

Élève sérieux, discret et aimé de ses professeurs, il n'hésite pas à mener la fronde contre l'un d'entre eux auprès du proviseur. Flaubert est alors armé, au lycée, d'un caractère fougueux et téméraire qu'il abandonnera par la suite, lorsqu'il se consacre à la littérature à plein temps. Car si son père, chirurgien, souhaite que Gustave lui succède dans sa discipline, ce dernier ne partage pas les mêmes ambitions. Il s'inscrit en droit, mais cette concession aux volontés paternelles n'est pas concluante car il échoue à tous ses examens. En parallèle, Flaubert écrit, notamment dans des revues. Il est d'ailleurs le créateur de l'une d'entre elles, lorsqu'il est au lycée. On découvre donc comment Flaubert a fait ses armes en écriture, par des nouvelles qu'il tente de faire publier dans divers endroits. Il s'essaie également au théâtre, mais son expérience est un échec très net. On quitte Flaubert au seuil de l'âge adulte, alors qu'il n'a encore aucune réussite littéraire.

Et c'est un peu la limite de cet exercice. On se contente de la jeunesse de l'auteur, comme si l'idée sous-jacente est que les événements qui ont émanés celle-ci étaient nécessaires et suffisants pour comprendre l'œuvre de Flaubert. Si sa relation amicale avec Du Camp ou d'autres événements ont en effet une influence, je trouve néanmoins dommage de se limiter à cette partie de la vie de l'auteur. Car son véritable travail d'écrivain, qui aboutira à Madame Bovary ou Salammbô, est simplement évoqué en post-face. Insister sur des écrits de jeunesse, pour la plupart introuvables ou jugés pas très bons, ne me paraît pas la meilleure manière d'aborder le travail de l'auteur. Maintenant, cet ouvrage a au moins l'intérêt de montrer que même les plus grands auteurs classiques ont mis du temps avant d'atteindre le niveau d'excellence qui fut le leur.

Yohan

Extrait :

En face du digne et sévère Collège royal de Rouen se trouve le Café national, libéral, un peu canaille. Depuis que l'interne Gustave est autorisé à sortir de l'enceinte du collège, on l'y croise les jeudis et dimanches. Blasé et nonchalant, une éternelle pipe à la bouche, les cheveux au vent, des idées républicaines en bandoulière, on l'entend discourir avec le sarcasme facile de son mépris pour les nantis et de son dégoût pour la vie. Il y retrouve Alfred le Poittevin, un fils de famille lui aussi. Ses parents possèdent des filatures ; ils sont bien plus riches que les Flaubert ce qui n'empêche pas les deux familles d'être très proches. Quelques années plus tard, la soeur d'Alfred donnera naissance à Guy de Maupassant auquel Flaubert sera attaché toute sa vie. De cinq ans son aîné, Alfred n'a de cesse de pousser Gustave à l'expérience. Il exerce une mauvaise influence sur lui : il l'initie au tabac, à l'alcool et, surtout, lui parle sans fin dans ses lettres, dans les termes les plus obscènes et les plus crus, de débauche, de prostitués, d'orgies. Mauvaise influence mais pas seulement, il le fait par ailleurs profiter de sa large culture : il lui fait lire Rabelais dont l'esprit de démesure et de dérision convient bien à celui du jeune homme, de même que Sade qui nourrit son anti-conformisme et sa détestation, non pas de Dieu et de toute mystique, mais de clergés et des hommes d'Eglise.


Gustave Flaubert à 20 ans, un vieux garçon de Louis-Paul Astraud - Éditions Au diable Vauvert- 168 pages